Publié il y a 14 h - Mise à jour le 10.02.2025 - François Desmeures - 4 min  - vu 590 fois

SAINT-MARTIN-DE-VALGALGUES Mines métallifères : la pollution est avérée, l'État donne des préconisations

Autour du sous-préfet d'Alès et du maire, Claude Cerpedes, les représentants de trois services de l'État

- François Desmeures

La commune recevait trois services de l'État, ce jeudi soir, pour une réunion publique, présidée par le sous-préfet d'Alès, afin d'informer la population sur la pollution liée aux mines polymétalliques. Dans certains secteurs, sols et eaux de forage sont pollués et des préconisatons ont été énoncées. Ce vendredi matin, les services municipaux clotûraient les espaces enherbés de l'école Henri-Barbusse pour ne interdire l'accès aux enfants...

Autour du sous-préfet d'Alès et du maire, Claude Cerpedes, les représentants de trois services de l'État • François Desmeures

La réunion était promise depuis longtemps et les services de l'État y sont venus en nombre. En plus du sous-préfet d'Alès, Émile Soumbo, deux réprésentants de la DREAL (direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement Occitanie), trois de l'ARS (agence régionale de santé) et deux de GEODERIS (qui apporte l'expertise à l'État en matière d'après-mine) sont venus détailler l'étude sanitaire et environnementale du secteur de Saint-Félix. On parle bien, ici, d'une ancienne concession minière qui concerne principalement Saint-Martin-de-Valgalgues et Cendras, et n'a strictement rien à voir avec l'ancienne mine de Saint-Félix-de-Pallières (Objectif Gard reviendra sur celle-ci dans les prochains jours). 

Si une étude est menée, c'est en réponse "à une directive européenne de 2006 qui oblige à faire un recensement des sites miniers", explique Émile Soumbo, dans l'ordre de la gravité estimée des sites, classés de A pour les moins pollués, à E. Le secteur de Saint-Félix est classé D. Il se compose de trois anciennes concessions "de pyrite de fer, plomb, zinc et autres métaux", expose le rapport final de janvier 2025 (*) : celle de Cendras, au sud du secteur, exploitée entre 1865 et 1930 et qui a produit 4 000 tonnes de métaux ; celle dite de Saint-Félix, au nord-est du secteur, exploitée de 1856 à 1930 pour 75 000 tonnes ; et enfin celle du Soulier, autour du hameau du même nom le long de la RN 106, qui dura de 1856 à 1962 et produisit 1 million de tonnes de pyrite. 

Une cinquantaine de personnes ont assisté à la réunion • François Desmeures

"Les secteurs classés en D et E présentent des risques significatifs pour la santé humaine", introduit Philippe Chartier, du département de l'après-mine de la DREAL. D'où l'intérêt de déterminer "les taux de polluants des sols et des eaux". Au nom de GEODERIS, Marion Ferfoglia est ensuite entré dans le vif du sujet. "Dans le secteur de Saint-Félix, six dépôts sont inventoriés : deux sur la concession de Cendras, trois sur celle du Soulier, et un sur celle de Saint-Félix." Des dépôts composés de "stériles de creusement", mais surtout de résidus de traitement, très concentrés en métaux lourds et dangereux pour la santé humaine, à commencer par le plomb, l'arsenic, le cadmium ou le zinc. 

L'eau du robinet reste saine

Ces matériaux sont soumis à "une forte mobilité", poursuit l'ingénieure de GEODERIS. Ce sont des poussières qui peuvent s'envoler, s'infiltrer par les eaux de pluie ou être emportées par les crues. Et les usages quotidiens des habitants peuvent être source de pollution, maintenant que les zones de dépôt ont souvent été envahis par la forêt et que le VTT ou la chasse y sont pratiqués. Mais surtout, la volatilité des poussières impacte directement, à Saint-Martin-de-Valgalgues, la zone résidentielle des Escarieux, le hameau du Soulier, et de la Blaquière. Dans le secteur des Escarieux, on retrouve trois écoles. Le Soulier est concerné par un élevage caprin et ovin et un jardin potager communal, au Soulier. Mais aussi, dans ces trois quartiers, beaucoup de potagers privés, arrosés par des forages, et des piscines remplies pas ce même outil. Marion Ferfoglia rassure tout de même : "Aucun captage de l'eau potable n'est réalisé à l'aval des travaux miniers". L'eau du robinet est donc saine. 

