NÎMES Les Jardins de la Fontaines, premier parc public d’Europe 1/2
Poumon vert de la cité, les Jardins sont aussi le fondement de son histoire et un atout touristique d’importance.
Pêle-mêle et dans un total mais volontaire désordre chronologique, voici quelques âmes qui ont connu les vertus des Jardins de la Fontaine. Alexandre Dumas, George Sand, Léo Ferré, Thomas Jefferson, peut-être la famille de l’empereur romain Antonin le Pieux mais aussi de célèbres toreros ou encore Jean-Jacques Rousseau ou Colette.
« Mais, surtout : les Nîmois et leurs hôtes. Ici, on vient dans sa poussette de bébé, on y apprend à marcher et à monter à vélo, on y flirte, on y est photographié le jour des noces, on y dore une retraite bienfaisante au soleil. Le jardin est un étonnant kaléidoscope de la vie » expliquaient Jean-Paul Fournier, maire de Nîmes et Daniel Jean Valade, son ancien adjoint à la culture.
En effet, de la source des origines à notre dépaysant XXIe siècle, il s’est passé 2 500 ans avec autant d’histoires à raconter que de gouttes d’eau sont tombées. Depuis les Jardins, là où tout a commencé, on comprend mieux la cité des Antonin.
N’oublions pas, c’est une fierté, que ce parc fut le premier jardin public d’Europe !
En plus d’y trouver des essences méditerranéennes, vous y verrez la Tour Magne, autre vestige plus ancien que ceux laissés par les Romains (qui ont tout de même agrandi l’édifice pour en faire ce que nous voyons aujourd’hui).
« Ces jardins incarnent l’harmonie entre la Nature respectée, magnifiée et la présence des Dieux et des Hommes, sur le regard de l’Histoire. Les Jardins de la Fontaine offrent une oasis de verdure, de fraîcheur, d’ombre et de paix aux passions du Sud. Bienvenue au cœur de ce « Jardin remarquable », ainsi labellisé par le Ministre de la Culture. »
Si vous êtes allé voir le spectacle La légende des Jardins, cela vous rappellera quelque chose. Après avoir franchi le canal et la grille de l’entrée principale, avancez juste de quelques mètres, jusqu’aux statues de Pan et d’Endymion d’où l’on considèrera l’ensemble des jardins de la Fontaine.
Au premier plan le jardin classique avec ses allées symétriques, ses balustrades, vases et statues. Il a été créé au XVIIIe siècle par Jacques Philippe Mareschal, ingénieur du roi. Au second plan, grimpant à l’assaut de la colline, un couvert végétal de chênes verts et pins d’Alep, dissimule un jardin paysager aménagé au XIXe siècle. Au sommet la tour Magne émerge des cimes des arbres.
Pour aller vers le Nymphée laissez-vous guider par le canal bordé de majestueux marronniers d’Inde (Aesculus Hyppocastanum).
Les marronniers, arbres d’ornement, originaires des Balkans, soulignent la symétrie des allées, mais surtout les couvrent d’une ombre bienfaisante propice à la promenade au cœur de l’été. Mareschal a créé ici un des premiers jardins publics d’Europe. En hiver, les silhouettes dénudées des arbres accentuent l’aspect minéral de cette partie du jardin, qui contraste avec le couvert végétal de la colline, toujours vert.
Les vases et statues de la partie basse proviennent du dépeçage des jardins du château de la Mosson, près de Montpellier, après la mort de son propriétaire en 1744. Ne subsistent aujourd’hui de ce magnifique jardin, alors considéré comme le Versailles du Languedoc, que quelques ruines et un magnifique buffet d’eau.
Approchez du Nymphée et penchez-vous légèrement au-dessus de la balustrade pour y découvrir un dédale de canaux. La présence de l’eau est un des paradoxes de ce jardin et de la ville toute entière. Bien qu’omniprésente, l’eau est ici toujours souterraine, cachée, on la devine et il faut s’en approcher pour la voir.
Les colonnes du Nymphée rappellent que l’on se trouve sur l’emplace- ment d’un sanctuaire antique dédié au culte impérial. Cet Augusteum, créé vers 25 avant notre ère, s’organisait déjà autour d’un grand massif maçonné portant un autel dédié à Auguste. Dans l'Antiquité l’eau ne circulait que dans des petits canaux que l’on peut apercevoir au fond.
Si le Nymphée créé par Mareschal reprend la structure antique, il place au centre une sculpture allégorique représentant Nîmes entourée de vases et d’angelots (putti) assis sur des ballots de tissu. L’industrie textiles était alors la principale source de la prospérité nîmoise.
La nymphe est l’œuvre du sculpteur Dominique Raché, vases et putti sont de Hubert Larchevêque. Du Nymphée allez au temple de Diane. Considérée aujourd’hui comme une ruine romantique, on ne connaît pas sa véritable fonction dans le sanctuaire antique : bibliothèque ? Salle cultuelle ? Peut-être les deux. Il faut admirer la grande voûte lancée au-dessus de vos têtes, le rythme des niches le long des murs ou encore la finesse de certains caissons sculptés, en fond de salle. Vous pourrez vous étonner devant le foisonnement de graffitis gravés ou tracés à l’oxyde de fer, témoignages du passage des compagnons du devoir au cours de leur tour de France.
En quittant le temple de Diane, regardez le parterre en broderie de buis à droite. Que serait en tel parc sans ses arbres ? Non loin de là, un tilleul entièrement creux fait le bonheur des bambins qui s’y cachent. La statue d’à côté représente l’automne. Partez, d’ailleurs, à la recherche des trois autres !
Puis allez à la source car c’est ici que bat le cœur du jardin et que les origines de Nîmes sont issues. Cette source est une résurgence des eaux de pluies qui s’infiltrent dans les sols karstiques des garrigues, au nord de la ville. C’est autour d’elle que s’installent les premiers habitants de Nîmes, les Volques Arécomiques.
Ils en font un lieu sacré dédié au dieu Nemausus. Plus tard les Romains l’intègrent dans l’Augusteum. Ils construisent le bassin avec ses deux escaliers semi circulaires en pierre, afin de lui donner un caractère plus monumental. A proximité se dressait certainement un petit temple. Dès la fin de l’empire romain le site est abandonné, tombe en ruines, et fini par être enseveli sous les alluvions. Malgré ce, au XVIIIème siècle, l’eau de la source joue toujours un rôle primordial. Elle alimente les ateliers des teintureries, une des principales activités économiques de la ville, organisée autour de l’industrie du tissu. Nîmes est en pleine expansion et des travaux pour augmenter le débit et assainir l’eau de la Fontaine sont devenus nécessaires.
A cette occasion les ruines romaines sont remises à jour. Cette découverte connaît un retentissement européen, notamment parmi les érudits du siècle des Lumières. Jacques Philippe Mareschal, ingénieur des fortifications du Languedoc, est chargé par le roi de réaliser un programme d’aménagement ambitieux. Au-delà de l’amélioration de l’approvisionnement en eau, il s’agit de mettre en valeur les vestiges et de créer une « promenade-jardin » en rapport avec la nouvelle importance de la ville