FAIT DU JOUR Affaire Bouvet : comment le PS tente de récupérer son argent…
Quatre ans après sa condamnation, l'ex-comptable du PS qui a détourné 377 000 € n'a toujours pas remboursé la fédération. Un épineux dossier que souhaite « solder » le premier fédéral Jean Denat.
Voilà une rose qui ne manque pas de piquants... Élu en 2015 à la tête de la fédération, le patron des socialistes se sait attendu sur l’affaire Bouvet. L'ex-comptable du PS 30 a détourné plus de 370 000 € entre 2007 et 2012. Le délit est découvert en 2014 par le premier fédéral de l'époque, Stéphane Tortajada. Secoués, déboussolés, les militants sont rapidement gagnés par la suspicion qu'engendre un tel scandale. Pour rétablir la sérénité, la condamnation à elle seule ne suffit pas. Il faut réparer le préjudice financier en faisant exécuter le jugement : le remboursement de 188 000 € par les époux Bouvet.
Deux ans de flottement
Stéphane Tortajada s'y colle le premier. En juin 2014, il engage les premières démarches. Elles n'aboutiront pas. Plusieurs militants se soulèvent contre lui, remettant en cause sa gestion politique du parti. Dans la torpeur de l'été, le PS 30 est placé sous tutelle et Solférino mandate le cabinet d'avocats BDCC pour exécuter le jugement.
Deux ans plus tard, la fédération retrouve son autonomie. Victorieux du Congrès de Vergèze de 2015, Jean Denat hérite de la patate chaude. Et force est de constater que la tutelle n'a pas franchement fait avancer le dossier. La condamnée n'a pas remboursé un centime au PS ! Les rumeurs vont bon train : pourquoi une telle impunité ? Le PS aurait-il encore des choses à cacher ? Cherche-t-il à couvrir d'anciens responsables ?
Le trésor public s'invite à l'audience
Jean Denat enclenche la procédure judiciaire. Soucieux, dit-il, de jouer la carte de la transparence, il a présenté hier soir à ses camarades l'avancée de ses démarches. En novembre, le tribunal d'Alès a accepté la mise en place de la procédure de vente aux enchères des biens des époux Bouvet. Un appartement et un garage, saisis par la justice, et acquis par les époux Bouvet pour un montant d'environ 180 000 €.
Seulement, un protagoniste surprise s'est invité à l'audience : le FISC ! Car lui-aussi souhaite récupérer ses billes... Le couple doit au trésor public la coquette somme de 100 000 €. Faute de pièces justificatives, le juge n'accède pas à la demande de l'administration fiscale, qui décide alors de saisir la Cour d'Appel de Nîmes. Si la demande est jugée recevable le 4 avril, la fédération devra partager le fruit de la vente des biens avec le FISC.
Le comptable assigné en justice
Parallèlement, une seconde procédure vient d'être déclenchée. Elle vise le cabinet comptable 2AB qui était chargé, du temps de Nathalie Bouvet, de certifier les comptes de la fédération. La justice a condamné les époux Bouvet à rembourser seulement 188 000 €. Une somme inférieure au préjudice total de 377 000 €. Le juge justifiait un rejet de l'indemnisation, au titre des années 2011 et 2012, à cause du manque de diligence de l'expert-comptable et de la banque de Mme Bouvet, la BNP d'Alès.
Alors si la fédération veut récupérer les 189 000 € restants, elle doit « étendre les responsabilités » à ces deux protagonistes. En février 2016, l'avocat nîmois Hugo Ferri est mandaté par la fédération. « La procédure amiable avec 2AB n'a pas abouti », fait savoir Jean Denat. En septembre, il a officiellement assigné en justice le cabinet comptable. Quant à la BNP, une issue amiable vient d'être écartée par la société.
Pas sûr qu’une assignation au tribunal fasse les affaires de la fédération… L'expert comptable et la banque* (si elle est assignée) dénonceront à leur tour, le manque de contrôle du parti socialiste, pointé par le juge en 2014. Le montant d’une éventuelle indemnisation sera certainement revu à la baisse. L'épopée judiciaire est loin d'être terminée.
Second mandat pour Jean Denat ?
Hélas, le temps judiciaire est beaucoup plus long que le temps politique. D'ici la fin de l'année, un congrès sera organisé pour élire un nouveau premier fédéral. Jean Denat va-t-il courir un second mandat ? « Je ne sais pas... Avant de partir, j'aimerais solder une bonne fois pour toute l'affaire Bouvet », répond le Vauverdois. Pour ça, il faudra sans doute trois mandats...
Coralie Mollaret
coralie.mollaret@objectifgard.com
*À ce stade, la fédération n'a pas assigné la BNP en justice.