Publié il y a 10 ans - Mise à jour le 26.09.2014 - baptiste-manzinali - 4 min  - vu 2160 fois

FAIT DU JOUR Climat : la Camargue est-elle en danger ?

La Camargue avec 1 mètre d'augmentation du niveau de la mer. (photo Flood Maps)

La Camargue, aux alentours de l'étang de Scamandre. (photo Baptiste Manzinali / Objectif Gard)

Plusieurs hypothèses sont envisagées, mais globalement, le monde scientifique s'accorde sur une chose : si la consommation de gaz à effet de serre ne diminue pas au cours des 100 prochaines années, plusieurs zones à risques sur la planète seraient totalement ensevelies par les eaux. La Camargue est en première ligne.

Il y a quelques jours, l'OMM (Organisation Météorologique Mondiale) des Nations Unies publiait des vidéos proches d'un scénario de science fiction. Une quinzaine de journalistes du monde entier se sont prêtées au jeu : présenter un journal météo plausible en 2050. Et le concept n'a rien d'amusant. Au programme, des ouragans en masse, des villes englouties sous les eaux et des vagues de chaleur mortelles criantes de vérités. Si l'OMM est montée au créneau, c'est qu'un événement déterminant se jouait mardi à New York, le Sommet Mondial du Climat des Nations Unies. Plusieurs chiffres sont avancés selon les organismes scientifiques, et une chose ne fait plus aucun doute. Le réchauffement climatique provoque une fonte massive des glaciers, favorisant une montée des océans. Rien de nouveau sous le soleil, mais si la consommation de gaz à effet de serre des industries mondiales notamment, ne change pas d'ici un siècle, se sont des régions entières qui pourraient se trouver sous l'eau. Selon le GIEC (Groupe Intergouvernemental sur l'Evolution du Climat), les hausses du niveau de l'eau pourraient s'élever entre 26 et 82 cm d'ici à 2100, une université américaine évoque des chiffres entre 70 et 120 cm (chiffres rapportés par le site ecoco2.com).Sur la carte ci-dessous, voici à quoi ressemblerait la Camargue d'ici un siècle si les analyses précédentes s'avéreraient justes :

Cette carte interactive est visible sur le site flood.firetree.net, où l'on vous propose de choisir vous même le niveau de la montée des eaux, et d'en observer les conséquences. Mais, hormis une diminution massive de la consommation de gaz à effet de serre, n'y a t-il pas d'autres moyens de lutter localement contre de telles modifications géographiques ? Comment les autorités si prennent t-elles ?

Un phénomène plus naturel qu'il n'y paraît

En réalité, ces phénomènes sont anticipés depuis des dizaines d'années déjà. Il faut se rendre au Centre du Scamandre, sur la route des Iscles qui relie Saint-Gilles à Aigues-Mortes, pour constater que ces phénomènes sont observés avec beaucoup d'attention, et que les analyses dénotent parfois avec le "climat" ambiant, sans mauvais jeu de mot. Ici, on s'attèle à faire découvrir la Camargue gardoise dans une démarche pédagogique, parfois scolaire. On y étudie les milieux que peuplent la faune et la flore locale en coopération avec des équipes scientifiques. En 2003, suite aux crues du Rhône qui ont causaient des inondations importantes, le Centre du Scamandre était à l'origine d'un programme de ressuyage permettant une évacuation des bassins de rétansion plus rapide. Pour M. Colombaud, chef du service animation, ces méthodes sont très efficaces pour "préserver les lieux naturels et maintenir la biodiversité". 

La Camargue à la fin de l'ère romaine. (Photo : Camargue Gardoise)

Au Centre du Scamandre, il n'est pas question de proposer des simulations alarmistes sur 20 ou 50 ans, mais plutôt de prendre le problème sous un angle plus pragmatique. "Cela ne plane pas sur nous comme une épée de Damoclès, la Camargue est une zone inondable. Il y a 2000 ans, ce n'était que des lagunes. Avec le temps, le Rhône a emmené ses alluvions et petit à petit, la terre a gagné sur la mer. Cela fait partie des cycles naturels, même s'ils sont aggravés par la fréquentation humaine" précise M. Colombaud. Les règles d'urbanisme ont prit en compte ses facteurs, en limitant les zones bétonnées et en renforçant les protections naturels comme les dunes ou la végétation. Le cycles de migration des espèces volatiles a quelque peu évolué, il y'a plus d''hérons qu'avant, et le moustique tigre est apparu récemment, "pour des raisons qui sont plus liés aux fluctuations de la population plutôt qu'au climat" selon M. Colombaud.

Une fréquentation humaine bénéfique aux Salins de Giraud

Pus étonnant encore, l'exploitation du territoire aux Salins de Giraud serait vitale pour sa survit. Si l'activité humaine et touristique venait à y disparaître, c'est tout un écosystème qui serait laissé à l'abandon, alors qu'il dépend justement de l'homme et de sa contribution à son entretien. "Dire que l'homme est coupable de tout, cela nous déresponsabilise. Ce n'est pas mon discours. Il faut considérer que l'homme a fait des erreurs et qu'il cherche à évoluer dans un sens bénéfique" rassure M.Colombaud. La prise de conscience au niveau international est venue en 1986, avec la conférence de Ramsar visant à mettre en place une protection des zones humides sur la planète. Le Syndicat Mixte de la Camargue gardoise est née en 1993 dans le but de labeliser ce patrimoine à l'UNESCO avec l'étiquette Réserve de Biosphère.

Récemment, des investissements de plus de 10 millions d'euros de travaux financés par l'Europe, le département, et la région, ont permis d'établir un schéma d'amélioration des capacités d'irrigations. "On estime que ces travaux nous permettront de diminuer le temps de submersion de vingts jours" nous explique Jeremiah Petit, conservateur de la réserve naturelle. Un processus en corrélation avec les agriculteurs locaux qui sont "la clef de la gestion de l'eau". Pour l'heure, aucun bilan ne peut être dressé de ce schéma d'amélioration des capacités d'irrigations, "Il sera testé aux prochaines inondations" ajoute M.Petit. Le plus tard possible, espérons.

Baptiste Manzinali

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