FAIT DU SOIR Cauvin : un savoir-faire qui fait tache d’huile
La PME familiale créée au début des années 50 emploie aujourd’hui 49 salariés et prévoit d’agrandir son usine située sur la zone Mitra à Saint-Gilles.
Pour les plus anciens (voire très anciens) l’huilerie Cauvin, c’est un petit entrepôt à l’enseigne jaune et verte coincé entre la route de Sauve et le prolongement de l’avenue Franklin Roosevelt sur l’avenue Pompidou à Nîmes. Mais ça, c’était il y a bien longtemps. « Aujourd’hui, l’entreprise Cauvin est devenue un poids lourd sur le marché des huiles aussi bien en France qu’à l’étranger », déclare Christian Port, le président de la société. Avec ses 15 000 m² d’usine implantés depuis 2017 sur la zone industrielle Mitra à Saint-Gilles, elle s’impose, notamment, comme le deuxième plus gros embouteilleur d’huiles en France en marque propre, juste derrière la société Puget. « Actuellement, nous mettons sur le marché plus de 10 millions de bouteilles par an toutes huiles confondues, indique Stéphane Jullian, le directeur général du groupe. Pour la grande distribution, qui propose uniquement des huiles alimentaires, nous produisons 50 % d’huiles d’olives et 50 % d’huiles végétales telles que l’huile de noix, de noisette, de pépin de raisin ou encore de tournesol et de colza. »
Diversification des huiles
Cela fait maintenant une vingtaine d’années que l’huilerie Cauvin a fait le choix de se diversifier. « Une offre en huile d’olive uniquement n’était pas suffisante pour envisager un développement de l’entreprise à plus grande échelle. Par conséquent, nous avons décidé de proposer une gamme d’huiles plus large pour les grandes et moyennes surfaces », note Karine Voinchet, directrice marketing. Cependant, la production d’huiles d’olive reste un secteur majeur pour la société gardoise qui s’achalande essentiellement en Espagne ainsi qu’auprès d’un moulin local. L’huile d’olive bio, quant à elle, est importée de Tunisie et également d’Espagne. Comme pour le vin, les huiles d'olive sont assemblées et sélectionnées par un jury. Depuis plusieurs années c’est l’Espagne qui fait le marché avec une production annuelle d’environ 1,3 million de tonnes. « Seulement depuis deux ans, à cause notamment de la sècheresse, la production a diminué presque de moitié, ce qui a fait flamber le prix d’achat, explique Stéphane Jullian. C’est pour cette raison que nous avons créé un nouveau produit baptisé Oliveol qui est un mélange de 80 % d’huile de tournesol et 20 % d’huile d’olive. Jusqu’ici, c’était une manière de proposer à nos clients, dans cette période de forte inflation, un produit de qualité et accessible financièrement. » Une situation économique que ne devrait pas connaître cette année l’entreprise gardoise puisqu’il est d’ores et déjà annoncé une récolte record en Espagne – on parle de plus de 1,5 million de tonnes ! – qui devrait entraîner une baisse des prix de vente à partir du printemps.
Concernant les autres huiles, les lieux de production sont très divers comme le souligne le directeur : « Pour les huiles noix, nous nous fournissons majoritairement en Moldavie et en Californie. Pour les huiles de noisettes en Turquie et pour les huiles de sésame en Afrique et au Mexique. »
Présente sur l’ensemble du territoire à travers la grande distribution, l’entreprise familiale l’est également dans l’industrie alimentaire. « Notre service personnalisé permet de travailler aussi bien avec des leaders internationaux, notamment spécialisés dans la préparation de plats cuisinés, qu’avec des entreprises au fonctionnement plus artisanal. » Ce sont chaque année, quarante huiles différentes et quelque 70 références qui sortent de l’usine. Une dynamique entretenue notamment par les nouveautés présentes régulièrement en rayon à l’instar, ces derniers mois, de la gamme sauces et marinades.
