Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 21.01.2022 - corentin-corger - 5 min  - vu 2464 fois

FAIT DU JOUR Océan, une entreprise moteur pour l'insertion professionnelle

Émilien Marcos a présenté le dispositif d'entreprise insertion en compagnie de la préfète du Gard (Photo Corentin Corger)

La préfète du Gard Marie-Françoise Lecaillon en compagnie d'Émilien Marcos, fondateur et président d'Océan (Photo Corentin Corger)

En employant 60 personnes issues des quartiers prioritaires de Nîmes et 20 en contrat d'insertion, la société nîmoise de propreté urbaine Océan fait figure d'exemple afin de favoriser l'insertion professionnelle d'un grand nombre de nos concitoyens. Avec plus de 150 000€ dédiés chaque année à des associations, l'entreprise a pour but de s'ancrer véritablement dans les territoires où elle est implantée. Un état d'esprit salué la semaine dernière par la préfète du Gard qui s'est rendue sur place.

"Si je suis là c'est pour votre rôle au niveau de l'insertion professionnelle", entame d'entrée la préfète Marie-Françoise Lecaillon en s'adressant à Émilien Marcos, président et fondateur d'Océan spécialisée dans la propreté urbaine, à son arrivée devant les locaux de la société situés sur l'ancienne route d'Avignon. Depuis sa prise de fonction en mars 2021, la représentante de l'État dans le Gard poursuit sa visite des entreprises qui comptent sur le territoire. Au-delà de découvrir un fleuron gardois en matière de propreté urbaine et collecte de déchets, c'est surtout la particularité de cette entreprise de permettre à un public moins privilégié d'accéder à l'emploi qui a motivé cette venue.

Après dix ans d'expérience dans divers groupes de nettoyage urbain, Émilien Marcos, originaire du quartier Valdegour à Nîmes, fonde Océan en compagnie de son épouse le 1er février 2000. À seulement trois personnes, ils effectuent le balayage des autoroutes, le nettoyage des sites d'accidents ainsi que le ramassage des déchets sur les aires de repos. L'entreprise grappille ses premiers marchés et décolle en 2003 en remportant l'appel d'offres de la ville de Nîmes pour la collecte des ordures ménagères et la propreté des quartiers Est comprenant notamment le Chemin Bas d'Avignon et le Mas de Mingue.

En 2008, Océan connaît un tournant majeur avec le renouvellement de ce contrat avec Nîmes étendu désormais au centre-ville élargi. Avec ce changement de délégataire, 113 personnes rejoignent alors l'entreprise dont les effectifs gonflent à 155 salariés. "J'ai eu peur à l'époque car 98% de ce nouveau personnel était syndiqué", se souvient Émilien Marcos. Ce dernier, en entretien individuel, fait adhérer la majorité de ces recrues au caractère familial qu'il insuffle dans sa société. Et malgré quelques remous, l'adaptation est réussie. "J'ai dû me séparer de 11 personnes qui ne faisaient pas partie du projet Océan. Cela a coûté un peu d'argent mais c'était nécessaire pour maintenir de la sérénité."

60 salariés issus des quartiers

Ce marché avec la ville de Nîmes est renouvelé en 2015 et pourrait l'être de nouveau en septembre prochain. Outre la cité des Antonin, Océan s'engouffre sur plusieurs territoires : en Petite Camargue pour la collecte des déchets, à Sète pour le nettoyage du port ou encore à Sommières. Un véritable raz-de-marée concentré localement. "On ne veut pas se dissiper et garder une dimension humaine", confie le PDG. Et pour concrétiser ces paroles, au fil des marchés l'objectif pour Océan est de s'ancrer dans les territoires où elle lave les rues et ramasse les déchets.

Umir et Mohamed ont bénéficié de contrats d'insertion (Photo Corentin Corger)

Cela signifie concrètement par exemple à Nîmes d'embaucher des habitants des quartiers. Sur les 230 collaborateurs actuels, 60 sont issus des quartiers prioritaires de la ville qui comprend aussi Pissevin et Valdegour. Si dans un premier temps, principalement les jeunes étaient ciblés, les sollicitations se sont étendues à des profils plus âgés. "Pour certains jeunes, on s'est aperçu que c'était difficile de se lever tous les jours à 4h du matin. Donc on a aussi pris des gens déjà mariés, assis socialement entre 35 et 50 ans. Certains sont encore là et ont progressé dans l'entreprise", se félicite Émilien Marcos. Proposer d'une part un emploi mais permettre aussi de prendre le fameux ascenseur social et aspirer à un autre cadre de vie.

