FAIT DU JOUR 17 ans après, l’hommage au lieutenant Frances aux cascades du Sautadet
Il fait beau et chaud, ce vendredi 21 avril 2000 aux cascades du Sautadet, à la Roque-sur-Cèze.
La majesté des lieux, leur singularité, les eaux claires de la Cèze qui bouillonnent… attirent comme toujours de nombreux touristes qui oublient parfois la dangerosité du site.
Tragique 21 avril
Car les cascades du Sautadet sont dangereuses, et ne pardonnent que rarement le moindre écart. Les pierres qui forment les cascades, polies par des millénaires de passage des eaux, peuvent se révéler très glissantes et précipiter leurs victimes dans d’étroits canyons balayés par de turbulents courants. Ce 21 avril 2000, elles feront trois morts.
D’abord une fillette. L’enfant chute et se retrouve dans les eaux bouillonnantes. Son grand-père ne se pose pas de question et saute immédiatement pour la secourir. Mais le courant est fort. Le grand-père et la fillette sont emportés. Les pompiers sont appelés sur place. Parmi eux, le lieutenant chef de plongée des sapeurs-pompiers du Gard Ollivier Frances, 33 ans.
C’est une mission risquée, d’autant qu’il n’y a que très peu de chances de remonter le grand-père et la fillette vivants, mais le lieutenant Frances accomplit son devoir. « C’était un grand sportif, un spéléologue, il faisait du vol à voile, du parachute et il a fait l’école des marins-pompiers », note son père Pierre Frances, dix-sept ans après. Malgré sa condition physique exceptionnelle et toutes les précautions prises pour cette intervention, Ollivier Frances ne remontera pas. Il ne connaîtra jamais sa fille, qui naîtra deux mois plus tard.
30 morts en 55 ans
Ce 21 avril 2017, il fait beau mais un peu moins chaud, qu’il y a dix-sept ans jour pour jour, pour le dévoilement de la plaque commémorative du décès du lieutenant Frances. Un hommage intimiste souhaité par la famille et mis en œuvre par la commune de La Roque. Son maire Edmond Jouvenel, très ému, rendra hommage au « sacrifice » d’Ollivier Frances, qui « a tenté l’impossible » pour sauver les deux autres victimes.
Des victimes qui viennent grossir une liste longue, très longue, des trente noms des morts sur le site des cascades depuis 1962. Le dernier remonte à 2010, mais de nombreuses personnes s’y sont blessées depuis. Alors à l’orée de la saison touristique, qui va encore voir les cascades submergées de touristes, Edmond Jouvenel fait un voeu, « que cette plaque rappelle aux touristes et aux sauveteurs le grand danger de ce site. » Un danger déjà signalé sur les deux rives par des banderoles en français et en anglais rappelant que trente personnes ont laissé leur vie ici en un peu plus de cinquante ans et par des panneaux indiquant la limite à ne pas franchir pour éviter les glissades.
« Tous les jours je me lève, et tous les jours il me manque »
Le président du conseil d’administration du SDIS Alexandre Pissas a quant à lui reconnu que « c’est nous depuis dix-sept ans qui aurions dû mettre une plaque. » Un mea culpa tardif de la part du SDIS qui satisfait Pierre Frances : « on est venus pour un hommage qui aurait dû être rendu il y a bien longtemps, mais tout est arrangé, c’est très bien comme ça. » Reste que ni cet hommage tardif, ni les années qui passent, ne referment les blessures de Colette Frances, la mère du lieutenant : « je n’étais pas revenue sur les cascades du Sautadet depuis dix-sept ans. Pour moi, c’est affreux. Tous les jours je me lève, et tous les jours il me manque. »
Un événement tragique qui rappelle, si besoin en était, le courage et le dévouement des forces de l’ordre, et des pompiers. « Nous sommes peut-être un peu chers, mais d’une très grande qualité, et les sapeurs-pompiers risquent leur vie en permanence, souligne Alexandre Pissas. Plusieurs sapeurs-pompiers professionnels ou volontaires donnent leur vie chaque année, les exemples comme celui du lieutenant Frances existent pour administrer la preuve que les sapeurs-pompiers sont toujours là pour se sacrifier. »
Thierry ALLARD