Un extrait du rapport synthétisé jeudi soir • François Desmeures

Les chercheurs de GEODERIS ont réalisé 451 mesures sur les sols in situ, et analysé 233 échantillons de sol et 90 d'eau, ainsi que 66 de végétaux. Ils ont relevé "de très fortes teneurs en plomb, zinc et arsenic, au droit des zones de dépôt, mais aussi des zones d'exploitation et de traitement". Une concentration "nettement plus élevée que le fond naturel", précise l'ingénieure, qui signale tout de même que le terrain "naturel" présente déjà "de fortes anomalies" dans ces mêmes métaux. Ces teneurs élevées se retrouvent "sur les berges des ruisseaux en aval des dépôts, et certaines zones impactées sont situées au droit des zones habitées, au Soulier, aux Escarieux, au Grand-Bois et à la Blaquière"

"Sur les 29 parcelles étudiées, 21 présentent des incompatibilités avec les usages, en raison de la concentration en arsenic et en plomb des sols superficiels"

Marion Ferfoglia, ingénieure à GEODERIS

Sur 29 parcelles que GEODERIS imaginait comme potentiellement impactées -dont 24 dans des résidences avec jardins, deux écoles, deux aires de pique-nique et le jardin communal du Soulier - 28 dépassent le seuil préconisé par la Haute autorité de santé en matière d'arsenic, de cadmium, de plomb et de zinc. "Sur les 29 parcelles étudiées, 21 présentent des incompatibilités avec les usages, en raison de la concentration en arsenic et en plomb des sols superficiels", enfonce Marion Ferfoglia, qui ne peut préconiser de "limiter voire éliminer une exposition des populations aux sols, végétaux et eaux contaminées". Adieu jeux dans la terre pour les enfants et potagers arrosés à l'eau du forage... Ce vendredi matin, les employés communaux étaient d'ailleurs affairés, sous la pluie battante, à ceinturer les espaces verts dse l'école Henri-Barusse, avant des travaux de changement de terre plus conséquents que le maire a dit souhaiter, lors de la réunion publique de jeudi soir.

Vendredi matin, les employés communaux de Saint-Martin étaient occupés à baliser les espaces verts de l'école Henri-Barbusse afin que les enfants n'y jouent plus • François Desmeures

Les habitants des zones concernées vont recevoir des fiches de recommandation, "au cas par cas", en fonction du risque d'exposition constaté. Des panneaux pour interdire la cueillette vont être posés, ainsi que pour toute activité susceptible de soulever de la poussière. Hygiène individuelle, lavage des jouets d'extérieur, éviter tapis et moquette, nettoyage humide du sol de la maison sont autant de recommandations délivrées par l'ARS. Les médecins de l'Agence recommandent également de consulter son médecin traitant pour un éventuel examen biologique, en fonction des usages dans une zone à risques. 

Un changement de terre est envisagé pour l'école Henri-Barbusse • François Desmeures

Les questions des habitants, en fin de réunion, ont évidemment porté sur la crainte sanitaire, tout en reprochant le temps mis pour informer la population. Elles ont également soulevé l'inquiétude d'une dévalorisation du bien immobilier pour les propriétaires. Les services de l'État se sont voulu rassurants en indiquant qu'aucun problème de santé n'avait été soulevé pour l'instant, et qu'il n'est évidemment pas question d'expulser les gens de chez eux. Mais il n'est pas question d'évacuer les zones de leurs dépôts, ertaines étant désormais gagnées par les arbres. 

(*) Le rapport complet est consultable ici.

L'école privée du quartier des Escarieux n'est pas concernée car son sol est artificiel • François Desmeures

Une aire de pique-nique du pôle mécanique, que les auteurs du rapport préconisent de supprimer en raison de la pollution du remblais à proximité • François Desmeures

François Desmeures

A la une

Voir Plus

En direct

Voir Plus

Studio