NÎMES Franck Proust jette un pavé dans le cadereau
Ce samedi matin, se déroulait l'inauguration des travaux de requalification du cadereau de la route d'Alès à Nîmes. Un événement marqué par une nouvelle passe d'armes entre la Ville de Nîmes et Nîmes Métropole, initiée cette fois-ci par Franck Proust, le premier adjoint de la municipalité.
Nous sommes à environ cinq mois des élections municipales de mars 2020 et la guéguerre entre Jean-Paul Fournier, maire sortant qui n'a pas encore annoncé ses ambitions, et Yvan Lachaud, candidat déclaré, continue d'animer la place publique. Après la gestion des zones d'aménagement concerté ou encore le parking de Laennec sur la ligne T2 du Tram'Bus, c'est sur la Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi) que les deux camps ont réglé leurs comptes.
Encore une compétence que le législateur a délégué aux intercommunalités avec la loi Notre du 1er janvier 2018. Et qui dit transfert, dit montant du transfert. Malgré les dissensions, les projets avancent et ce matin, étaient inaugurés les travaux de requalification sur le cadereau d'Alès au niveau du quartier d'Espagne. Plus de 10 M€ investis (dont 4,8 M par Nîmes Métropole et 2,4 M par le Département) pour réaménager ce ruisseau sec et éviter de revivre le traumatisme de 1988 et les crues majeures de 2002, 2005 ou encore 2014.
Coupure du ruban, petite visite des travaux... tout se passait bien jusqu'au moment des discours. Yvan Lachaud, le maître de cérémonie, annonce dans quel ordre les élus vont parler. Jean-Paul Fournier retenu ailleurs, c'est son premier adjoint Franck Proust qui représente la Ville de Nîmes et prend en premier la parole. "Nous nous inquiétons par le report des travaux sur le cadereau d'Uzès. Cette situation est incompréhensible. Comment ne pas être surpris par ces reports alors que la sécurité des concitoyens est en jeu ?", lâche-t-il après avoir rappelé la "préoccupation fondamentale", que représente le risque inondation. Un pavé jeté dans le cadereau, où l'estrade était installée, qui a forcément refroidi l'ambiance.
Une intervention conclue de la manière suivante, "la Ville de Nîmes restera attentive à ces travaux. M. Jean-Paul Fournier m'avait demandé d'insister sur ce point." Surpris, Yvan Lachaud s'est précipité vers Jacques Bollègue, son vice-président en charge de l'eau pour préparer discrètement sa riposte quand son tour viendra après Christian Bastid, conseiller départemental et Jean-Luc Gibelin, vice-président d'Occitanie.
"Après les drames vécus, on a un devoir d'union. Devant un sujet pareil, on a pas le droit à la polémique. Mon cher Franck ce n'est pas le moment", a ainsi commencé le président de l'Agglo. Et pour répondre aux attaques concernant les travaux sur le cadereau d'Uzès, Yvan Lachaud a à plusieurs reprises pris le préfet à témoin, "il n'y a aucun report, le préfet peut le confirmer. Bergson, c'est réglé en avril prochain ! Allez voir si on a freiné les travaux."
Une énième source de conflit entre les deux parties concernant un avenant au fonds Barnier qui va permettre à Nîmes Métropole de bénéficier d'un soutien financier supplémentaire et que la Ville a refusé de signer. "On peut se passer de leur accord", a confirmé Yvan Lachaud. Une situation délicate que Didier Lauga n'a pas dû apprécier, pris en tenaille au milieu de cette querelle et qui s'est exprimé en dernier. Pour la paix des ménages, le préfet a salué "la parfaite continuité de l'Agglo" et assuré que la ville "a fait plus que son devoir". Le représentant de l'État a soulevé la particularité de ce département où les 351 communes sont exposées au risque inondation.
Il a surtout tenu à mettre en lumière la nécessité de développer une culture du risque : "cela peut se produire encore. Ce sera jamais suffisant sans l'implication de la population qui doit se responsabiliser." Des collectivités contraintes de travailler ensemble dans le cadre du Programme d'actions de prévention des inondations (Papi). Un partenariat entre l'État et les acteurs locaux qui visent à réduire les conséquences des inondations sur les territoires à travers une approche globale du risque. Le cadereau d'Alès est inscrit au Papi II, la deuxième génération alors que la troisième est déjà lancée.
En un an, ce sont cinq kilomètres de cadereau qui ont été réaménagés avec six ponts démolis puis reconstruits. La présence de voûtes maçonnées en pierre créaient un verrou hydraulique et donc un bouchon qui bloquait le flux de l'eau. Avec un élargissement du ruisseau nîmois de cinq à dix mètres, c'est désormais un débit de 80 m3/s qui peut circuler. De quoi éviter de revivre la crue de 1988 que certains observateurs qualifient de millénaire. Mais avec la nature c'est comme en politique, cela peut déborder sans prévenir.
Corentin Corger