FAIT DU JOUR Le Vigan : ces éleveurs qui veulent aller à l’abattoir
Tout le monde se souvient des images atroces tournées en début d’année à l’abattoir intercommunal du Vigan. Aujourd’hui, la Communauté de communes du Pays Viganais souhaite abandonner la gestion de l’établissement. Pour éviter la fermeture, un collectif d’éleveurs s’est formé pour sauver l’abattoir. Mais un repreneur privé est aussi dans la course…
Les images chocs révélées par l’association L214 ont-elles précipité la fermeture de l’abattoir intercommunal ? Toujours est-il qu’après quinze ans de gestion, la Communauté de communes du Pays Viganais envisage, au 31 décembre prochain, de se désengager. « La décision est déjà dans les tuyaux depuis quelque temps », assure Roland Canayer, président de l’intercommunalité. « En laissant la place, notre volonté est de créer un électrochoc pour que les éleveurs s’investissent dans cet abattoir. C’est d’ailleurs ce qui est prévu depuis toujours », ajoute-t-il.
L’électrochoc a fonctionné. Des éleveurs du Pays Viganais, de l’Hérault, du sud du Gard, de la Lozère et de l’Aveyron sont aujourd’hui mobilisés. Pas question pour eux de voir disparaître cet outil indispensable à leur activité. Regroupés au sein d’un collectif, 45 d’entre eux souhaitent créer une coopérative d’intérêt collectif qui serait gestionnaire de l’établissement. Ce dernier resterait, selon le souhait des éleveurs, la propriété de l’intercommunalité.
« Une gestion à notre image »
Dans cette nouvelle gestion, le collectif mettrait un point d’honneur à être exemplaire : « Nous voulons faire un abattoir paysan dédié aux petits éleveurs avec l’accent sur le bien-être animal, de manière à devenir une référence nationale », explique Stéphane Thiry, éleveur de bovins et d’ovins à Bez-et-Esparon. « Lorsque nous avons découvert ces images terribles, nous sommes tombés des nues. Aujourd’hui, nous voulons maîtriser la filière à 100% avec une gestion à notre image et une préservation de notre tradition pastorale », poursuit-il.
Ovins, porcins, bovins et caprins seraient abattus, soit environ 100 à 120 tonnes par an pour commencer. « Nous pourrons arriver à l’équilibre autour de 150 tonnes », précise Stéphane Thiry. En parallèle, un atelier de découpe serait développé pour la vente directe, ainsi qu’un atelier de transformation. Le personnel actuellement en place, soit trois salariés, serait conservé. « Bien sûr, ce ne sont pas les employés qui sont à l’origine des sévices », souligne l’éleveur.
Soutenu par la Communauté de communes, la Chambre d’agriculture et le député William Dumas, le projet est, pour l’heure, au stade administratif. Il devrait se concrétiser en début d’année 2017. En attendant, l’intercommunalité pourrait garder les rennes de l’abattoir un peu plus longtemps afin de permettre aux éleveurs de finaliser leurs plans.
Un repreneur de l’Est de la France en lice
L’ennui pour eux, c’est qu’un groupe de Meuthe-et-Moselle aurait d’autres projets pour l’abattoir du Vigan. Ce repreneur privé envisagerait de racheter les lieux et le matériel pour développer le marché de la viande hallal. « Les animaux viendraient de toute la France pour inonder un marché sur d’autres régions que la nôtre », indique Stéphane Thiry.
Face à ce concurrent, la Communauté de communes assure donner la priorité à ses éleveurs : « Nous préférons que ce soit eux qui reprennent le flambeau », déclare Roland Canayer. Quant au potentiel repreneur, « je ne sais pas d’où il vient et je ne connais pas sa proposition », déclare le président.
Le 28 décembre, la décision d’accorder un délai supplémentaire aux éleveurs devrait être prise en conseil de communauté. « Nous avons obtenu l’aval du comité de développement économique du Pays Viganais. Il n’y a pas de raison que les élus ne votent pas en notre faveur ». D’ici là, les démarches continuent pour eux. Sauveront-ils l’abattoir ? Réponse dans quelques semaines.
Élodie Boschet
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