PORTRAIT DU DIMANCHE Julien Hurard, un des derniers torréfacteurs à l'ancienne en France
Dans la zone artisanale d'Uzès, non loin du musée Haribo, se trouve l'Atelier du Café de Julien Hurard. Un bruit de locomotive, l'odeur du café cuit, l'énorme machine située en plein milieu de l'atelier… Il n'en faut pas plus pour remonter le temps !
Avec une formation initiale dans le commerce, c'est lors du salon TAF à Montpellier que Julien Hurard découvre l'univers de la torréfaction : "Mon entreprise venait de fermer ses portes. Je me suis rendu au salon aux parc des expositions de Montpellier pour voir un peu les différentes offres, et je suis tombé sur le stand du Musée au Café. Il n'y avait personne. Du coup quelques jours plus tard, je me suis rendu à la boutique pour en savoir plus et je n'en suis plus ressorti". Gérée par un couple, Julien va s'intéresser de près à la torréfaction et aux pratiques anciennes : "J'ai en majeure partie tout appris seul. Je regardais comment le propriétaire torréfiait le café et je me suis fait la main tout seul". Mais le couple assez âgé, songeait fortement à la retraite. Leur fils ne souhaitant pas reprendre l'affaire, le couple se tourna vers Julien : "C'était un investissement lourd, sachant que j'avais déjà perdu une entreprise". Mais avec persévérance et motivation, Julien Hurard a su convaincre les banques et ainsi ouvrir son propre atelier.
La torréfaction à l'ancienne, un réel challenge
Après maintes recherches dans la ville d'Uzès, Julien Hurard finit par trouver un local correspondant à ses critères : "Il me fallait un local assez haut pour faire rentrer ma machine, et assez large pour avoir suffisamment d'espace. Je voulais également qu'il y ait un grand parking pour que les gens puissent facilement se garer". C'est ainsi qu'en août 2010, après six mois de travaux, l'Atelier du café voit le jour. "Je n'ai pas une grande visibilité du fait que je sois situé dans la zone artisanale. Il m'a fallu tout miser sur la qualité du café" explique l'artisan. Et pour réussir, le torréfacteur a un atout de taille : une machine de torréfaction datant de 1905, la plus ancienne en France. Bien loin des machines de torréfaction à gaz, la sienne fonctionne au bois et au charbon : "Cela demande plus de travail car la machine met du temps à chauffer. Et puis il faut sans cesse vérifier la température pour s'assurer que le café ne cuit pas trop". Une pratique qui nécessite de la patience, mais qui apporte une finalité unique. Cuit par la chaleur des braises, le café n'est pas agressé car la cuisson est plus douce. Et selon ses clients, cette méthode apporte une différence au niveau du goût : "C'est comme si vous faite cuire une pizza au four ou au feu de bois. Il y a ce goût significatif. Pour le café c'est pareil" confie Julien. Une pratique qui a apporté une grande notoriété à l'artisan, qui ne cesse d'augmenter ses chiffres d'affaires d'année en année.
"Cette méthode à l'ancienne, c'est un peu mon jardin secret"
Avec cette machine qui se fait de plus en plus rare, on pourrait croire que le torréfacteur n'a qu'une envie : transmettre son savoir. Et pourtant, nien conscient d'être le seul à posséder une machine aussi ancienne, Julien Hurard n'est pas prêt à partager ses secrets : "Cela ne fait que cinq ans que j'ai ouvert mon atelier et je suis l'un des seul, voir le seul, à torréfier mon café uniquement de manière ancestral. Du coup, cette méthode à l'ancienne, c'est un peu mon jardin secret. Je sais que je finirai par transmettre mes connaissances, mais pour l'instant cela me plaît d'être le seul à fonctionner comme cela".
Après avoir remporté de nombreux prix comme celui du Militant du goût gardois ou encore des Talents du commerce de la création d'entreprise avec le prix Coup de coeur, Julien Hurard voit plus loin : "J'aimerais participer en 2016 ou 2017 au meilleur torréfacteur de France. Le problème c'est que toutes les machines fonctionnent au gaz. Il faut donc que je m’entraîne, même si l'on dit que du moment que l'on sait utiliser une machine aussi ancienne, on sait tout utiliser". Un nouveau défis pour notre torréfacteur à l'ancienne qui, espérons-le, aura le même succès que son atelier.
Emeline Andreani