JOBS D'ÉTÉ À Bagnols/Cèze, les futurs surveillants de baignade se forment
Le temps d’un été, découvrez ces métiers en plein boom à cette période de l’année. Ce nouveau volet de cette série vous emmène à la piscine municipale Guy-Coutel de Bagnols/Cèze. Pendant sept semaines, 16 jeunes et moins jeunes apprennent les rudiments de la sécurité et du sauvetage aquatique en vue de passer leur brevet national le 30 août.
10h30 à la piscine Guy-Coutel de Bagnols/Cèze. Le ciel est bleu. La température du grand bassin affiche 26 degrés. Le temps idéal pour se détendre et effectuer quelques longueurs. Mais c'est un programme bien plus physique qui attend les 16 élèves en formation au BNSSA (brevet national de la sécurité et du sauvetage aquatique).
Sur la margelle, Erwan Hamon scande les consignes des exercices : "Chacun va tracter l'autre sur 50m, dans la bonne position. Ensuite, vous inversez." Arriver à déplacer une personne dans l'eau fait partie des acquis évalués lors de l'examen final. "Il faut une bonne prise sous les bras, la tête posée sur l'épaule. Le mieux est de coller sa tête à celle de l'autre. Si jamais vous prenez l'eau, ça veut dire que lui aussi", explique le maître-nageur-sauveteur bagnolais.
Lui a toujours été à l'aise dans les bassins. Il nage depuis qu'il a six ans et a fait de la compétition jusqu'à sa majorité. À 16 ans, il a même participé aux championnats de France. Sa carrière naissante s'est arrêtée quand il a intégré l'armée. Après avoir été sous-officier adjoint d'un peloton de combat, il est finalement retourné à ses premières amours : la natation. Il a passé son BPJEPS AAN (brevet professionnel activités aquatiques et natation). Aujourd'hui, Erwan Hamon intervient dans plusieurs structures et notamment à 16/30 formation à Bagnols.
Une formation avec de l'emploi derrière
C'est ce centre de formation du Gard rhodanien qui a lancé pour la première fois cet été cette préparation au BNSSA. "C'était un pari au démarrage. On a établi une collaboration entre nous, la mairie de Bagnols/Cèze et la FNMNS (Fédération nationale des métiers de la natation et du sport, ndlr), après un an et demi de discussion", rapporte Didier Hamon, développeur à 16/30 formation.
Pendant sept semaines, la quinzaine d'inscrits va suivre une formation avant l'examen officiel prévu le 30 août. Trois jours y sont consacrés chaque semaine (lundi, mercredi et vendredi). La matinée commence à 9h en classe pour étudier la réglementation. Elle se poursuit dans le bassin olympique de Guy-Coutel(*) de 10h30 à 12h30. Fin août, toute une semaine sera aussi consacrée à l'apprentissage des gestes de premier secours : comment faire face à un arrêt cardiaque, à une obstruction des voies aériennes et surtout apprendre à travailler en équipe.
Avec le BNSSA en poche, les diplômés pourront travailler dans les campings, dans les piscines, dans les parcs aquatiques pour faire de la surveillance, de la prévention et assister le maître-nageur. L'été bien sûr, mais aussi toute l'année dans des piscines couvertes. Le BNSSA, c'est aussi un premier palier pour justement accéder au diplôme de maître-nageur qui lui peut donner des cours de natation. "Il y a du boulot. On ne voulait pas organiser une formation où il n'y a pas de besoins. En France, on estime qu'il manque 5 000 maîtres-nageurs", assure Didier Hamon.
Au programme de l'entraînement : tracter des mannequins de 80 kg dans l'eau
À ces postes vacants se conjugue le nombre de noyades en hausse cette année (plus de 300 en un mois cette année en France). Près de 800 000 enfants n'ont pas pu apprendre à nager non plus à cause de la crise sanitaire. Cette nouvelle formation bagnolaise prend donc une dimension encore plus importante dans ce contexte : "L'idée, c'est vraiment de pérenniser. On aimerait proposer une autre session au mois de mars l'année prochaine. Ce sera sûrement dans une piscine couverte à Villeneuve-lez-Avignon ou à Saint-Paul-Trois-Châteaux", poursuit le développeur de 16/30 formation.
Au fond du bassin, à 3,60m, Tom et Jerry se la coulent douce. Il s'agit des surnoms des deux mannequins utilisés pour les exercices. Une fois remplis d'eau, ils pèsent 80 kg chacun, le poids moyen d'un homme. Les élèves, eux, enchaînent les longueurs : avec ou sans palmes, tuba, lunettes, en tractant un mannequin ou un homme, en apnée... "Ils apprennent à faire face aux différentes réactions quand on approche quelqu'un en train de se noyer. Certains vont vous attraper le bras, d'autres se débattre quitte à vous couler pour rester à la surface...", liste Erwan Hamon.
Le 30 août, jour du test, les candidats devront passer cinq épreuves : trois dans l'eau, un QCM et premiers secours. Jérémie et Milo, deux élèves en formation, sont plutôt confiants : "Il faut être un minimum sérieux sur l'entraînement et écouter ce que l'on nous dit. C'est la clé de la réussite." Tous deux interviennent au Rugby club Bagnols-Marcoule et entraînent les -12 ans. Ils ont décidé de passer le BNSSA pour pouvoir accompagner les jeunes lors de sorties en parc aquatique : "Ça évite de payer un maître-nageur. Mais c'est vrai qu'on préfère le terrain de rugby."
Des profils très éclectiques mais une motivation unanime
Dans le groupe, les profils sont très éclectiques, mais tous se rejoignent sur leur grande motivation. Il y a le doyen Éric, 53 ans, qui a oeuvré à la Légion étrangère pendant 15 ans et qui entame une reconversion dans le social comme assistant d'éducation à l'Éducation nationale. Il a besoin de ce formation pour encadrer des jeunes en réinsertion ou des primo-délinquants. Louis, lui, a 27 ans et est américain. Pendant des années, il a exercé comme sauveteur en mer à Miami, avant d'arriver il y a cinq ans à Nîmes à la Légion étrangère d'infanterie. Il a déjà un très bon niveau dans l'eau mais doit repasser le diplôme français car celui qu'il détient d'Amérique n'a pas d'équivalence.
Emma, 25 ans, est la seule femme du groupe. Elle travaille auprès de personnes en situation de handicap en structures et propose des activités physiques adaptées. "Avec le BNSSA, je pourrai dès l'année prochaine accompagner les jeunes à la rivière. Certains ne se sont jamais baignés à la mer ou à la rivière." Malgré son petit gabarit, la jeune femme est logée à la même enseigne que les hommes et tracte les mêmes poids dans l'eau. "Mais bon, si je dois sauver quelqu'un, je ne regarderai pas si c'est un garçon ou une fille", philosophe-t-elle. La séance du jour se termine sous le soleil bagnolais. Le rendez-vous est donné dans quelques jours pour une nouvelle séance. Toujours avec le sourire, sinon comptez sur le chef pour vous rebooster. Si la formation apprend à sauver des vies, il ne faut pas lésiner sur le lien avec les vacanciers.
Marie Meunier
(*) La piscine de Bagnols-sur-Cèze a été la première de France où a été construit un bassin estival aux dimensions olympiques (50 m de long). Pendant de nombreuses années, l'équipe de France de natation est venue s'y entraîner. Elle y a préparé notamment les Jeux olympiques de Tokyo de 1964. Désormais, la piscine porte le nom de Guy Coutel, un ancien nageur de l'équipe française qui venait ici. Il est décédé brutalement dans un accident de la route alors qu'il se rendait à une compétition.