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Publié il y a 9 mois - Mise à jour le 27.02.2024 - Sabrina Ranvier - 7 min  - vu 487 fois

LE DOSSIER Immobilier : vends gendarmerie, mairie, hôtel particulier…

Robert Crauste, le maire du Grau-du-Roi et président de la CCTC (Communauté de communes Terre de Camargue), a mis en vente plusieurs biens municipaux dès son élection en 2014. 

- Yannick Pons

Suite de notre dossier avec un entretien avec Robert Crauste, maire du Grau-du-roi, et un zoom sur l'immobilier à Nîmes. 

Objectif Gard le magazine : Lorsque vous avez été élu en 2014, vous avez mis en vente toute une série de biens appartenant à la commune. Pourquoi ?

Robert Crauste : Quand je suis arrivé en mars 2014, on venait de déménager dans le nouvel hôtel de ville. Ce déménagement a permis de libérer l'ancienne mairie. La police municipale et les services supports qui étaient dans les anciennes écoles ont aussi été installés dans le nouvel hôtel de ville. On avait donc deux bâtiments vides et disponibles.

Vous avez également mis en vente le village vacances de la route de l’Espiguette et la résidence de Camargue qui était encore occupée. Pour quelles raisons ?

Le village vacances était fermé depuis 5 ans et quasiment abandonné car il n’avait plus de locataire. Il se dégradait. L’hôtel résidence de Camargue était obsolescent et nécessitait de gros investissements pour le remettre au niveau de l’exigence touristique. Il commençait à être dégradé. Il y avait beaucoup de mauvais avis sur les réseaux. La collectivité n’aurait eu aucun moyen de le remettre à niveau. Quand j’ai été élu, on avait 70 M€ de dette consolidée. On était dans l’incapacité de dégager de l’autofinancement. J’ai pris la décision de vendre ce patrimoine.

Des touristes photographiés en 2021 lors de l'inauguration du club Belhambra du Grau-du-roi.  • Yannick Pons

Que sont devenus ces quatre biens ?

L’hôtel résidence de Camargue est devenu un club Belhambra et le village de vacances est un village Yellow 5 étoiles de très haute qualité. Cela a permis de leur donner une autre plus-value. Ces deux établissements ont permis de monter en gamme par rapport à la qualité de l’accueil. L’ancienne mairie a été rachetée par un privé en conformité avec l’architecte des bâtiments de France. Il y a des logements à l’étage et un glacier, ainsi qu’une boutique de prêt-à-porter au rez-de-chaussée. Les anciennes écoles ont été achetées par un promoteur. Il les a rasées et a construit un immeuble d’une trentaine d’appartements. C’est venu embellir le centre ancien.

Cela vous a-t-il permis de diminuer la dette de la commune ?

Nous avons retiré 22 M€ de ces ventes. Ces projets apportent de nouvelles richesses, de l’emploi et de la taxe d’aménagement et de séjour. Ce patrimoine valorisé nous a permis de désendetter la ville. Nous n’avons pas emprunté pendant tout le premier mandat et nous ne l’avons pas fait non plus pour le second mandat jusqu’à l’année dernière. On est passé de 70 M€ à 35 M€ de dette. Rénovation urbaine, école de la mer, réfection du front de mer… Cela nous a permis de lancer tous nos projets sans augmenter la pression fiscale. Ce choix a été fondamental.

Village vacances, club Belhambra avec 4 piscines, ces équipements vous ont-ils permis d’allonger la saison touristique ?

Ces établissements sont ouverts huit mois par an. Cela a permis une montée en gamme. Ce sont des établissements très attractifs. Cela a créé de l’emploi, cela génère de la taxe de séjour pour la municipalité et leurs clients viennent injecter dans l’économie locale. En réhabilitant nos phares, cela a permis de faire des offres touristiques, en dehors de la plage, toute l’année. L’annualisation du tourisme est indéniable. C’est un objectif atteint. Les deux semaines de vacances entre Noël et le jour de l'An, on a vendu 100 000 nuitées au Grau-du-roi.

Julien Plantier, adjoint au maire de Nîmes, conseillerdépartemental du Gard, membre du bureau communautaire. • Yannick Pons

« On a vendu 22 biens depuis le début du mandat »

La ville de Nîmes met régulièrement en vente les biens dont elle n’a plus besoin. Cela peut être des hôtels particuliers comme des biens mineurs en mauvais état.

Vous préférez un studio d’une trentaine de m2 à 205 698 € ? Ou un T4 d’une centaine de m2 à 643 655 € ? Vianova propose des appartements neufs à Nîmes à la « maison Saint-Castor ». Le 14 février, il y en avait encore 9 disponibles. Le site ne fournit pas de photos, juste des plans. Il précise que le dispositif fiscal applicable sur ce programme est celui des Monuments historiques. Cette « maison Saint-Castor » est un ancien presbytère. Elle est nichée à côté de la boutique de café Nadal, dans une ruelle sombre, derrière la cathédrale de Nîmes. Sa façade est bien fatiguée mais des reliures travaillées ornent les fenêtres. La lourde porte d’entrée est encadrée de colonnes. Pas de bruit, pas d’échafaudage, on distingue juste un permis de construire daté de février 2023 affiché sur une porte rouge délavée. La livraison est prévue au quatrième trimestre 2026. Cet immeuble a été vendu par la Ville en février 2022 pour la somme de 830 000 € à la société Conserto immobilier pour qu’elle y aménage 10 appartements.

