Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 26.05.2020 - thierry-allard - 3 min  - vu 769 fois

LE 7H50 de Simon Cossus (Enercoop) : « On se dirige vers des communautés citoyennes de l’énergie »

(Photo d'archives : Thierry Allard / Objectif Gard)

Alors que la crise sanitaire du covid-19 en incite beaucoup à réfléchir au « monde d’après », le fournisseur d’énergie coopératif Enercoop se positionne pour son secteur. Son directeur régional pour le Languedoc-Roussillon, Simon Cossus, plaide en faveur - dans l’énergie aussi - de circuits courts et d’une réappropriation citoyenne de la production d’électricité.

Objectif Gard : Que représente Enercoop dans notre région et dans le Gard ?

Simon Cossus : Sur le périmètre de l’ex-Languedoc-Roussillon, nous avons passé les 5 000 compteurs, et sur le Gard nous en avons 1 217. Ces chiffres bougent tous les jours, plutôt à la hausse.

Vous défendez un modèle coopératif, avec des petits producteurs d’électricité et même des circuits courts dans l’énergie. Un système qu’on a vu se développer dans l’alimentaire, encore plus dernièrement avec le confinement. Est-ce que ce modèle représente l’avenir de l’énergie ?

Oui très clairement. Parler de circuits courts dans l’électricité est certes un peu paradoxal car tout est mélangé physiquement dans le réseau. Ce que nous promouvons c’est un circuit court économique. Nous avons toujours fonctionné en direct avec nos producteurs. Nous en avons 230 en France. Par ailleurs, depuis cinq ans nous faisons rentrer des projets citoyens d’énergies renouvelables.

Simon Cossus, directeur général d'Enercoop Languedoc-Roussillon (DR)

C’est un modèle qui semble se développer, en tout cas...

Oui, on se dirige progressivement vers des communautés citoyennes de l’énergie, avec une idée selon laquelle on pourrait consommer localement cette énergie. Mais ce sont des processus très longs. C’est un nouveau concept qui va mettre dix ans à s’installer autour du verrou désormais ouvert de l’autoconsommation collective.

On voit de plus en plus de publicités pour des offres d’énergie verte. L’ADEME veut créer un label pour permettre au consommateur de s’y retrouver. Est-ce utile ?

Depuis le départ, les offres vertes sont ambiguës. Le consommateur croit payer pour de l’énergie renouvelable mais derrière son fournisseur a acheté de l’énergie nucléaire à l’ARENH (l’Accès régulé à l’électricité nucléaire historique, ndlr). Disons que l’organisation actuelle conduit à des aberrations. L’ADEME réfléchit à un label très qualitatif, un peu comme un label bio, et nous sommes associés aux échanges. Ce qui cristallise les tensions, c’est la question d’interdire de passer par l’ARENH pour ce label. Ce que nous promouvons, ce sont des contrats d’achat directs avec des producteurs, ce qui permet de sortir des projets qui sans ça ne verraient pas le jour, comme le projet des Survoltés, à Aubais. Et nous en avons d’autres en cours, à Durfort, Soudorgues ou Saint-Sébastien-d’Aigrefeuille.

Les énergies renouvelables sont-elles compétitives ? Certains en doutent et estiment qu’elles sont subventionnées par les pouvoirs publics.

Oui, il y a un surcoût des nouvelles énergies renouvelables pris en charge par les pouvoirs publics, mais la difficulté, c’est qu’on compare des choses amorties, comme les centrales nucléaires, à du neuf. Or, si on prend une nouvelle centrale nucléaire comme l’EPR, le coût de production va se situer au-delà des 10 centimes par kWh, alors que pour l’éolien ce coût est autour de 7 centimes, et pour le photovoltaïque de 5 à 6 centimes. Donc les énergies renouvelables sont compétitives et encore soutenues, certes, mais moins que le nucléaire il y a quarante ans.

Faut-il, selon vous, sortir du nucléaire ou simplement en réduire sa part dans le mix énergétique français ?

Je suis partisan de dire qu’il faut en sortir au plus vite. Ma position est dogmatique car j’ai une aversion au risque irréversible. Et quand on dit que le nucléaire ne produit pas de CO2, dans trente ou quarante ans, nous n’aurons plus d’uranium. C’est reculer pour mieux sauter. Donc pour moi il faut sortir du nucléaire, et y aller franco, car si on ne réduit pas la part du nucléaire, nous n’arriverons pas à développer les énergies renouvelables, sinon nous allons être en surproduction. Le plus important, c’est que les citoyens soient associés à la transition énergétique et qu’avec les collectivités et les entreprises locales nous soyons en capacité de répondre aux besoins localement. C’est important, nous l’avons vu avec la crise du covid.

Propos recueillis par Thierry Allard

Thierry Allard

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