JUSTICE Accusé de viol, le médecin d'Alès reconnaît "certains attouchements"
Ce lundi 30 novembre, l'ancien gastro-entérologue d'Alès, Gérard Léothaud, comparaît libre devant la Cour d'Assises du Gard pour viol. Le médecin est soupçonné d'avoir effectué des pénétrations digitales et linguales sur l'une de ses patientes. Il encourt 15 ans de prison.
Le 16 octobre 2001, Annie, blonde aux yeux bleus et âgée de 43 ans, rend visite pour la quatrième fois à son gastro-entérologue, le Docteur Gérard Léothaud, pour soigner des hémorroïdes. Une séance de cryothérapie est prévue ce jour-là, mais aux dires de la plaignante, celle-ci dégénère. La présidente du tribunal, Geneviève Perrin, fait lecture de l'ordonnance de mise en accusation et rappelle les faits reprochés au médecin : il aurait dégrafé le soutien-gorge d'Annie, lui aurait touché les seins puis introduit des doigts dans son sexe avant de procéder à un cunnilingus.
Dans les jours qui suivent, Annie se confie à des proches puis à un avocat qui lui déconseille de porter plainte, faute de preuves. Mais six ans après les faits, le 21 novembre 2007, Annie change d'avis. Placé en garde à vue, le médecin admet que cette quatrième séance a "dérapé", qu'il est possible qu'il ait fait "ce qu'elle a déclaré" et que ce jour-là, il aurait "pété les plombs".
Ce lundi 30 novembre, à l'ouverture de l'audience et comme le veut l'usage, la présidente demande à l'accusé s'il reconnaît les faits. Dans un élégant costume, chemise bleue pâle, cravate rayée et droit comme un i, le médecin répond : "Je reconnais certains attouchements, mais je ne reconnais pas le viol. Je m'excuse auprès de Madame".
"Tout est comme dans un cauchemar"
L'enquêteur de personnalité s'avance à la barre et retrace la vie du médecin : sa rancœur vis-à-vis de sa mère, sa belle réussite professionnelle, sa jalousie, ses mariages, son divorce... Une enquête de personnalité qui ne semble pas au goût de Maître Phung, avocat de l'accusé, qui doute de l'objectivité de l'enquêteur : "Avez-vous trouvé quelqu'un qui dit un tout petit peu de bien de Monsieur Léothaud ?" Mais l'avocat ne va pas devoir attendre longtemps pour entendre du bien de son client. Trois témoins défilent à la barre et décrivent "un homme brillant, à l'écoute des autres" ou "un patron sympathique et gentil", pour une ancienne secrétaire.
Vient ensuite le témoignage attendu d'Annie. Pendant 45 minutes, elle évoque dans les moindres détails les faits de 2001. Elle revient sur cette journée du 16 octobre : "J'ai de la peine à tenir sur mes jambes, je me rends compte qu'il se passe quelque chose d'anormal. Il dégrafe mon soutien-gorge, me touche la poitrine, essaie de m'embrasser (...) il pénètre ses doigts dans le vagin, tout est comme dans un cauchemar".
- Êtes-vous formelle sur la pénétration des doigts ?, interroge la présidente.
- Tout à fait, et à plusieurs reprises, confirme Annie.
Le doute s'installe
Si la plaignante n'a pas de doutes, les avocats de Léothaud sont moins convaincus. Les deux ténors du barreau que sont Eric Dupont-Moretti et Jean-Robert Phung profitent de la moindre faille. Quand l'un s'engouffre dans une brèche, l'autre rebondit. Quand l'un attaque, l'autre calme le jeu. Le duo est parfaitement rôdé.
Le premier à attaquer, c'est Dupont-Moretti, qui s'interroge sur l'authenticité du ressenti d'Annie alors qu'elle a déclaré, quelques instants plus tôt : "Mon corps est endormi, mais pas mon esprit". Il s'interroge aussi sur les six ans d'attente avant de déposer plainte et, enfin, pourquoi Annie, quand elle choisissait de se confier, ne disait pas à tous qu'elle avait été pénétrée.
Jean-Robert Phung, lui, attendra le passage à la barre d'une secrétaire médicale pour jouer sa carte. Lors de son audition quelques instants plus tôt, Annie a déclaré que celle-ci était entrée dans la pièce alors qu'elle était au plus mal. Elle ajoute : "Je pense qu'elle était de mèche avec le Docteur Léothaud". Maître Phung demande alors à cette secrétaire médicale de rassurer la victime. La secrétaire s'exécute, se tourne vers la victime :
- Je n'étais pas de mèche, assure-t-elle.
- Merci de me dire ça aujourd'hui, soupire Annie, visiblement soulagée.
L'avocat est malin : il vient de démontrer aux jurés que la victime avait pu se tromper sur sa perception des faits ce jour-là. En est-il de même pour les pénétrations ? C'est la question à laquelle devront répondre les jurés.
Tony Duret