LASALLE La châtaigne et les produits d'automne ont attiré la foule
À la vue de l'affluence qui régnait ce 1er novembre à Lasalle, le record de 5 000 visiteurs sur la journée a sans doute été pulvérisé. Le rendez-vous tient autant du plaisir gastronomique que de la sortie festive pour les enfants et des retrouvailles pour les vallées alentour, autour d'un fruit menacé, dans les Cévennes, par le réchauffement climatique et le manque d'entretien des vergers.
Marigoule, Dauphine, Bouche-Rouge ou encore Pelegrine. Alain travaille avec l'exploitante lasalloise Evelyne Barateau et propose quatre variétés. Pelegrine et Dauphine préfèrent être grillées, quand la Marigoule aime les soupes en compagnie de courge et d'oignons. Sur l'étal, ses fruits paraissent d'une taille régulière. "On n'a pas trop souffert de la sécheresse, confie Alain, grâce à un petit orage début août et un autre mi-août." Des pluies qui n'auront pas rempli les rivières mais donné à boire aux arbres. Au moins cela...
Du coup, variété locale, "la Pelegrine a bien donné cette année", constate Alain. Ce qui n'est pas le cas de toutes les variétés. "D'où le besoin d'avoir plusieurs variétés, confirme Alain, pour atténuer les années plus mauvaises pour une variété que pour l'autre". Sur les quatre hectares de châtaigniers, Evelyne Barateau prélève environ trois tonnes de fruits chaque année. Et tout ce qui n'est pas vendu en frais, au cours des foires d'automne, est ensuite transformé pour réaliser confitures et autres produits gourmands.
De quoi accompagner la multitude de produits gastronomiques qui avoisinent les quelques stands de châtaignes. Oignons doux, pélardons, pâtisseries marocaines, charcuteries et huiles d'olive côtoient des produits artisanaux comme les chaussettes et gants en laine d'agneau, ou des huiles essentielles des plantes cévenoles.
Sous les châtaigniers bien réels du parc des Glycines se sont installés des stands d'animation. Les enfants donnent ainsi du mollet pour permettre à un artisan de réaliser, sur un tour de bois, la toupie avec laquelle repartiront les sportifs. D'autres assistent à du travail de forge, alors qu'un dragon souffle sur le brasier.
Sur une scène, le club pédestre de Branoux n'effectue pas une démonstration de marche sportive. "Chez nous, les plus jeunes marchent, les plus vieux font de la vannerie", se marre Michel Méjean, membre du club. À trois sur scène, ils perpétuent la fabrication d'objets de vannerie en bois de châtaignier. "Dans chaque région, il se faisait des paniers, mais pas avec le même bois." Et si le châtaignier est intéressant, car imputrescible, il n'est pas le plus facile à travailler. "C'est un peu plus compliqué que l'osier", convient Michel Méjean, en montrant de fines lamelles.
D'un rejet de châtaignier, on fait des éclisses. Soit de petites lamelles de bois qui seront ensuite tissées. Et même plus : "Certaines éclisses sont spécifiques pour le côté du panier, car elles seront tournées". Une vrille "qui ne se fait pas partout, spécifique au sud Ardèche et à la Lozère". L'ennui, c'est que le savoir-faire se perd. "En dehors de nous, il y avait un papé de Trescol qui continuait à 90 ans. On doit être encore une dizaine à posséder le savoir-faire, mais ça n'intéresse pas les jeunes."
Les trois vanniers du jour - Michel Méjean, Dominique Chapon et Roland Sabatini - ne demandent pourtant qu'à transmettre. Mais faute d'apprentis, le savoir pourrait être perdu. Le panier se vend environ 50 €, "ce qui est bien peu par rapport au temps qu'on y passe". Alors que les savoir-faire artisanaux traditionnels vivent une seconde jeunesse, celui-ci est passé sous les radars, d'éventuels porteurs de projets. Les formateurs sont là, ne manquent que les élèves. Autour d'un arbre qui, même s'il recule, reste viscéralement attaché à la culture cévenole traditionnelle.
François Desmeures
francois.desmeures@objectifgard.com