"Ma vie a tellement changé ici"

De plus, la SAS s'implique aussi dans la vie économique et sociale des communes où elle est implantée en soutenant financièrement plus de 70 associations. Une enveloppe de 150 000 € à 160 000 € y est dédiée chaque année. Des associations sportives mais également caritatives comme Humanîmes très implantée dans les quartiers. Les liens permanents avec les bénévoles permet à Océan de pouvoir cibler directement des profils intéressants pour intégrer l'entreprise. Une voie souvent privilégiée à celle de Pôle Emploi. La petite vague bleue d'Océan accompagne aussi des clubs sportifs professionnels comme l'USAM, le RCN mais désormais plus le Nîmes Olympique.

Depuis septembre 2020, le groupe est conventionné par l'État en tant que Structure d'insertion par l'activité économique (SIAE) pour embaucher et accompagner des publics rencontrant des difficultés d'insertion sociale et professionnelle. Pour 2022, Océan bénéficie de 215 000 € d'aides pour 20 postes en insertion. Des jeunes en grande difficulté ou encore des chômeurs de longue durée ont ainsi la possibilité de travailler 35h par semaine comme agent de propreté ou rippeur (éboueur) pour un parcours de 4 à 24 mois. C'est notamment le cas d'Umir Akhunzada, un jeune Afghan recruté il y a un an et demi. "Ma vie a tellement changé ici. On est comme une famille", déclare en souriant le jeune homme qui maîtrise déjà le français et qui est en train de passer son permis, financé par la société.

L'objectif de la société est de féminiser son activité sur le terrain (Photo Océan)

Une entreprise d'insertion doit permettre de pouvoir travailler mais aussi dégager des heures pour faire des formations et préparer un projet professionnel. Umir souhaite travailler dans les espaces verts. Pour d'autres, il est possible d'intégrer définitivement l'entreprise à l'image de Mohamed Qdada, habilité à manipuler et transporter les emballages qui ont contenu des produits dangereux comme le protoxyde d'azote. "J'ai des collègues qui travaillent ici alors j'ai décidé de postuler", avoue le quinquagénaire. Océan permet donc à ces postulants de retrouver un emploi. La mission est aussi de féminiser l'activité. Quatre femmes font partie de l'aventure dont Roselyne Ben Ali, la présidente du club de football du Chemin Bas. Pour les attirer davantage et notamment les mamans isolées, des horaires aménagés sont mis en place.

Campus Ocean et centre de formation

Afin d'offrir une vraie formation qualifiante en lien avec les nouveaux impératifs environnementaux, à ses agents mais aussi à ceux des autres entreprises, Émilien Marcos a lancé Campus Océan. Les premières sessions vont débuter en mars. En septembre, un centre de formation des apprentis verra le jour au nouveau lycée polyvalent Lucie-Aubrac de Sommières. En deux ans, les apprentis obtiendront un CAP certifié "Propreté de l'environnement urbain et recyclage". Des métiers indispensables dans l'avenir qui évoluent. En parallèle, Ocean Concept a été créé pour la partie innovation et l'élaboration d'un véhicule 100% électrique.

Avec son dernier modèle, le Virto 2C, Océan entend bien équiper ses agents mais aussi vendre ce concept pour le marché de la livraison sur le dernier kilomètre en pleine expansion dans les centres-villes des grandes métropoles. Ce triporteur peut supporter jusqu'à 250 kg de charge. "C'est donner l'opportunité aux jeunes de créer leur propre métier", conclut Émilien Marcos toujours préoccupé par l'idée de permettre à tous de trouver sa voie. D'ici trois, quatre ans, l'entrepreneur de 59 ans devrait laisser la main à deux de ses trois enfants, Mickaël et Laëtitia, et vivre une seconde vie en Andalousie au milieu de ses 2 000 oliviers. S'il n'est pas prévu que la préfète s'y rende un jour, elle est toutefois repartie de Courbessac avec une petite bouteille d'huile d'olive.

Corentin Corger

Corentin Corger

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