Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 09.05.2017 - philippe-gavillet-de-peney - 4 min  - vu 680 fois

NÎMES Proxénétisme aggravé : "je faisais du social !..."

Le Palais de Justice de Nîmes. Photo Tony Duret / Objectif Gard

Les prévenus ont été jugés au Palais de justice de Nîmes (Photo : DR)

Mardi 9 mai, au tribunal de Nîmes, parmi les affaires qui figuraient au rôle des comparutions immédiates, on trouvait cette affaire de proxénétisme aggravé, assortie pour certains des cinq protagonistes, de " participation à association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un délit puni de 10 ans d'emprisonnement ", en regard de leur statut de récidiviste.

Sur fond de drogue et d'alcool, l'affaire débute dans la petite commune de Saint-Martin-du-Crau. C'est là que vit Hamed (prénom d'emprunt). Lui est un multirécidiviste dont le palmarès judiciaire est long comme un jour sans pain. Et sans pain il l'est presque. Notre gaillard confesse volontiers vivre "comme tout le monde !" depuis des années des allocations du RSA faute de n'avoir quasiment jamais travaillé de sa vie. Père de trois enfants issus de deux lits différents, Hamed entretient une relation avec Karine (prénom d'emprunt). Loin d'être une oie blanche, cette dernière est quant à elle mère de quatre enfants de quatre pères différents et vit des 1 700 euros que lui offre généreusement chaque mois la CAF...pour des enfants pourtant placés et pour lesquels elle ne reverse que 300 euros aux services sociaux d'aide à l'enfance !

Explication de l'intéressée : "C'est pour quand je les reçois le week-end !" Comprenne qui pourra car le week-end et pas seulement, la dame passe le plus clair de son temps en compagnie de jeunes femmes qui ne font pas mystère de vivre de la prostitution. Dans cette Cour des Miracles version 2.0, on fume du shit, on consomme de la cocaïne et on picole joyeusement. Karine présente ses copines à Hamed qui, protecteur de ces dames et Chevalier Blanc, se propose de les protéger en échange de la moitié du produit des passes. Jusqu'alors inconnu au rayon proxénétisme, le gaillard affiche plusieurs condamnations pour trafic de stupéfiants, menaces de mort sous conditions sur son amie de l'époque, extorsion par violences, violences avec préméditation, violences sur concubin -une autre ''amie''-, etc. C'est vous dire si la protection des femmes, il connaît ! Hamed possède aussi une arme de poing, chinée, dit-il, "dans les quartiers Nord de Marseille". Avec ça, il a de la contenance et il se fait fort de protéger ses ouailles.

"Vous faisiez agent de sécurité de prostituées ?", interroge le procureur Bertrand. "C'est tout à fait ça ! Quand je vois ce qui me restait dans les poches après avoir payé ma drogue et les courses, on peut dire que je faisais du social", répond avec une naïveté confondante Hamed, qui n'a pas perçu l'ironie des propos du représentant du Ministère public. Très serviable, quand il le faut, Hamed n'hésite pas à sortir son gros...calibre et à enfiler une cagoule pour terroriser et faire payer les mauvais clients de ces dames.

On délocalise la petite entreprise qui ne connaît pas la crise

Un jour, Karine, qui fait la maligne dans son entourage et se présente auprès de copines comme une ''mère maquerelle'', met en relation Hamed avec le couple que forment Daniel et Monica (prénoms d'emprunt). Ces derniers habitent une grande maison à Aimargues. Après que la ''Madame Claude du pauvre'' les a convaincu de louer leur maison le temps de vacances en Espagne, la petite entreprise familiale s'installe donc là-bas. À son retour du pays de Cervantès le duo négocie une part sur les passes (10%, NDR) et un fixe de 50 euros pour les frais généraux d'électricité et d'eau. Parfaitement au fait de ce qui se passe sous leur toit, la mère de 5 enfants, cocaïnomane et ''accro'' aux antidépresseurs, et son concubin, un ouvrier paysagiste, alcoolique, drogué et violent (plusieurs condamnations pour violences sur conjoint et sur sa...mère, entre autres), font même du rabattage en amenant à Hamed une nouvelle volontaire, rencontrée sur un banc. Un Hamed qui n'en demandait pas tant, selon lui : "Chacune à fait ce qu'elle a voulu. Je ne les ai jamais obligé à se prostituer. Elles étaient libres de faire ce qu'elles voulaient."

Quoi qu'il en soit, tout ça est bien organisé. Sbire de Hamed et exécuteur des basses œuvres, Jean-Louis (prénom d'emprunt), un ancien chef d'atelier d'une entreprise de charpente métallique, victime d'un accident de la route qu'il a...lui-même provoqué, s'occupe de la logistique : téléphone portable, ordinateur, carte de téléphone... Ce drogué notoire, déjà condamné à plusieurs reprises pour des faits de conduite en état alcoolique et sous l'emprise des stupéfiants, sert aussi de chauffeur en échange d'un petit billet de temps en temps et de pouvoir participer aux libations du soir. Occasionnellement il prête aussi son appartement pour les passes. "Au début, je les accueillais parce qu'elles ne savaient pas où aller!", prétexte-t-il. Allons bon ! Encore un bon Samaritain qui nous rappelle que l'enfer est pavé de bonnes intentions et que le Diable se niche dans les détails...

Un grain de sable se glissera dans cette mécanique bien huilée quand Karine ira porter plainte contre Hamed qu'elle accuse de la séquestrer et de l'avoir violentée. Les Gendarmes interviennent et perquisitionnent. Ils trouveront l'ordinateur qui servait à envoyer les annonces sur les sites pornographiques, un pistolet 22 long rifle et des munitions... La suite on la connaît même si la présidente Christine Ruellan a eu bien du mal -et on comprend pourquoi !- à trier le bon grain (s'il y en a) de l'ivraie et à rendre à chacun le rôle qu'il a tenu dans cette sordide affaire.

Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné Hamed à 2 ans de prison ferme et a prononcé à son encontre un mandat de dépôt à l'audience. Jean-Louis, écope de 12 mois dont 2 mois ''ferme'' couvert par sa détention préventive et le tribunal a ordonné sa levée d'écrou. La ''mère maquerelle'' revendiquée s'en tire avec 8 mois avec sursis et 800 euros d'amende, la locataire de la maison d'Aimargues avec 8 mois avec sursis et son concubin avec 11 mois avec sursis et 800 euros d'amende.

Philippe GAVILLET de PENEY

philippe@objectifgard.com 

Philippe Gavillet de Peney

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio