FAIT DU JOUR Le coup de gueule de Sandra pour le respect des handicapés
Après un banal accident, cette mère de deux enfants est devenue handicapée. Aujourd’hui, Sandra veut envoyer un message fort aux citoyens et politiques pour le respect des droits des personnes atteintes d’un handicap.
Au premier abord, le regard de Sandra est sévère. Derrière ses yeux verts noisette se cache une histoire douloureuse, une souffrance. La main serrant fermement sa canne qui l’aide à marcher, Sandra est handicapée depuis 14 ans. Une perte de mobilité survenue après un « banal accident » : « En 2007 j’étais à la plage et j’ai fait une mauvaise chute. Je suis tombée sur les fesses, rien de bien grave a priori. Sauf que j’ai appris plus tard que j’avais une maladie due à la compression d’un nerf », confie-t-elle. Mariée et mère de deux enfants, la jeune femme n’a alors que 36 ans. Son quotidien devient de plus en plus difficile. Sa vie bascule.
Qu’elle soit assise ou debout, ses douleurs neuropathiques sont permanentes. Quand celles-ci se transforment en crise, il lui est carrément impossible de se déplacer : « Le matin, ça va. Mais si je bouge trop, je sais que je vais le payer ». Comme beaucoup de personnes atteintes d’un handicap, sa nouvelle vie parsemée d’obstacles ne fait que commencer. Placée sous morphine, cette professeur de sciences économiques qui vit à Caissargues ne peut plus exercer son métier. Membre de l’Éducation nationale, elle travaille à distance en corrigeant les copies pour le Cned (Centre national d'enseignement à distance).
En parallèle, Sandra se lance dans la réalisation d’un dossier à la MDPH (Maison départementale des personnes handicapées) : « Ça a été très compliqué ». Au départ, « on ne m’a pas reconnu mes droits parce qu’on me disait que ma maladie n’était pas stabilisée ». Son combat avec l’administration est éprouvant : « On remue des choses que l’on ne préférerait pas remuer ». Reconnue d’abord dans la tranche des 50%-79% de la MDPH, Sandra est prise en charge à 80% depuis deux ans. À ce titre, elle bénéficie d’une carte d’invalidité pour se garer sur les places handicapées à proximité des commerces.
Compenser la perte d'autonomie
Cette carte et ses places réservées lui permettent un peu plus d’autonomie, même si son quotidien reste synonyme d’anticipation et d’appréhension. « Quand vous voulez faire des courses, aller chez le médecin ou prendre rendez-vous chez le coiffeur, il faut que l’espace soit accessible sinon c'est l'enfer. On n'a jamais l’esprit tranquille », souligne la Gardoise. Comme la semaine dernière quand Sandra se rend à la Coupole à Nîmes. Une sortie ordinaire pour le commun des mortels. Seulement, elle s'aperçoit que les places handicapées sont occupées par des personnes valides : « Le reste du parking était vide. Je me suis dit : 'Tiens, c’est bizarre, tous les handicapés sont de sortie !' »
Elle inspecte de plus près les véhicules. « J’ai vu que la plupart des automobilistes n’avaient pas de carte d’invalidité. J’ai vu un homme se garer pour faire une livraison et un autre avec un macaron handicapé acheté sur Internet ! Pour se garer plus près de la galerie, ces personnes occupent des places réservées aux handicapés. C’est inadmissible ! » En rentrant chez elle le soir même, la combative Sandra s'installe devant son ordinateur : « J'ai réfléchi, j’étais fatiguée, mais j’ai quand même décidé d’envoyer un mail à la Ville qui ne prend plus les réclamations par téléphone. J'ai fait la même chose auprès de la société gérant le parking de la Coupole ».
Trop d'incivilités sur les places handicapées
La réponse d’Interparking est loin de la satisfaire : « La société m’a répondue qu’elle n’avait pas le pouvoir de verbaliser et que la Ville ne le faisait pas ! » L’adjoint à la sécurité à la ville de Nîmes, Richard Schieven, s'explique : « Le gestionnaire ne peut pas verbaliser. Il peut mettre un mot sur le pare-brise, mais il doit appeler la police nationale qui nous appelle ensuite… Autant dire que c’est très compliqué. » Quant aux places de stationnement en surface : « Depuis le début de l’année, 600 voitures qui occupaient illégalement des places PMR ont été envoyées à la fourrière assorties d'une amende de 135 euros. Après nous ne sommes pas partout, c’est pour ça qu’il faut nous prévenir si nécessaire », ajoute Richard Schieven.
Sandra n'hésite jamais. D'autant que les activités du quotidien, souvent anodines pour le simple quidam, se terminent hélas en mésaventures : « Un jour, j’ai appelé une grande surface pour dire que l’on identifiait mal les caisses réservées aux personnes handicapées. Du coup, c’est vraiment galère : il faut marcher et même parfois montrer sa carte handicapée à toutes les personnes qui font la queue. C’est humiliant. » Réponse de l'enseigne de grande distribution ? Elle s’est excusée en lui adressant... un bon de 10 euros ! « Je ne l’ai jamais utilisé ! Je n’attends pas d’argent mais une amélioration des choses », peste Sandra qui souhaite simplement que chacun, quelque soit ses difficultés, trouve sa place dans la société.
Coralie Mollaret
coralie.mollaret@objectifgard.com