Publié il y a 7 ans - Mise à jour le 29.04.2017 - thierry-allard - 4 min  - vu 700 fois

MARCOULE La CGT dénonce un "dumping social" à Areva NC, la direction dément

La CGT d'Areva NC, emmenée par Pierre-Emmanuel Joly, Nadine Charbonnier et Guy Abella s'oppose à ce qu'elle considère comme un dumping social (Photo : Thierry Allard / Objectif Gard)

Le géant du nucléaire Areva, ce n’est pas qu’un seul et unique groupe.

C’est surtout plusieurs filiales. Et la CGT de l’une d’entre elles, l’historique Areva NC, accuse la direction d’organiser, d’après les mots du coordinateur CGT de la holding New Areva Pierre-Emmanuel Joly, « du dumping social. »

Une entente « sur le dos des salariés »

Pour bien comprendre le problème il faut remonter à 2015, et à la signature du contrat qui lie Areva et le CEA. Le client, le CEA, a décidé depuis plusieurs années de passer par des appels d’offres et non plus du gré à gré pour exploiter ses sites, dont Marcoule. Ainsi, et pour résumer, Areva NC a du travail jusqu’à la fin dudit contrat, 2020, sur une multitude de métiers. « Areva prend dans ses filiales STMI et M6 pour boucher les trous et ne pas recruter », affirme Pierre-Emmanuel Joly, que la manoeuvre ne gêne pas tant qu’elle ne concerne « que les installations qu’on risquait de perdre. »

Ce système, qu’on appelle mise à disposition, consiste donc à mettre à disposition des salariés de certaines de ses filiales chez Areva NC pour l’exécution du contrat du CEA. Une manoeuvre qui se serait amplifiée ces derniers temps, pour gagner toutes les activités : « aujourd’hui, 25 % des activités sont en mise à disposition », avance Pierre-Emmanuel Joly. Le problème, pour la CGT, c’est que les salariés mis à disposition « n’ont pas les mêmes statuts, ni les mêmes primes », note Pierre-Emmanuel Joly, sachant que le secrétaire de la CGT chez Areva NC Marcoule Guy Abella souligne dans le même temps « les difficultés organisationnelles » que le système causerait.

Un système qui pourrait se rapprocher de l’intérim, voire du CDD : « sauf que dans le nucléaire, les intérimaires et les CDD ne peuvent pas aller dans les zones irradiées à plus de 2 millisievert, rappelle Pierre-Emmanuel Joly. L’avantage, avec les mis à disposition, c’est qu’ils sont en CDI. » L’avantage aussi, c’est le coût : « un mis à disposition coûte 50 000 euros par an, contre 80 000 pour un salarié au statut NC », affirme Pierre-Emmanuel Joly. Un delta qui s’expliquerait par les acquis sociaux et la moyenne d’âge plus élevée de NC. Pour lui, c’est la véritable raison de la mise en place de ce dispositif, qui profiterait aussi au CEA : « dans le contrat du CEA, il y a une ristourne d’un million d’euros par an à partir de 50 mis à disposition, et de 20 000 euros par an par salarié mis à disposition supplémentaire », lance le cégétiste. Vu que plus de 80 mis à disposition travaillent chez Areva NC, la CGT accuse le CEA et Areva de s’être entendus « sur le dos des salariés », l’un pour payer moins cher, l’autre pour augmenter ses marges, ce qui serait illégal.

« On veut éviter l’effet de falaise »

Du côté de la direction, on assure que le dispositif « est tout à fait légal, c’est une pratique courante », explique le directeur de la communication d’Areva démantèlement et service Maxime Michaut. S’il reconnaît que « les salariés sont sur des modèles différents », il l’explique par le fait que « les deux filiales ne sont pas sur les mêmes marchés, NC est plus sur l’expertise de l’exploitant et STMI dans le service. » Pour la direction, la vraie raison de cet entrisme de STMI chez NC tient donc aux compétences de la première qui seraient mieux placées pour répondre aux exigences du CEA, mais pas seulement.

Ainsi, Maxime Michaud affirme que cette proportion de plus en plus grande de mis à disposition chez Areva NC est une « anticipation » : « On a 450 salariés NC sur le site, et si en 2020 on n’a plus d’activité, on sera dans une situation sociale difficile. On veut éviter l’effet de falaise, alors on lisse la baisse des effectifs de NC, pour accompagner le mouvement. » Du côté de la CGT, on ne croit pas à l’arrêt du jour au lendemain des activités en 2020, dont certaines ne sont réalisées que par Areva. Pour la direction, ce système « permet également de positionner STMI comme un acteur crédible vis à vis du CEA », explique Maxime Michaut, ce qui pourra servir lors de futurs appels d’offres, où STMI et « ses cinquante années d’expérience » sera « plus agile », d’après ses termes.

Quant aux accusations de dumping, la direction les rejette en bloc. La CGT rappelle simplement que là où un salarié NC pourra prétendre jusqu’à 4 000 euros d’intéressement, un mis à disposition n’aura que 350 euros. « Un NC qui deviendrait STMI n’y perdrait pas forcément au change, après il est vrai qu’on n’est pas exactement sur les contrats de NC », reconnaît Maxime Michaut.

Les syndicats, dont la CGT qui a pris le lead sur ce sujet, et la direction ont rendez-vous le 4 mai à Paris. Les cégétistes y réclameront l’embauche des mis à disposition chez NC, une perspective pas envisageable pour la direction : « on ne peut pas mettre tout le monde en contrat NC, ce ne serait pas responsable », indique Maxime Michaud, rappelant la deadline 2020. Pour autant, les deux parties semblent ouvertes à la discussion. Si elles échouent, la CGT prévient déjà : « on ira jusqu’au bout, c’est à dire en justice, on a suffisamment d’éléments pour prouver l’illégalité du dispositif », prévient Pierre-Emmanuel Joly.

Thierry ALLARD

thierry.allard@objectifgard.com

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