Publié il y a 1 an - Mise à jour le 07.12.2022 - Corentin Migoule - 8 min  - vu 1537 fois

INTERVIEW Philippe Mallaroni, manager général de l'OAC : "Cette sanction est très éloignée de la réalité"

Mallaroni

Faire appel ou non, Philippe Mallaroni n'a pas encore tranché. (Photo Corentin Migoule)

"Las", "désabusé", Philippe Mallaroni a accueilli la sanction de la direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) (relire ici) comme un véritable coup de massue. Mais après une nuit agitée et alors qu'il est ce mercredi à Millau (Aveyron) pour des obligations relatives à ses autres fonctions professionnelles, le manager général de l'OAC s'est voulu rassurant dans une interview fleuve consacrée à Objectif Gard. À première vue, et alors que la direction oacienne n'a pas encore reçu de courrier officiel du gendarme financier du football, le bât blesse en ce qui a trait aux techniques d'enregistrement des subventions publiques.

Objectif Gard : Dans quel état d'esprit vous êtes-vous rendu à cette audition de la DNCG ce mardi ?

Philippe Mallaroni : Quand on monte à Paris ce mardi, j'y vais serein avec l'expert comptable du club. D'autant que le commissaire aux comptes avait adressé un courrier certifiant la régularité des comptes et des procédures. J'avais quand même une petite angoisse comme c'est le cas dès lors qu'on passe devant une instance nationale et compte tenu de ce qui s'était passé en juin (relire ici). Il y a une part de découverte, mais finalement pas tant que ça. Lorsque nous étions en National 3, on passait chaque année devant la direction régionale du contrôle de gestion. Je pensais que les procédures de la DRCG n'étaient pas à l'opposé des procédures de la DNCG. Quand on te dit "ok" d'un côté, la même juridiction, fut-elle nationale, ne peut pas te dire "non" de l'autre côté. Ce n'est pas possible ça ! Lors de l'assemblée générale (prévue ce mardi 13 décembre, Ndlr), vous verrez qu'on a un exercice comptable 2021/2022 parfaitement équilibré avec un excédent de l'ordre de 664 euros. Même si c'est anecdotique, ça souligne que les comptes sont équilibrés et qu'on maintient des fonds associatifs positifs. On est montés à Paris avec ça. Ce ne sont pas les comptes de Philippe Mallaroni qui fait sa comptabilité d'épicier. On est aux antipodes de ça, et ce depuis plusieurs années. Les techniques d'enregistrement de subventions publiques, on les pratique depuis plusieurs années. On était sur des habitudes comptables, sur une sorte de continuité. D'où ma surprise. J'ai eu l'impression de subir une attaque en règle autour de ce sujet-là.

Mallaroni
Faire appel ou non, Philippe Mallaroni n'a pas encore tranché. (Photo Corentin Migoule)

À l'issue de cet échange avec la DNCG, quel était votre sentiment ? Aviez-vous la certitude d'être sanctionné ?

Quand je suis sorti de là, j'ai compris que ça n'allait pas très bien se passer car les échanges ont été plutôt tendus. Ça a duré une heure et demie. La sanction m'étonne sans m'étonner car à la sortie j'avais même tablé sur une sanction sportive de six points. 

Un retrait de cinq points, c'est une sanction colossale. Celle-ci aurait pu être symbolique, de l'ordre de un ou deux points. Cela laisse presque entendre qu'il y a un trou béant dans les caisses du club...

À l'heure à laquelle on parle (ce mercredi 7 décembre en fin de matinée, Ndlr), je n'ai pas reçu les motifs relatifs à ces sanctions. Mais un retrait de cinq points, ça me donne le sentiment que la DNCG me dit "Monsieur Mallaroni, vous êtes un voleur. Vous avez essayé de falsifier des comptes." Ce n'est pas une sanction mineure. On n'est visiblement pas sur la même longueur d'ondes sur les techniques d'enregistrement des subventions publiques. Ça veut dire qu'au fond, on est dans une logique où on va nous fabriquer un déficit. Et après on nous dit qu'on a tenté de cacher ce déficit. J'ai le sentiment qu'on nous fait comprendre qu'en National 2, on est rentrés dans une sorte de cour des grands et qu'il va falloir appliquer une nouvelle logique comptable. 

"Les salariés sont tous payés en temps et en heure"

Allez-vous faire appel de la décision en première instance de la DNCG ?

