LE PORTRAIT Le spiripontain Aurelio Simon, tout frais centenaire
La canne, dispensable, ne touche pratiquement jamais le sol. A voir la démarche rapide d’Aurelio Simon, un mètre soixante dix tout au plus et cent ans depuis dimanche dernier, on a du mal à croire que l’homme qui se trouve en face de nous est né il y a un siècle.
Reçu hier en mairie de Pont-Saint-Esprit pour célébrer cet anniversaire « pas banal », dixit le maire Roger Castillon, Aurelio Simon a vu son parcours de vie retracé, entouré de sa famille.
Guerre civile en Espagne et résistance dans les Cévennes
Il faut dire qu’au delà du fait d’avoir dépassé le siècle, la vie de ce spiripontain d’adoption né dans les Asturies, en Espagne, a tout d’un roman. Déjà, sa date de naissance, le 21 février 1916, marque le début de la tristement célèbre bataille de Verdun, lors de la Grande Guerre.
La guerre, Aurelio Simon va la connaître à vingt ans tout juste, avec l’éclatement de la guerre civile en Espagne. « J’ai été blessé trois fois, au bras et aux jambes et je suis parti en 1939 en France », se souvient-il. Après trois ans de guerre civile donc, Aurelio Simon finit par fuir le franquisme et arrive d’abord à Argelès dans les Pyrénées-Orientales puis prend la direction du Gard, alors que la seconde guerre mondiale allait éclater.
Il devient alors mineur à la Grand’Combe pendant deux ans, avant d’entrer dans la résistance dans les Cévennes à partir de 1942. De cette vie d’abord rude et marquée par deux guerres, il garde un souvenir : après ça, « je ne me suis jamais plaint du boulot, j’aimais travailler. »
« Jusqu’à l’année dernière je faisais 20 km de vélo par jour »
Il participera ensuite à la construction de Marcoule, ce qui le poussera à s’installer à Pont-Saint-Esprit en 1964 sur le quai de Luynes, où il réside encore. Retraité depuis 1980, Aurelio Simon occupe ses journées notamment en faisant du sport, et pas qu’un peu : « jusqu’à l’année dernière je faisais vingt kilomètres de vélo par jour. » Il explique avoir dû arrêter car « j’ai été blessé de guerre aux deux jambes et au bras, l’arthrose s’est mis dedans. »
Un siècle, une longévité exceptionnelle qui interroge. Mais quel est le secret d’Aurelio Simon ? « Bien manger, se maintenir à un régime à peu près stable, travailler et ne jamais se saouler, ça ne m’est jamais arrivé », lance-t-il dans un sourire avant d’aller trinquer au jus d’orange.
Et du haut de ses cent ans, ce témoin pudique d’un siècle et d’une époque dont les mémoires vivantes se font de plus en plus rares, sort d’un petit carnet une photo cartonnée en noir et blanc d’un fringuant jeune homme qui s’avère être lui. Il sourit, avant de glisser dans un murmure : « la vie a changé très très vite. »
Thierry ALLARD