GARD Le passé révélé par les sciences de l’archéologie
L’Institut national de recherches archéologiques préventives (Inrap) vit avec son temps et ses archéologues sont des scientifiques accomplis.
L'Inrap assure la détection et l'étude du patrimoine archéologique en amont des travaux d'aménagement du territoire. Il réalise chaque année plus de 2 000 opérations archéologiques (diagnostics et fouilles) pour le compte des aménageurs privés et publics. Ses missions s'étendent à l'étude scientifique des données relevées sur le terrain et à la diffusion de la connaissance archéologique.
Avec le développement de l'archéologie préventive, les archéologues ont entrepris de reconstituer à grande échelle l'environnement des sites étudiés et son évolution dans le temps.
Sur le terrain comme en laboratoire, ce travail d'équipe met à contribution des disciplines scientifiques de plus en plus spécialisées : anthracologie, anthropologie, archéozoologie, carpologie, céramologie, géomorphologie, palynologie, topographie, tracéologie, xylologie... Chacune de ces sciences apporte des données et des hypothèses qui contribuent à reconstituer la vie quotidienne des sociétés qui se sont succédé sur un site, leurs techniques, le paysage et le climat qui formaient leur environnement.
L'archéologie étudie ainsi l'histoire et les modes de vie des sociétés du passé à travers leurs vestiges conservés dans le sol. Au-delà des trésors et des monuments remarquables, elle permet de comprendre la vie quotidienne, l'occupation des espaces et des territoires, l'évolution de l'environnement. Partout où les humains ont été présents, ils ont laissé des témoignages : os, objets, outils, graines, murs, chemins, fossés... Leur observation permet de retracer l'histoire du lieu : quelles populations, à quelles périodes, comment vivaient-elles au quotidien, à quoi ressemblait le paysage ?
Le travail des archéologues débute sur le terrain, puis se prolonge au laboratoire jusqu'au partage avec le public. Ils identifient les différentes couches qui composent le sol : la stratigraphie. Les vestiges présents dans chaque couche sont dégagés et prélevés.
Les informations collectées (plans, notes, dessins, photographies) sont enregistrées. Les objets découverts sont étudiés et datés par des spécialistes. Leurs conclusions aident l'archéologue responsable de la fouille à retracer l'histoire du site.
Les sciences de l'archéologie
Au carrefour des sciences dures et des sciences humaines, l'archéologie s'appuie sur les compétences de nombreux spécialistes pour approfondir la connaissance et la compréhension des sociétés humaines à partir des vestiges mis au jour. L'ensemble des sites étudiés permet de renseigner les particularités, les modes de fonctionnement et les évolutions des sociétés anciennes.
L’anthracologie, pour le bois carbonisé, la palynologie, pour décoder les pollens, la célèbre anthropologie pour remettre les squelettes en questions, la céramologie pour étudier les terres cuite, l'archéozoologie pour décrypter les os d'animaux, la carpologie qui analyse l’évolution de la graine via l'humain, la topographie qui recense les vestiges en plan, la géomorphologie qui offre une lecture des paysages, la xylologie qui met le bois dans tous ses états ou encore la tracéologie qui permet de suivre les outils grâce à leurs traces.
Vous l’avez déjà compris, l’archéologie n’est pas une science mais un agrégat de sciences. Un archéologue est bien souvent spécialisé donc, pour avoir un maximum d’informations sur un chantier de fouilles il faut que plusieurs archéologues puissent y participer pour y développer et y affiner leur analyse.
Parmi les sciences énoncées plus haut, voici quelques détails.
La xylologie
Le bois pourrit et disparaît au cours du temps. Néanmoins, il peut se conserver à l'abri de l'air et de la lumière, dans des sites couverts par les eaux, ou sous forme de charbon dans les foyers ou les vestiges d'incendie, ou minéralisé au contact d'un métal (clou, pommeau d'épée...).
La xylologie étudie les propriétés physiques et chimiques du bois. Pour chaque vestige de bois, les xylologues identifient les essences et peuvent reconstituer l'environnement ligneux (forêt, bois...) du site archéologique et son évolution liée aux modifications climatiques ou aux interventions humaines. La xylologie permet également de connaître les arbres dont disposaient les artisans et les choix qu'ils effectuaient pour réaliser leurs ouvrages. Elle cherche à connaître les procédés de mise en œuvre en observant les traces d'outils et les modes de débitage connus.
La palynologie
Les plantes ont une durée de vie limitée, mais leurs pollens, invisibles à l'œil nu, peuvent se fossiliser et se conserver, particulièrement dans les milieux acides et humides. La palynologie étudie ces grains de pollens fossiles. Chaque pollen est caractéristique d'une espèce végétale.
Une fois les sédiments prélevés, une série de traitements mécaniques et chimiques est nécessaire pour isoler les pollens. Les palynologues observent alors au microscope la taille, la forme et la paroi des pollens pour les identifier et déterminer la variété et la proportion des différentes espèces végétales présentes sur le site étudié.
Les palynologues regroupent les informations obtenues au sein d'un diagramme pollinique. Ce dernier offre un cliché de l'environnement végétal du site (forêts, prairies, espaces cultivés...) et une image de l'évolution des paysages, du climat et des activités humaines.
La carpologie
Graines, fruits, noyaux, feuilles, bourgeons, mousses sont trouvés lors des fouilles. Ils sont conservés grâce à la carbonisation, ou en contexte humide à l'abri de l'air, ou encore dans des milieux riches en phosphates et matière calcaire (latrines, dépotoirs, fumiers). Ces restes végétaux renseignent les carpologues sur la flore locale, le paléoenvironnement des sites archéologiques, les pratiques agricoles, l'alimentation et les préparations culinaires des sociétés passées. Ils témoignent aussi de la présence d'espèces indigènes ou du déplacement de certaines d'entre elles (commerce à grande distance, transfert de connaissances agricoles par migration de populations).
En outre, la carpologie, en étudiant les offrandes alimentaires et les dépôts d'origine végétale découverts en contextes funéraires favorise la compréhension des rites et des pratiques entourant la mort.
L’anthracologie
Le bois pourrit et disparaît au fil du temps. Mais, lorsqu'il a brûlé, les archéologues le trouvent en quantité sur les sites, car, lors de la combustion, les éléments organiques sont remplacés par du carbone. Les charbons de bois proviennent de foyers domestiques destinés à la cuisson des aliments, au chauffage ou à l'éclairage, de fours conçus pour la cuisson de céramiques ou la transformation des métaux, ou encore de restes d'édifices incendiés.
Les anthracologues analysent les charbons de bois et déterminent les essences d'arbres dont ils proviennent, obtenant ainsi des informations sur les végétaux présents à une époque donnée et leur évolution au fil des siècles.
Outre la connaissance des forêts et des paysages du passé, l'anthracologie permet d'appréhender les relations que l'humain entretenait avec le bois : gestion forestière, place du bois dans l'économie ou dans des aspects plus sociaux et culturels de la vie tels les contextes funéraires.