On attend d'abord de recevoir les documents officiels. À compter de la réception, on aura sept jours pour faire appel. C'est vite vu. J'aime être efficace. Bien sûr qu'on peut toujours contester, mais je ne veux pas perdre de l'énergie à me battre pour être au final le pot de terre contre le pot de fer. Je veux me battre aussi sportivement. On nous dit qu'on nous met un handicap. Ok, je continue !

Que faut-il en conclure ?

Je ne dis pas qu'on ne fera pas appel. Mais je préfère passer mon énergie à chercher des partenaires. On verra en fonction des motifs avancés par la DNCG. On prend cinq points de pénalité. Mais on n'en avait pas 50 non plus. Ces points sont précieux. ll y a vraiment un challenge sportif. On a cinq points. On est derniers. Mais on doit relever la tête. Canet a pris trois points de pénalité et a gagné à Grasse la semaine d'après. Dernièrement, notre équipe a présenté du mieux. On doit se battre encore. 

La hausse considérable du budget, passé de 800 000 euros à 1,4M€, n'a-t-elle pas effrayé la DNCG ?

Non, pas du tout. Je ne peux pas l'imaginer une seconde. À l'OAC, les salariés sont tous payés en temps et en heure. Certains joueurs sont dans leur troisième saison. On est passés par des années Covid et le club a toujours fait les efforts pour respecter ses engagements. On n'a aucune dette. Tous les fournisseurs sont payés. Cette sanction qui laisse presque apparaître un naufrage comptable est très éloignée de la réalité. il n'y a pas d'éléments inquiétants qui remettent en doute notre projet. 

"On est sur une sorte de Monopoly du football"

Êtes-vous en mesure de certifier que l'arrivée d'un nouvel entraîneur début novembre, suivie du recrutement d'un nouveau joueur (Maël Zogba) n'ont pas affecté les finances du club ? Autrement dit, n'avez-vous pas eu "la folie des grandeurs" ?

Cela n'a eu aucun impact. Rien, rien. À Paris, quand tu mentionnes ça à la DNCG, c'est des broutilles. D'autant qu'il n'y a pas eu de litige concernant la démission de l'entraîneur. Ça n'a rien à voir avec ça. Il n'y a pas de folie des grandeurs dans la mesure où, aujourd'hui, pour évoluer en National 2, tu es condamné à avoir un gros budget. C'est un peu ce que j'avais dit aux supporters au moment de la polémique des places à 10 euros (relire ici). Au final on a 20 supporters qui ont pris des abonnements. Je ne fais le procès de personne, mais je suis sur du factuel. En France, tout le monde parle du football. On est sur une sorte de "Monopoly du football". Tout le monde dit "il faudrait un nouveau n°9, tel joueur est libre il faudrait le recruter". Sauf que tout ça c'est des sous. Aujourd'hui, le football coûte cher. L'OAC aujourd'hui, le coût de fonctionnement c'est 4 000 euros par jour. On n'est pas le PSG ! Quand je vois les clubs du sud qui sont en difficulté, ça ne m'étonne pas. Il y a Canet, Sète et nous. Béziers l'an dernier a été rétrogradé. Tous les clubs de N2 qui évoluent en Occitanie sont en difficulté.

Quelle est votre hypothèse à ce sujet ?

C'est un constat que je fais. Les clubs du sud, notamment ceux de la côte ouest, sont en difficulté. En Occitanie, je sens que les clubs d'entreprises ne sont pas aussi présents qu'ailleurs, à Hyères ou à Fréjus par exemple. La question que je me pose, c'est "est-ce qu'au fond on a ici l'environnement économique qui a envie de s'investir dans le sport ?" Je ne sais pas. Peut-être qu'au fond, c'est une chimère que je poursuis. 

N'y aurait-il pas un lien de cause à effet entre la pandémie et la difficulté pour les entreprises locales de s'investir dans le milieu associatif et/ou sportif ?

Je n'en suis pas sûr. Ce sont des excuses. Les années Covid touchent la France entière. Que la situation soit un peu plus difficile, je l'entends, mais quand le club est passé de National 3 à National 2, je n'ai pas senti un engouement économique tel que des entreprises se fédèrent autour de notre projet. Aujourd'hui, on a la chance d'avoir un président qui s'appelle Didier Bilange et qui est le président-fondateur de Jubil Intérim. Sans lui, il n'y a pas d'Olympique d'Alès. C'est parce qu'il répond massivement présent qu'on est en National 2. À mon sens, il est un peu seul. Et quand je dis un peu seul, c'est un euphémisme. J'ai l'impression que les gens sont dans l'attente. "On attend de monter en National 1, on attend de monter en Ligue 2." Je trouve qu'il y a beaucoup de passagers clandestins. Mais c'est ça un peu partout. Cette saison, on va dans des stades où c'est quasiment le désert. On peut se poser la question en se demandant quel est au fond l'intérêt de mobiliser toute cette énergie pour satisfaire 50 personnes en tribunes.

