BEAUCAIRE Deux enfants tués : le père a fait boire un cocktail médicamenteux
Hier, la cour d'appel de Nîmes revenait sur une terrible affaire qui a coûté la vie à deux enfants de 4 et 6 ans, en août 2019 à Beaucaire. Elle examinait la responsabilité pénale du père de famille, l'auteur du double assassinat.
« C’est une femme morte de l’intérieur, avec plein de questions et de doutes, plaide son avocat. Est-ce qu’ils ont souffert ? Ont-ils vu venir la mort ? M’ont-ils appelée ? Est-ce qu’ils ont pleuré ? Quel a été leur dernier mot ? », poursuit maître Rémy Nougier, ce mercredi 8 septembre, devant la chambre de l’instruction de Nîmes. Il défend une maman dont les deux enfants ont été assassinés par leur père. Cette femme digne, mais en souffrance, arbore un tee-shirt avec la photo de ses deux enfants de 4 et 6 ans (voir photo), des enfants qui ne vivent plus qu’à travers des clichés et des vidéos qu’elle conserve précieusement sur son portable.
Elle vient devant la juridiction pour comprendre. Seulement, dans le box, les explications sont rares. Son ancien mari et père des enfants tués est à peine audible. Le président, Christophe Teissier, est obligé de répéter les propos du mis en examen pour ce double assassinat. Il ne se souvient pas de grand-chose. Ce jour tragique, cet homme qui se décrit comme dépressif a préparé un pique-nique qu’il avait promis à ses enfants. Avant de partir, il a mélangé de nombreux médicaments dans un liquide qu’il a ensuite fait ingurgiter à Marie et Vincent avant d’en prendre également. Les enfants ont été retrouvés morts sur le chemin du Calvaire, à Beaucaire, comme une référence à la religion dont le père de famille avoue qu’elle a une place capitale dans son existence.
Il voulait "protéger ses enfants des maléfices"
« Que vous vouliez en finir est une chose, mais pourquoi s’en prendre à vos deux enfants ? », interroge le président Teissier. « Je voulais les protéger des maléfices de ma belle-famille », glisse le quadragénaire dans le box. « Au début, c’est moi qui était attaqué, ensuite ça s’est étendu à mes enfants », raconte le père de famille dans une logique qu'il est seul à comprendre.
Sur son banc, la maman pleure en silence. Elle ne croit pas en la folie de celui dont elle a partagé la vie. En revanche, elle le croit « stratégique, essayant de sauver sa vie ». Son ex-mari les accuse, elle et ses proches, de l’avoir envoûté. « Elle m’a marabouté, c’est le problème », estime cet homme dont tous les experts disent qu’il dépend de la psychiatrie et non pas de la justice pénale. Des experts qui concluent tous à l’irresponsabilité pénale du mis en cause. Car hier, devant la cour d’appel, ce n’était pas un procès sur le fond. L’idée était de savoir s’il y a eu abolition du discernement au moment des faits ?
À l’audience, on en apprend un peu plus sur la surprenante scène de crime. Les enquêteurs ont retrouvé les enfants couchés sur le dos sur des draps bleus. Au-dessus de leurs têtes, ils avaient un santon représentant la Vierge Marie. Des livres ont également été saisis parlant de désenvoutement et de prières.
Une audience bouleversante avec de nombreuses questions en suspens, car à chaque fois qu’un mis en cause ne s’explique pas, les doutes surgissent du côté des victimes, de ceux qui veulent comprendre. Les larmes et le chagrin éternel de cette mère de famille dont les deux enfants ont été empoisonnés et tués à Beaucaire resteront un moment humainement insoutenable.
La cour d’appel de Nîmes rendra son arrêt le 28 septembre et dira si elle déclare l’irresponsabilité pénale de cet homme, auquel cas il ne serait jamais jugé. Si tel était le cas, elle devrait prononcer des contraintes pour le mis en cause, notamment l’hospitalisation dans une unité spécialisée. La chambre de l’instruction peut aussi décider, comme l’a demandé maître Nougier, une nouvelle expertise psychiatrique.
Boris de la Cruz