L'hôtel de Boudon rue de Bernis comprend des appartements et un espace culturel au rez-de-chaussée. Il se situe dans l'Ecusson nîmois.  • Sabrina Ranvier

Hôtel de Boudon

Un peu plus loin, la façade jaune ocre de l’hôtel de Boudon éclaire la rue. Les vitres n’ont pas encore été astiquées mais une dizaine de sonnettes flambant neuves ont été installées. Le lieu culturel au rez-de-chaussée a déjà organisé des évènements comme une rencontre avec un compositeur lors du festival des Volques le 7 décembre. Cet hôtel particulier, classé Monument historique, a été acheté par le groupe François 1er immobilier en novembre 2019. Son prix : 1,26 M€. Pourquoi la ville a-t-elle vendu ces deux biens ? « Nous n’avions pas d’activité dessus et, dans le cadre de nos missions de service public, nous n’en avions pas la nécessité. On les a vendus plutôt que de les laisser tomber en désuétude », répond Julien Plantier.

Un cadenas bloque la porte du 6 rue porte d’Alès. Des affiches du syndicat Solidaires annonçant une manifestation contre la réforme des retraites est encore placardée sur la porte. Une promesse d’achat à 650 000 € a été signée en décembre avec un opérateur spécialisé dans la réhabilitation des immeubles anciens. Il compte y réaliser des logements et des locaux professionnels.

Cette promesse d’achat a été signée lors de la 14e session de vente de bâtiments municipaux.

« Les collectivités territoriales sont propriétaires d’un certain nombre de biens en lien avec leur mission de service public. Dans un souci d’optimisation financière et quand elle n’a plus vocation à les utiliser, la collectivité les met en vente », explique Julien Plantier. France domaine les estime et fixe une valeur vénale. Un appel à projets est ensuite lancé sur le site de la ville « pour que le plus grand nombre puisse faire une offre financière ».

« On signe en fonction de l’offre et du projet », résume Julien Plantier. On trouve toutes sortes de biens, pas uniquement des biens remarquables. La base de loisirs de Collias, inutilisée et inutilisable depuis les inondations de septembre 2002, a par exemple été cédée en novembre 2018 pour 155 000 € aux kayakistes de Passion Aventure. Plus récemment, en octobre 2021, la Ville a cédé le Cube, dans la zone artisanale de Valdegour. Ce bâtiment ayant 514 m2 de locaux sur une parcelle de 2118 m2 a été vendu 200 000 € à l’association Humanîmes. Elle y propose du soutien scolaire, de l’accueil de loisirs…

Il n’y a, pour l’instant, aucun bien en vente sur le site de la ville. D’autres trésors seront-ils proposés à la vente cette année ? La Ville possède encore dans son escarcelle différents biens inutilisés comme la tour BRL ou l’hôtel Séguier et la maison de l’avocat du pauvre, tous deux classés Monuments historiques. « Nous n’avons pas la volonté de vendre maison de l'avocat du pauvre, assure Julien Plantier. Nous avons prévu de la réhabiliter mais vu le contexte financier, on ne pourra pas le faire dans ce mandat ».

Sabrina Ranvier

Focus

Deux hôtels de luxe à la place de la CCI

Interdiction d’entrer dans l’ancien siège de la CCI, rue de la République. Du portail, on aperçoit des sacs de gravats dans la cour. Deux établissements haut de gamme, un quatre étoiles et un cinq étoiles, devraient ouvrir en 2025 à la place de l’ancien siège de la CCI, rue de la république à Nîmes. Ces hôtels qui jouxteront le futur Palais des Congrès seront gérés par le groupe hôtelier Sowell Hôtels & Résidences. La Ville a vendu cet ensemble immobilier de plus de 3 000 m2, le 27 novembre, à la société Nîmes République Investissement pour 6 M€.

Ce bâtiment dont la façade et les fresques décorant les salles des commissions sont classées, sert de siège à la CCI de Nîmes à partir de 1936. En 2018, les dirigeants de la chambre consulaire le vendent, ainsi que le parking attenant, à la ville de Nîmes pour 5,2 M€. « C’était une vraie passoire thermique. Cela aurait nécessité des millions d’euros de travaux pour être conforme aux normes. L’entretien était extrêmement coûteux », pointe Éric Giraudier. Le président de la CCI explique avoir aussi vendu ce bâtiment pour des raisons de fonctionnalité. La CCI construit un siège le long du boulevard Allende, sur le périphérique nîmois. « En 1936, quand les chefs d’entreprises décident d’installer l’hôtel consulaire rue de la République, c’est la rue la plus commerçante et la plus passante. Aujourd’hui, on se met sur le boulevard le plus passant », argumente-t-il. La CCI est aujourd’hui départementale. Il considère donc que cette nouvelle localisation, hors du centre-ville, sera plus facile d’accès pour les chefs d’entreprise venant du reste du département. La CCI a également vendu quatre autres bâtiments localisés sur le parc Georges-Besse. « Wiener » a par exemple été cédé pour 810 000 € à Tissot tandis qu’ « Innovation II » a été vendu pour 950 000 € à l’entreprise Phytocontrol. « On avait certains bâtiments qui nécessitaient beaucoup d’entretien. Nous avons procédé à une gestion stratégique de nos actifs immobiliers pour reconstruire un siège qui va pouvoir nous projeter dans 30 à 40 ans ». Il précise que ces cessions ne sont pas faites ni « pour thésauriser », ni « pour combler une dette » : « Ce sont des biens qui étaient en train de se dévaloriser. C’est de l’investissement. Environ 95 % des marchés pour la construction de la Maison de l’entreprise ont été remportés par des entreprises gardoises ». Une autre vente est en suspens : celle de l’aérodrome de Deaux. La CCI a lancé un appel à projets en 2022. Qui sera choisi ? Mystère. Éric Giraudier assure que la CCI va communiquer sur la vente de cet équipement d’ici « quelques semaines ».

Sabrina Ranvier

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