ÉDITORIAL Mort de Nahel : l'immense défi d'Emmanuel Macron
On aurait aimé proposer le dernier éditorial de la saison en évoquant l'été dans le Gard et les festivités qui vont avec. Malheureusement, comme souvent, l'actualité nous rattrape.
Comment ne pas parler de la mort de Nahel, ce jeune de 17 ans, à Nanterre ? Les circonstances de ce drame devront être expliquées, décortiquées et surtout jugées. Mais ce qui s'est déroulé et les conséquences désormais dans le pays ressemblent tristement aux phénomènes observés il y a à peine quelques années dans l'Amérique de Donald Trump. Dans les heures qui ont suivi la mort du jeune garçon, la version des faits des forces de l’ordre a été nuancée après la diffusion d'une vidéo filmée par un témoin, partagée sur les réseaux sociaux. Ainsi comme aux États-Unis, en 2020, la mort de George Floyd, tué en pleine rue par un policier, filmée par un témoin, avait mis le feu aux poudres et provoqué le mouvement Black Lives Matter traduit par « les vies noires comptent » ou « la vie des Noirs compte ». En France, en 2023, délinquant de la route ou pas, récidiviste ou pas, refus d'obtempérer ou non, personne ne mérite de mourir. Certainement pas un adolescent. Et on a envie de dire, encore moins sous une balle tirée par la police républicaine. Mais dans cette si triste histoire comme d'autres avant, ce n'est pas la police qui en cause. Certainement pas. L'exceptionnel ne peut remplacer les femmes et les hommes qui nous protègent au quotidien. Sans distinction. Non, ce terrible évènement démontre si cela était encore nécessaire, le niveau de violence inédit et le ressentit qui prédominent dans la société française. Comment en est-on arrivé là ? Plusieurs facteurs l'expliquent. D'abord, poussé par l'extrême-droitisation du débat politique et des chaînes d'information en continu qui mitraillent nos pupilles toute la journée, l'exécutif est mis sous la contrainte de l'immédiateté. Il fait preuve de moins de discernement et de lucidité que les gouvernements précédents. Et met sous pression de plus en plus forte les forces policières mal considérées, et sous cloche d'une politique répressive axée uniquement sur le maintien de l'ordre. Au final, cela empêche toute imagination. Une responsabilité portée par Emmanuel Macron le premier, qui n'a pas trahi seulement François Hollande, mais aussi les valeurs portées par ses anciens amis en 1997. Et la doctrine qui avait montré des résultats avant que son nouveau mentor, Nicolas Sarkozy, la supprime : la police de proximité. Mise en place sous le gouvernement du Premier ministre Lionel Jospin, elle copiait le modèle anglais : le community policing. Avec l'ambition de renouer le lien entre les forces de l'ordre et la population, par la prévention et la participation active. Trente ans plus tard, le jeune locataire de l'Élysée a pris un sacré coup de vieux. Et reste inexorablement muet face à l'immense défi devant lui. Une partie de la jeunesse de notre beau pays qui ne croit pas ou plus à nos institutions et nos forces républicaines. Doit-on attendre 2027 ?
L'éditorial chaque matin à 6 heures prend ses quartiers d'été. Retour de votre chronique quotidienne le lundi 28 août 2023.