Publié il y a 3 ans - Mise à jour le 28.03.2021 - abdel-samari - 4 min  - vu 1268 fois

INTERVIEW La ministre de la Ville, Nadia Hai : "Je n’ai qu’une envie : revenir dans le Gard !"

Nadia Hai, ministre de la Ville lors de son déplacement à Nîmes Photo : Objectif Gard

La ministre de la Ville était du déplacement dans le Gard avec le Premier ministre Jean Castex hier samedi. Avant de repartir pour Paris, Nadia Hai a accordé une interview à notre rédaction et rappelle l'objet de cette visite et le renfort d'éducateurs spécialisés et médiateurs sociaux à Nîmes.

Objectif Gard : Quel était l’objet de votre déplacement dans le Gard ?

Nadia Hai : Deux mois après le Comité interministériel à la ville (CIV), qui s’est tenu le 29 janvier dernier à Grigny, le Premier ministre a décidé de réunir toutes les six semaines un comité de suivi pour faire un état d’avancement des mesures décidées. Alors que la crise vient frapper durement les quartiers et leurs habitants, le CIV a permis de mobiliser 3,3 milliards d’euros supplémentaires et acté plusieurs engagements forts sur les champs de la sécurité, du logement, de l’éducation, de l’insertion et de la cohésion sociale. Notre priorité aujourd’hui, c’est de s’assurer de la bonne mise en œuvre de ces mesures ! Et ce dans chacun des 1 514 quartiers prioritaires de la politique de la ville, et donc aussi ici dans le Gard.

Nîmes en particulier connaît depuis plusieurs mois une recrudescence de la violence dans ses quartiers populaires. Comment l’analysez-vous ?

La recrudescence des violences ne se résume pas aux quartiers populaires mais les fragilités des quartiers, amplifiées par la crise, en font des terreaux fertiles. Je crois qu’il nous faut rappeler que cette violence n’est pas nouvelle, mais j’ai échangé avec celles et ceux qui sont au contact du terrain (les éducateurs de rue, les médiateurs sociaux, les responsables d’associations de bas d’immeuble, les élus, notamment) et je constate avec eux que la violence atteint des publics nouveaux, avec un rajeunissement mais également une féminisation des profils. La crise et les restrictions sanitaires ont un impact psychologique profond sur la jeunesse de nos quartiers, avec l’arrêt de nombreuses activités qui conduit à l’isolement. Nous avons rappelé avec le Premier ministre notre engagement de reconduire les Quartiers d’été et vacances apprenantes à l’été 2021, pour lutter contre le désœuvrement de ces jeunes.

Nadia Hai, ministre de la Ville lors de son déplacement à Nîmes Photo : Objectif Gard

Vous avez annoncé le renfort de 600 éducateurs et médiateurs en France. Le Gard pourra s’appuyer sur quel renfort et à quelle échéance ?

Oui, c’est une annonce forte du CIV portée par le Ministère de la Ville. Une mesure d’autant plus nécessaire dans cette période de recrudescence des violences entre jeunes, qui est inquiétante.  Avec cette mesure, nous allons déployer 600 éducateurs de rue et médiateurs sociaux dans les 45 quartiers que nous avons pré-identifiés : ce seront très concrètement ceux où le contexte sécuritaire est fragile, ceux qui connaissent une forte pauvreté, ceux où le chômage des jeunes est important, ceux où le nombre de familles monoparentales est élevé. Ceux où les besoins sont les plus forts et qui ne comptent plus suffisamment d’équipes d’éducateurs. Ici, dans le Gard, et plus précisément à Nîmes, nous allons déployer 12 éducateurs spécialisés et médiateurs sociaux.

Vos déplacements sont souvent l’occasion de l’installation d’un comité territorial de la politique de la ville. En quoi consiste celui du Gard ?

Notre objectif est simple : décliner sur l’ensemble des départements les mesures du Comité interministériel des villes et du plan France relance. Ces comités ont vocation à réunir tous les acteurs de la politique de la ville et les maires ayant des QPV, autour du Préfet. Dans le Gard, ces mesures viennent concrètement changer le quotidien des habitants des quartiers prioritaires. Nous allons renforcer notre action en matière de renouvellement urbain en augmentant l’investissement de l’Etat sur les villes d’Alès et Nîmes, ouvrir 100 places en internat d’excellence à Nîmes, financer la réhabilitation et l’extension de l’Ecole nationale à Beaucaire ou encore l’aménagement de jardins familiaux à Uzès avec les crédits du plan France relance.

"Il y a 30 ans, j’aurais rêvé d’avoir une cité éducative !"

Vous évoquez aussi des expérimentations, de nouvelles mesures dans le cadre de ce comité… Pouvez-vous nous citer quelques-unes de ces solutions pour notre département ?

Je pense à deux mesures nouvelles du CIV qui pourraient être expérimentées sur ces territoires qui bouillonnent de jeunesse et de potentiel. Quartiers productifs, un programme qui vise à soutenir l’entrepreneuriat, le développement du commerce et de l’artisanat et l’implantation d’activités productives. Trop longtemps l’accompagnement social a été la règle et le développement économique l’exception. Or, ma conviction est que c’est un levier incontournable pour l’attractivité de nos territoires, les emplois, la qualité de vie. Avec ce programme, nous soutenons les collectivités qui se mobilisent pour la vitalité de leurs quartiers. Et les Cités de la jeunesse : un lieu unique rassemblant tous les dispositifs existants qui leurs sont destinés et où les jeunes peuvent tout à la fois s’informer, être orientés, faire valoir leurs droits, échanger, mener des projets, en un mot s’émanciper.

Qu’est-ce qui vous a le plus marqué lors de cette visite dans notre département ?

Je crois que c’est la rencontre avec les élèves accompagnés dans le cadre de la cité éducative de Nîmes. Ces jeunes ont tous fait le choix de s’engager en tant qu’"ambassadeurs de la citoyenneté" : ils sont déterminés à réussir, à changer l’image de leur quartier, à participer au pacte républicain. Un moment particulièrement émouvant lorsqu’un jeune nous a demandé comment on devenait Premier ministre ou ministre. Je lui ai répondu que sa question résonnait particulièrement en moi, car moi aussi les quartiers de Trappes m’ont vu naître, grandir et devenir la femme que je suis. Tout le monde doit avoir le droit de réussir. Nous allons leur donner les moyens de leurs ambitions. Il y a 30 ans, j’aurais rêvé d’avoir une cité éducative !

Un petit mot plus personnel. Vous étiez déjà venue dans le Gard ?

Absolument pas ! Et j’ai été ravie de découvrir ce beau département par le prisme de ses quartiers, à Nîmes et Alès. Surtout, ce que je retiens, c’est les rencontres que nous avons faites tout au long de cette journée, avec le Premier ministre, et l’accueil chaleureux qui nous a été réservé : des services de l’État exemplaires, des élus engagés, des acteurs associatifs qui innovent et agissent, des jeunes qui croient en leur avenir, des professionnels impliqués, des habitants qui aiment leurs quartiers et des projets ambitieux qui placent l’humain au cœur de l’urbain. Voilà ce que je retiens de cette région et surtout de ses habitants ! Je n’ai qu’une envie : revenir ! Et je reviendrai pour y installer le Comité territorial de la politique de la ville qui aura lieu avant l’été.

Propos recueillis par Abdel Samari

Abdel Samari

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