Une filiale américaine
Il y a tout juste six ans, l’huilerie Cauvin a entrepris de développer son activité dans le secteur de la cosmétique. « Grâce à notre expertise en matière d’huile végétale, nous élaborons et conditionnons des huiles vierges bio de qualité selon un processus parfaitement maîtrisé. Et actuellement, nous fournissons les plus grandes marques de cosmétiques. »
L’exportation est également un axe de développement pour la direction qui, depuis cinq ans, mise sur ce secteur avec aujourd’hui une présence dans une quinzaine de pays dont la Chine qui est un marché porteur à travers notamment les huiles de noix, de lin « pour l’alimentation infantile », ou encore d’avocat. « En 2023, nous avons créé une filiale Cauvin US car nous considérons qu’il y a un marché potentiel aux USA avec des perspectives de développement », précise Christian Port.
Ces nombreux axes de croissance sont dus en grande partie à la création, il y a sept ans, d’une nouvelle usine. Cette structure, alliant modernité et efficacité, possède, entre autres, une capacité de stockage de près 1 000 tonnes d’huiles brutes protégées thermiquement, un atelier de trituration permettant la production quotidienne de 3 000 litres d’huiles biologiques, sans oublier quatre lignes automatisées et équipées d’un système de contrôle permettant de conditionner 15 000 litres d’huile à l’heure. À cela s’ajoute un laboratoire qualité équipé d’outils d’analyses physico-chimiques qui permettent de contrôler en interne le taux de peroxyde, l’acidité oléique mais aussi la composition en acides gras par chromatographie. « Chaque jour, un jury de dix personnes effectue des dégustations organoleptiques pour sélectionner en amont les lots ou alors contrôler la conformité des huiles réceptionnées », précise le directeur. Notons qu’en 2016, l’entreprise gardoise a été la première du secteur à obtenir la certification PME+ pour sa démarche de RSE (Responsabilité sociale et environnementale).
Le groupe familial qui compte 49 salariés présente cette année un chiffre d’affaires de près de 50 M€. Un résultat qui connaît depuis plusieurs années maintenant une courbe ascendante. « Il faut se souvenir qu’en 2006, le chiffre d’affaires était d’à peine 4 M€, rappelle Karine Voinchet. Nous visons, d’ici quatre à cinq ans, 80 M€ de chiffre d’affaires. » Fort de cette croissance et des nouvelles perspectives de marché, la direction a décidé, il y a quelques mois, d’agrandir l’usine en achetant un terrain mitoyen. Ainsi, cette nouvelle structure devrait permettre d’accueillir en 2026 sur près de 4 000 m² une unité de stockage et d’expédition ainsi qu’une unité de production répartie sur 1 000 m².
Pour la petite histoire...
Tout commence en 1951 quand Gilbert Cauvin reprend l’activité de son beau-père Sauveur Chauvet, tonnelier de métier, qui en 1930 s’était lancé dans la confiserie d’olives avant de s’engager dans la production d’une huile alimentaire aux qualités reconnues. Cinq ans plus tard, la région est victime d’un gel historique qui compromet la récolte d’olives et signe l’arrêt du moulin. Mais qu’à cela ne tienne. Afin d’assurer la production, Gilbert Cauvin décide de se fournir auprès d’autres mouliniers locaux. En 1970, l’huilerie se tourne vers l’élaboration et le négoce d’autres huiles qu’elle commercialise auprès d’une clientèle professionnelle. Au mitan des années 80, Gérard Cauvin, le fils de Gilbert, prend les rênes de l’entreprise familiale et en profite pour visiter le pourtour méditerranéen à la recherche de produits de qualité au goût atypique. En 2004, Serge Filhol prend la direction de la société et développe l’activité auprès de la grande distribution au niveau national. C’est également l’année de la mise sur le marché des produits bio. L’entreprise gardoise, qui en 2021 a fêté ses 70 ans, est présidée aujourd’hui par Christian Port, le gendre de Serge Filhol décédé en 2018, et a pour co-actionnaires principaux Pascale et Patrick Filhol.