BAGNOLS/CÈZE Dans "Sans répit", Alain Bourges retrace la vie brève et tumultueuse de Michael von der Goltz
C’est une vie digne d’une série Netflix que le Bagnolais Alain Bourges retrace dans son dernier ouvrage, « Sans répit, portrait d’un aventurier », publié ces jours-ci chez L’Harmattan. La vie de Michael von der Goltz, baron allemand qui sera, entre autres, torero et journaliste dans les années 1970 et 1980, une vie de roman tombée dans l’oubli.
Faire des recherches sur Michael von der Goltz, c’est poursuivre un fantôme. Aucune photo, et une seule et unique trace : sa participation dans un obscur film des années 1980 en tant qu’acteur. Un point de départ qui est loin de dévoiler complètement cette vie qui dura 46 années. Pour la comprendre, il a fallu à Alain Bourges, sous le pseudonyme d’Erdosain, se donner du mal, beaucoup de mal.
Si ce Breton d’origine a consacré cinq ans de travail à Michael von der Goltz, c’est qu’il s’est découvert un point commun avec lui. La passion de la tauromachie : « ce qui m’a touché chez lui, c’est que je me suis intéressé à la tauromachie via Hemingway, et lui aussi », explique l’auteur, qui a déjà écrit sur sa passion dans des ouvrages précédents, « mais pour parler d’autre chose. » Cette fois aussi, il parlera d’autre chose, avec la vie de ce grand blond allemand sur lequel il avait lu un article dans la version allemande de Géo Magazine en 1981. « L’article parlait d’un torero allemand en Espagne, il était un peu sarcastique, mais j’y a trouvé des informations », détaille Alain Bourges.
Il commence à tirer le fil : né en 1946 à Lucerne, en Suisse, Michael von der Goltz part avec sa famille en Uruguay alors qu’il est tout petit. « Ma première idée a été qu’il était un enfant de nazi », commence-t-il. La vérité sera tout l’inverse : cette famille de nobles était anti-nazie, et le père, planteur, ira travailler notamment en Amérique du Sud. Mais il est difficile de trouver plus d’éléments sur son « client ». Alors Alain Bourges va faire équipe avec une femme qui, sur Facebook, indique avoir connu von der Goltz en 1982 en Bolivie et dit chercher de ses nouvelles. « On a travaillé ensemble pendant deux ans, tous les jours », rembobine le Bagnolais.
De leurs recherches se dévoile chaque jour un peu plus le parcours de von der Goltz, son retour en Allemagne puis son doctorat en philosophie obtenu à Oxford, puis son passage à l’école de tauromachie de Madrid, mais aussi et surtout sa rencontre avec le grand journaliste allemand Kai Hermann. « Kai Hermann l’a embauché pour aller en Bolivie et s’introduire dans le milieux néo-nazis et fasciste italien », retrace Alain Bourges. Von der Goltz obtiendra la confiance du criminel de guerre nazi et tortionnaire de Jean Moulin Klaus Barbie, que Kai Hermann finira par interviewer, peu de temps avant son arrestation.
La vie de Michael von der Goltz l’emmènera ensuite en prison en Espagne pour une affaire de trafic de drogue dont il sera blanchi, à tourner un road-movie avec Jim Jarmusch, à croiser une gamine qui deviendra la grande danseuse Blanca Li, avant de mourir un jour de 1992 sur l’Île d’Elbe, vraisemblablement noyé. « Pour les gendarmes, c’est un accident, pour moi ce sont des conditions très troubles », souffle Alain Bourges.
Ainsi s’est achevée la vie de ce « courant d’air », comme le qualifie Alain Bourges, qui a dû « boucher des trous » dans le récit pour aboutir à cette « biographie romancée », comme il qualifie son ouvrage. Il sera à la Librairie occitane, place Mallet à Bagnols, ce samedi 16 novembre de 9h30 à 11h30 pour une rencontre-dédicaces.