ÉDITORIAL De la présomption d'innocence à la présomption de culpabilité
Pas de mise en examen, pas de preuves suffisantes à ce stade. Mais pourtant, le tribunal sans s'être réuni pour juger a déjà condamné. Pas la juridiction classique. Le tribunal médiatique et les réseaux sociaux. La présomption d'innocence ainsi bafouée. Et pourtant, il s'agit d'un principe fondamental qui fait reposer sur l’accusation la charge de rapporter la preuve de la culpabilité d’un prévenu. Garanti par de multiples textes et en premier lieu la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et la Convention européenne des droits de l’homme. Il demeure en tête du code de procédure pénale. La loi est très claire : en l'absence de démonstration probante par l’accusation de sa culpabilité, le doute devra nécessairement lui profiter. On ne peut franchement pas dire que ce soit le cas pour deux personnalités locales qui font la une des journaux ces derniers jours. L'une, star de l'information à la télévision et à la radio. L'autre, bien connu du monde de la tauromachie. Il n'est bien entendu pas question ici de les déclarer innocents. S'ils sont jugés responsables d'actes répréhensibles, ils devront rendre des comptes et être condamnés. Mais en attendant, ils ne sont pas encore coupables. Un fondement pas seulement pour eux. Pour nous, bien entendu. Car notre démocratie, notre justice tient le coup parce que les remparts, les garde-fous sont là pour protéger contre les dérives d'une société qui jette aux loups n'importe qui pour n'importe quoi sans apporter l'évidence. D'ailleurs, dans l'histoire l'un a déjà perdu son travail. Sans compter l'image dévastatrice qui va poursuivre les deux hommes pendant longtemps. De la présomption d'innocence à la présomption de culpabilité. Le cap semble déjà franchi.
Abdel Samari