FAIT DU JOUR Aéronautique, nucléaire, santé… Ces formations qui assurent de trouver un boulot
« J’ai refusé plusieurs offres d’emploi ce mois-ci ». Jules n’est pas disponible. Il est encore étudiant. Il terminera en septembre un cursus d’ingénieur en chaudronnerie. Cette formation de Polytech Montpellier se déroule dans les locaux de l’IUT de Nîmes. Elle est unique en France. Dans le Gard rhodanien, dix lycéens ont reçu une bourse de 5 400 € financée par les entreprises du nucléaire. Le but : les convaincre de poursuivre dans ce secteur. Dans le domaine de la santé, cela recrute aussi. « On a déjà 50 signatures de pharmaciens intéressés pour avoir des apprentis et on a… 16 places », précise l’institut d’Alzon qui vient de lancer une formation de préparateur en pharmacie. Oui, le Gard est bien le quatrième département métropolitain ayant le taux de chômage le plus fort. Mais non il ne faut pas désespérer, on y trouve des formations de niche où les diplômés sont certains de dégotter du travail.
SOUDAGE ET CHAUDRONNERIE
Du bureau de Christian Dior aux centrales nucléaires… des débouchés sans limites
L’école d’ingénieur Polytech propose une formation d’ingénieur Mécanique structures industrielles. Le salaire des débutants est de 3 000 €.
« Radiographie ». La pancarte orne une porte grise. On n’est pas dans un centre médical mais dans un atelier de l’IUT de Nîmes. Ici, on ne diagnostique pas les jambes ou les bras cassés. On passe les soudures aux rayons X. « C’est dix fois plus puissant qu’une radio classique », sourit Denis Cervellin avant de désigner une autre porte : « On utilise aussi des ultrasons comme pour les échographies. » Cet ancien ingénieur d’affaires est arrivé sur ce site de Saint-Césaire en 1988 avec une mission : reconstruire les ateliers noyés par les inondations. Il y est resté. Depuis 2003, il est responsable de la formation d’ingénieurs MSI, un cursus basé sur la chaudronnerie, unique en France. Cette formation est portée par l’école d’ingénieurs Polytech Montpellier mais les cours se déroulent à l’IUT de Nîmes*.
Denis Cervellin pousse la porte de l’atelier. Une odeur d’huile de coupe et de métal flotte. Des rideaux rouges en plastique masquent des cabines de soudage. Ici, on soude de toutes les manières possibles : avec un chalumeau, un arc électrique, avec des machines de soudage semi-automatiques ou même avec un « canon à électrons ». Avec un regard de gamin passionné, Denis Cervellin montre du doigt les robots soudeurs permettant de faire de l’impression 3D en métal. Il s’arrête devant des cisailles qui découpent le métal avec de l’eau à très haute pression.
Jules et ses amis passent la porte de l’atelier. À leurs trois ans de formation MSI, ils ont ajouté une année de mastère pour décrocher la certification internationale IWE. Ils termineront en septembre mais on tente déjà de les débaucher. « J’ai refusé plusieurs offres en janvier sur Linkedin ce mois-ci », témoigne Jules, actuellement en alternance à Marseille chez Onet technologie, spécialisée dans le nucléaire.
Un salaire de 3 000 € net pour débuter
Dans le bureau de Denis Cervellin, des épingles sont punaisées sur une carte de France. Elles marquent les lieux où ses étudiants sont en alternance : Fos-sur-mer, la vallée du Rhône, Dunkerque… « Je ne m’inquiète pas. Aujourd’hui, ils gagnent environ 3 000 € net par mois en démarrant, sourit celui qui fait partie des fondateurs de cette formation lancée en 1999. C’est France chaudronnerie qui avait sollicité Polytech Montpellier car toutes les formations s’arrêtaient à bac+2. C’était la première formation d’ingénieurs en apprentissage en France ». On y rentre après un BTS, un DUT ou une classe prépa. Jérôme Pilet, originaire de Saint-Rémy-de-Provence a intégré l’école après un BTS chaudronnerie et une licence à l’IUT de Nîmes. Après avoir travaillé pour Eiffage métal puis pour une entreprise de Saint-Rémy, il a créé Pilet Metal & Petrovic en septembre 2021. Son chiffre d’affaires atteint 1 M€. Ils sont sept à travailler dans cette société en comptant son associé. En cas de besoin de recrutement, il a un plan : « J’irais voir Polytech pour recruter un alternant, le former pendant trois ans et le garder derrière. » Son entreprise a créé un plancher de verre dans le bureau historique du couturier Christian Dior avenue Montaigne à Paris. Elle a même fabriqué la structure métallique qui tient la bibliothèque de la tour Luma à Arles. Jérôme connaît bien ce phare de 56 m de haut. Lorsqu’il était à Polytech, il a fait son alternance chez Eiffage métal, sur le chantier de cette tour construite autour d’une armature métallique.
Gérer des appareils sous pression
Marie Arnaud, elle aussi ancienne de Polytech, contrôle tous les appareils sous pression que les fabricants de la région Auvergne-Rhône-Alpes veulent mettre en vente sur le marché européen. Diplômée en 2018, elle a trouvé du boulot en 15 jours. Elle avait reçu deux propositions. Elle a choisi Bureau veritas, une entreprise de certification. Sébastien Bironneau gère lui aussi « la pression ». Il est responsable commercial chez Allia à Angers, « entreprise très technique qui travaille sur « des appareils critiques » soumis à forte pression ». Il a été diplômé en 2013. Il est devenu ingénieur après... 11 ans d’apprentissage. « J’ai l’habitude de dire que j’ai commencé par balayer un atelier jusqu’à occuper des fonctions de direction », sourit-il. Natif de la Rochelle, il commence par un CAP de mécanique en motoculture et bifurque en chaudronnerie. BEP, Bac pro, BTS puis licence… Il enchaîne apprentissages et diplômes. Il postule une première fois à Polytech Montpellier. Sans succès. Pas découragé, il part en Australie perfectionner son niveau d’anglais. De l’hémisphère Sud, il postule à nouveau. Sa candidature est retenue. Il revient passer les tests d’entrée en France.
Frédéric Galant a grandi à La Calmette. Ce diplômé de Polytech bosse aujourd’hui en Bourgogne, chez Framatome qui conçoit et fabrique les centrales nucléaires françaises. « Une fois par semaine on reçoit une proposition pour se faire débaucher, c’est plutôt plaisant, s’amuse-t-il. Mais la pénurie touche tous les niveaux : soudeur, technicien soudeur, ingénieur ». La preuve : l’hiver dernier, pour éviter le black-out d’électricité en France, son entreprise a dû faire appel à ses soudeurs américains.
*Polytech et l’IUT de Nîmes dépendent tous deux de l’université de Montpellier.
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