FAIT DU JOUR La présidente de l’AFM-Téléthon : « La recherche sur les maladies rares concerne tout le monde »
La présidente nationale de l’AFM-Téléthon Laurence Tiennot-Herment était au Pont du Gard ce samedi à l’occasion du lancement régional du Téléthon 2021. L’occasion de faire le point sur cette 35e édition qui sera particulière pour le Gard, mais aussi sur la recherche.
Depuis l’année dernière, le Pont du Gard accueille le lancement du Téléthon, avec une journée d’animations pour la bonne cause. Ce samedi, une trentaine de producteurs locaux et une quinzaine d’associations étaient présents pour collecter des dons, bien avant les 30 heures de direct invitant à composer le 36 37.
Des dons importants : Laurence Tiennot-Herment rappelle que la mobilisation pour la recherche sur les maladies rares a fait bouger les lignes et continue à le faire. Interview.
Objectif Gard : Quel a été l’impact du Téléthon depuis sa création en 1987 ?
Laurence Tiennot-Herment : La success story du Téléthon est tellement importante et impressionnante qu’il est difficile de la résumer. En 1987, j’avais un fils unique touché par la myopathie de Duchêne, et à l’époque, quand on nous annonçait ce diagnostic, on nous disait qu’il n’y avait pas de recherche, encore moins de médicament et très peu de médecins spécialisés. Et à l’époque, on connaissait très peu de gènes à l’origine de ces 7 000 maladies rares, réparties dans 23 groupes différents, avec les maladies de peau, des muscles, neuro-dégénératives ou encore de la vue, qui sont à 80 % d’origine génétique.
Et aujourd’hui ?
Aujourd’hui, il y a 4 000 gènes identifiés, ce sont autant de maladies sur lesquelles on est capables de mettre un nom, c’est important et c’est souvent un début de solution, nous avons des consultations pluridisciplinaires médicales dans différents CHU, avec des experts en capacité de mettre en place des prises en charge adaptées. Aujourd’hui, ce sont entre quinze et vingt ans d’espérance de vie gagnés pour les personnes touchées par des maladies rares. Ces maladies sont devenues un enjeu de santé publique, nous avons fait en sorte que les pouvoirs publics mettent des moyens car il y a trente ans la recherche dépendait uniquement du Téléthon. Depuis 2005, des moyens publics sont mis, même s’ils sont insuffisants. Nous sommes passés d’un désert scientifique à des thérapies nées dans les laboratoires du Téléthon, et pas seulement au stade des essais, certaines sont sur le marché pour vaincre les maladies.
Les petits ambassadeurs de cette édition, Victoire et Jules, en sont des exemples.
Le petit Jules, 5 ans, atteint de myopathie myotubulaire, a été traité en janvier 2020 avec un candidat médicament né au Généthon (le laboratoire de l’association, basé à Évry, dans l’Essonne, ndlr). Il recouvre régulièrement des forces alors qu’il ne pouvait plus bouger du tout. Aujourd’hui il peut s’asseoir, se tenir debout et n’a plus besoin de son assistance respiratoire. On vit une période extraordinaire, les découvertes se sont accélérées et il y a un effet boule de neige sur les cinq dernières années. Avec les moyens du Téléthon, on a permis à à peu près 10 % des 7 000 maladies rares d’avoir des traitements, pas tous curatifs, mais c’est assez extraordinaire, car 35 ans, c’est un temps court pour la recherche.
Ces avancées scientifiques servent-elles aussi hors du champ des maladies rares ?
Aujourd’hui dans le monde, il y a 17 médicaments de thérapie génique, ils sont très innovants et très difficiles à produire, et cette innovation médicale révolutionne la médecine tout entière. Certains médicaments contre le cancer sont issus des techniques employées sur les thérapies géniques, la recherche sur l’ARN messager, utilisée dans les vaccins contre le covid, a été développée aussi dans le cadre des maladies rares, il y a des passerelles. Le Téléthon, ce n’est pas que pour les myopathes, la recherche sur les maladies rares concerne tout le monde.
Pour le grand public, le Téléthon est aussi et peut-être avant tout un événement, durement touché par le covid l’année dernière. Quel a été l’impact sur cette édition ?
2020 a été très compliquée pour nous sur le terrain, où se fait 40 % de la collecte. Sur un Téléthon classique, qui collecte autour de 90 millions d’euros, le terrain représente donc 36 millions. L’an dernier, il a représenté 12 millions. Nous n’étions pas qu’en période de covid, nous étions aussi confinés et le moral n’y était pas. En revanche, les dons par Internet ont augmenté en passant de 22 à 30 millions d’euros. Ça ne compense pas tout, nous avions collecté 87 millions d’euros en 2019, et 77 en 2020. On espère que cette année on aura un territoire remobilisé, tout le monde a envie de ça, le Téléthon c’est un esprit de fête, de convivialité, de lien social. Les familles concernées attendent aussi ce moment avec beaucoup d’impatience, car il est porteur d’espoir et de joie, et on se sent plus fort quand on est soutenu par la population.
Outre la recherche, l’AFM Téléthon accompagne les familles. Dans quelle mesure ?
Nous avons 170 salariés dans des services régionaux pour aider, accompagner les familles dans la vie quotidienne. Nous avons 12 référents en Occitanie pour répondre aux demandes des malades et des familles. Ils ont eu une lourde tâche dans la période de covid, car le confinement a été une double peine pour les malades, et il y avait en plus une angoisse, nous avons mis en place des astreintes médicales et psychologiques 24/24h. C’est une mobilisation 365 jours par an.
Pour en revenir à l’événement Téléthon, le Gard joue un rôle important cette année, entre le lancement régional au Pont du Gard et la « ville lumière » Nîmes.
Le Téléthon sur le territoire ce sont 10 à 12 000 communes sur 35 000, avec plus de 250 000 bénévoles durant quelques semaines, et 3 000 bénévoles permanents. Cette année, le thème est « lumière sur le Téléthon », et nous avons une initiative autour du fait de rendre lumineuse chaque lettre du Téléthon, avec une ville par lettre. Nîmes sera ville lumière pour le N du Téléthon 2021, avec un grand nombre d’animations déployées sur le parvis des arènes. Les villes lumière seront le fil rouge de l’émission sur France télévisions.
Propos recueillis par Thierry Allard