Le 7H50 de Franck Proust : « Les Européennes ne sont pas le match retour de la Présidentielle »
Coup d’envoi, ce lundi, avec Franck Proust. Le député européen sortant est le président de la délégation PPE (Parti populaire Européen) France. Élu à Nîmes, il est premier adjoint du maire. En cas de réélection le 26 mai, il devra abandonner son mandat municipal, loi sur le non-cumul oblige.
Objectif Gard : La campagne des Européennes démarre officiellement aujourd’hui. Pourquoi avoir accepté d’être à nouveau candidat ?
Franck Proust : C’est un mandat passionnant. Il reste encore beaucoup de choses à réaliser à l’Europe. Pour ma région, ma ville et mon département, le fait d’avoir un parlementaire européen, c’est une plus-value. On peut citer la base européenne de la Sécurité civile ou encore la subvention de 900 000€ pour financer la salle de spectacle Paloma. C’est important d’avoir des élus proches du terrain, des entreprises. C’est pourquoi j’étais contre l’instauration des listes nationales pour le scrutin du 26 mai. Les électeurs ont besoin d’avoir des élus du territoire et non hors-sol !
Député européen, député français : quelle différence ?
D’abord par rapport à la représentativité géographique. Un député français est élu dans une circonscription de 100 000 habitants. L’élu européen, lui, va représenter la France. Ensuite, quand vous êtes à l’Assemblée nationale, vous êtes soit dans la majorité, soit dans l’opposition. À l’Europe, il vous faut aller chercher des majorités, par affinités politiques et géographiques, pour faire voter un texte. L’intérêt général est supérieur au clivage politique. Ce n’est pas pour autant que l’on renie ses convictions.
À vous écouter, le Parlement européen semble passionnant. Ça doit être pour ça que le député gardois, Gilbert Collard, se présente aux Européennes ?
Je n’irai pas jusque-là… Gilbert Collard a peut-être peur de ne pas retrouver de siège à l’Assemblée nationale. En étant élu député européen le 26 mai, il aurait cinq ans de mandat en plus. Au passage, le Rassemblement national n’amène pas grand chose à l’Europe. Citez-moi un texte, un dossier sur lequel il s’est engagé ? Quand on demande d’augmenter les garde-frontières de Frontex (*), ses élus votent contre ! Pour eux, tenter d’améliorer la situation, c’est leur enlever leur fond de commerce.
« Pour ou contre l’Europe est un débat dépassé »
Alors qu'elle est si décriée, qu’est-ce que représente l’Europe pour vous ?
C’est avant tout une civilisation. D’où la nécessité de rappeler nos racines judéo-chrétiennes et gréco-romaines. Savoir d’où l’on vient pour savoir où l’on va ! Alors je ne suis pas sûr que l’on réussisse avec l’Europe, mais sans elle, je suis certain de notre échec. On est plus fort à 500 000 millions d’habitants que si l’on était seul… Pour ou contre l’Europe, c’est un débat dépassé. Les Français sont favorables à l’Europe mais contre ce qu’elle est devenue.
Quels sont les dysfonctionnements de l’Union d’après vous ?
Nous devons entrer dans les contraintes du XXIe siècle et devenir moins naïfs. Sur le plan économique, quand le président américain parle d’American first (L'Amérique en premier, la préférence économique américaine, NDLR), nous, nous lui commandons des avions ! J’estime qu’aujourd’hui, dans plusieurs secteurs, l'Union doit aussi faire jouer la préférence communautaire. Le marché américain est ouvert à 35%, quasiment 0% pour les Chinois et 85% pour l’Europe ! Nous devons avoir les mêmes règles du jeu.
Citez une ou deux solutions que vous aimeriez apporter...
Le maître-mot c’est la réciprocité. Il nous faut l’inscrire dans les textes et le faire respecter. Et puis, nous devons relancer des grands projets européens, source de croissance. Ça passe par une volonté politique et l’inscription d’une ligne budgétaire en face. Pour relever les grands défis, on parle d’augmenter de 1,1 % du PIB (Produit intérieur brut) de chaque pays pour contribuer à une hausse du budget européen, susceptible de répondre à ces grands défis.
Le principal adversaire de ce scrutin est l’abstention. Comment réussir à mobiliser les électeurs ?
Je vais continuer à faire ce que je fais depuis des semaines : un déplacement par jour dans chaque département comme nos 79 candidats le font. L’un des grands enjeux, c’est parler d’Europe. Toute l’année, on la caricature. L’Europe au quotidien, ce sont 4 milliards d’euros d’investissement dans notre région. L’Europe est donc tout sauf un match retour de la Présidentielle. À ce titre, c’est un déni de démocratique que la candidate de LREM (La République en marche) refuse le débat avec notre tête de liste, François-Xavier Bellamy.
« Bellamy me surprend »
Peu de monde connaissait M.Bellamy au départ. Or, aujourd'hui, certains républicains l’apprécieraient plus que votre président, Laurent Wauquiez...
J’étais l’un des premiers dubitatifs concernant M. Bellamy. Je connaissais juste ses écrits. Je pensais qu’il était encore un peu tendre… Mais il me surprend. C’est un homme d’écoute et d’une intelligence remarquable qui n’hésite pas à travailler en équipe. Vous le verrez le 22 mai lors du meeting à Nîmes !
Vous le préférez à M. Wauquiez ?
Je n’irai pas jusque là… Ils font la plupart des meetings à deux. Ils sont partout, c’est extra. M. Bellamy est très humble et sait élever le débat. Pour l’Europe ce qui est important c’est avant tout une vision, un cap et un programme pour relever les défis.
Propos recueillis par Coralie Mollaret
coralie.mollaret@objectifgard.com
* L’agence européenne pour la gestion de la coopération opérationnelle aux frontières extérieures des États membres de l'Union européenne. Frontex a pour mission de coordonner la coopération opérationnelle aux frontières extérieures de l'UE dans la lutte contre l'immigration clandestine.
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