Publié il y a 8 mois - Mise à jour le 09.03.2024 - Thierry Allard - 4 min  - vu 668 fois

FAIT DU SOIR Le Pin, village exemplaire sur la protection de la biodiversité en milieu rural

Le projet rural pour la biodiversité a notamment impliqué l'école du village

- Photo : Thierry Allard

Le Pin, un peu moins de 500 habitants entre Bagnols et Uzès, est « un territoire riche en biodiversité », rappelle son maire Patrick Palisse. Une biodiversité qui a toute sa place dans le « projet rural » lancé par la commune, comme le prouve le bilan de la mission de six mois qui s’achève dans la commune.

Au départ, un constat : « Il faut protéger la biodiversité », pose le maire, qui en a donc fait un élément central de sa politique. Alors, en plus des actions déjà menées, comme l'extinction de l'éclairage public la nuit ou le don de poules à la population, il a fait appel à l’association InSite, soutenue entre autres par l’État, la Région, EDF ou encore AG2R-La Mondiale, qui permet de recruter des volontaires en service civique pour une mission visant à développer les actions en faveur de la biodiversité.

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« Il y a d’un côté des communes qui font beaucoup avec peu, et de l’autre plein de jeunes qui cherchent un terrain d’engagement », résume Olivier Jourdan, administrateur d’InSite. Arrivées dans ce cadre en septembre dernier sur la commune, Marion Chetaille, 25 ans, et Margot Tournade, 24 ans, ont mené ou initié de nombreuses actions. Le bilan a été présenté à la population, en présence entre autres du sénateur Laurent Burgoa et du président de l’Agglomération Jean-Christian Rey, ce vendredi.

« Un village pionnier »

« On a fait plein de choses et on vous a laissé des devoirs », commence Marion Chetaille en s’adressant aux Pinins présents. Car un des axes centraux de leur action a été d’impliquer les habitants et l’école du village. Dans ce cadre, elles ont parlé provenance des aliments avec les élèves ou encore initié le lancement d’une Aire terrestre éducative, « qui permet aux élèves de devenir gestionnaires d’un espace naturel sur la commune », précise Margot Tournade. Le dispositif devrait être lancé à la rentrée prochaine, et verra les écoliers intervenir du choix du site naturel aux différentes actions à y mener en faveur de la biodiversité.

Les deux volontaires ont également organisé une fresque du climat, format qui permet de comprendre les interactions au sein de la biodiversité, avec les écoliers et la population. Avec la société communale de chasse, elles ont aussi participé à la création d’une garenne à lapins, qui arriveront fin mars, et animé un atelier de fabrication de nichoirs à mésanges et de gîtes à chauve-souris, « deux espèces auxiliaires pour les cultures », précisent-elles. Comprendre que les mésanges et les chauve-souris peuvent contribuer à remplacer les pesticides.

Vendredi, lors de la conclusion de la mission de Marion Chetaille et Margot Tournade (à G.), en présence du maire Patrick Palisse, du président de l'Agglomération Jean-Christian Rey et du sénateur Laurent Burgoa • Photo : Thierry Allard

Un gros dossier, qui va durer au moins trois ans, a aussi été initié au cours de ces six mois, la création d’un Atlas de la biodiversité communale. Accompagné par l’Office français de la biodiversité, les habitants seront invités à contribuer à son élaboration. Une équipe de référents a été mise en place au sein de la commune pour conduire le projet et faire du Pin « un village pionnier en la matière » sur le territoire, notent les deux volontaires. 

La lutte contre l’enfrichement des terres, et la fermeture des milieux qui en découle, a aussi été un axe important de travail au cours des six mois. Le travail a commencé par une identification des terres en friche, sur lesquelles des cultures fourragères et des fleurs seront semées prochainement, notamment pour maintenir certaines espèces et les pollinisateurs sur le territoire. Pollinisateurs toujours : un projet de rucher communal a été initié, et la parcelle identifiée cette semaine. « L’enjeu ne sera pas de produire du miel, mais d’animer des ateliers pédagogiques », précisent Marion Chetaille et Margot Tournade.

Les deux volontaires ont aussi travaillé sur la mise en place d’un système pastoral dans les vignes et vergers avec la Chambre d’agriculture. Plusieurs bergers ont été recensés, comme des parcelles de vigne où le vitipastoralisme, qui permet aux brebis de pâturer tout en enrichissant les sols, peuvent être mis en place. Ce sera pour l’automne prochain. Plus globalement, l’action menée sur six mois avait aussi pour but d’initier la reconstruction d’un écosystème dans les vignes et vergers. Pour ce faire, les deux volontaires sont allées à la rencontre de viticulteurs du territoire et organisé une table-ronde avec eux ainsi qu’une visite du Monastère de Solan, à La Bastide-d’Engras, où des soeurs orthodoxes pratiquent l’agroécologie. Marion et Margot ont aussi élaboré un document de synthèse à destination des viticulteurs pour les accompagner dans la reconstitution de haies, véritables immeubles à biodiversité.

« Un travail de long-terme à faire »

Toujours dans le cadre de leur action, et pour lutter contre les conséquences de la sécheresse pour la faune, des abreuvoirs ont été créés et disséminés, ils restent à finaliser. Si beaucoup d’actions ont été conduite ou initiées, d’autres dossiers n’ont pas pu énormément avancer en six mois. C’est le cas sur l’aménagement des cours d’eau en faveur de la biodiversité : la création de gours dans la Tave pour protéger les espèces lorsque le débit est trop bas n’a pas pu se faire, le lit de la Tave étant trop rocheux au Pin.

La réintroduction d’écrevisses à pattes blanches, espèce locale disparue, a aussi été abandonnée. « Nous avons contacté un expert et l’Office français de la biodiversité, qui nous ont dit que ce n’était pas une bonne idée car c’est une espèce protégée et très sensible, et que les conditions n’étaient pas réunies pour une réintroduction », expliquent-elles. Pour avoir une chance de revoir des écrevisses à pattes blanches dans la Tave, « il y a un travail de long-terme à faire », avance Marion Chetaille.

Sans elles, leur mission s’achevant cette semaine. « Nous sommes allés au-delà de ce qui était demandé », souligne le maire Patrick Palisse. « Votre mission, vous l’avez parfaitement réussie, on sent que vous êtes ici chez vous », lancera le président de l’Agglomération du Gard rhodanien, Jean-Christian Rey, aux deux volontaires. Il est vrai que les deux jeunes femmes ont rapidement été adoptées par le village, logeant chez l’habitant et s’impliquant dans la vie locale, même sur des sujets qui ne concernaient pas directement la biodiversité. La remise d’un chèque de 500 euros à chacune par le maire en fin de présentation en témoignera. « Quelque chose s’est passé, de la richesse humaine s’est créée », reprendra Jean-Christian Rey, soulignant « un travail précieux » dont il espère qu’il pourra « essaimer ».

Le sénateur Laurent Burgoa, membre depuis peu du conseil d’administration de l’Office français de la biodiversité, saluera le fait que les deux volontaires aient « lancé une dynamique » et estimera, en s’adressant à elles, que « Le Pin mériterait que vous continuiez. » D’une manière ou d’une autre, le travail initié se poursuivra, le maire rappelant qu’une cinquantaine d’habitants se sont impliqués dans les actions menées depuis six mois.

Thierry Allard

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