"De fortes chances que le match se joue à Uzès"

Puisqu'un malheur n'arrive jamais seul, les retrouvailles avec Pibarot qui devaient avoir lieu ce samedi 10 décembre semblent en voie d'être repoussées (relire ici). Quelles sont les dernières nouvelles au sujet de l'homologation du stade ?

Depuis qu'on est en National 2, les installations doivent répondre à certain nombre de critères, notamment des critères qui impliquaient des aménagements au stade, dont l'extension des vestiaires visiteurs et l'installation de plusieurs barrières de protection. La mairie a fait le nécéssaire pour respecter ces critères et, dès fin octobre, elle a adressé un courrier à la "3F" en l'informant qu'elle attendait sa visite. La pelouse n'a rien à voir avec ça. La pelouse c'est juste un "plus" pour le jeu, pas pour le respect des critères. Les inspecteurs de la FFF doivent venir inspecter les installations. Ils viennent, font un rapport qui est envoyé à Paris et ça passe par une commission d'homologation. Ce n'est pas je visite à 14 heures et à 16 heures je te dis c'est bon.

C'est la raison pour laquelle cette visite aurait dû avoir lieu en début de semaine...

C'est ça ! Cela dit, on se rend compte que quand il s'agit de nous enlever cinq points, ils ne mettent pas dix demi-journées. Pour homologuer le stade, il faut des journées et des journées. Pour t'enlever des points, tu sors du rendez-vous à 13 heures, à 16 heures c'est enlevé ! Sur le dossier de l'homologation, l'OAC n'a pas son mot à dire. Le stade étant municipal, c'est la collectivité qui est en contact avec la FFF. On n'est pas à l'abri d'une bonne surprise d'ici ce soir, mais on est déjà mercredi. Il y a de fortes chances que le match se joue à Uzès. Je remercie d'ailleurs le club d'Uzès qui a pris ses dispositions pour se mettre en capacité de nous accueillir au dernier moment, alors que le match contre Toulon aurait dû être le dernier à Louis-Pautex.

Une question relative à l'horaire du match qui ne fait pas l'unanimité auprès des supporters, compte tenu de sa proximité avec le quart de finale de l'Équipe de France. Pourquoi ne pas l'avoir déplacé ?

On est sur des horaires imposés par la FFF, à savoir un match le samedi à 18 heures. L'idéal aurait été de jouer à 15 heures. À 17 heures tout le monde sortait pour aller voir l'Équipe de France.

L'avez-vous proposé au club de Canet RFC ?

Je vais en discuter, voir si c'est possible ou non. Mais aujourd'hui, je suis plus préoccupé par l'avenir de l'OAC et son passage devant la DNCG que de savoir si on s'est mis en conformité avec le match des Bleus. Je hiérarchise les priorités. Je suis un farouche partisan de l'Équipe de France, c'est clair et net. Mais j'ai avant tout une grosse pensée pour l'OAC. Après on va me dire "oui mais en jouant à 15 heures, on pourrait être 5 000 au stade". J'ai toujours l'impression qu'on me dit "c'est dommage, vous passez à côté de quelque chose. À 15 heures vous seriez 5 000, mais à 18 heures on sera 30". On a toujours l'impression de faire le mauvais choix, alors que je ne suis pas sûr qu'il y aurait eu plus ou moins de supporters. On n'a aucune certitude. 

Ces différents obstacles qui s'accumulent ne vous affectent-ils pas au point de penser parfois à renoncer ?

C'est dur sportivement, c'est dur cet environnement, ce n'est peut-être qu'un passage. Cette année, oui c'est un peu difficile. Et alors ? Le Général De Gaulle disait que "la difficulté attire l'homme de caractère". Je suis un homme de caractère !

Le match OAC-Canet officialisé à Pautex !

Après la parution de cet article, le club a finalement officialisé la tenue du match opposant ce samedi soir l'OAC à Canet RFC à Louis-Pautex (Uzès). "N'ayant toujours aucune certitude sur la date de visite des membres de la FFF pour l'homologation de la pelouse, une décision devait être prise afin de recevoir dans des conditions correctes notre adversaire", informe la direction oacienne.

Corentin Migoule

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