TRESQUES Comment éviter les crues de la Tave ?
C’est une tranquille petite rivière qui naît dans les confins de l’Uzège, traverse douze communes sur trente kilomètres pour aller se jeter dans la Cèze près du Rhône. Une tranquille petite rivière qui, à chaque épisode pluvio-orageux significatif, sort de son lit et va inonder une partie du village de Tresques.
Un problème qui ne date pas d’hier, et que le syndicat mixte d’Aménagement du Bassin de la Cèze, ABCèze, compte prendre à bras le corps.
L’entonnoir tresquois
Ainsi, le syndicat organisait vendredi après-midi une réunion destinée aux riverains du cours d’eau, « pour que vous puissiez nous faire part de vos préoccupations et essayer de trouver ensemble des solutions », leur lancera le président d’ABCèze Jacky Valy avant de préciser qu’il n’avait pas de « solution miracle. »
Il faut dire que le petit cours d’eau a été très (trop) largement modifié au fil des siècles par l’Homme : curé, recalibré, son lit élargi, des merlons (des buttes de terre) érigés tout comme des remblais divers et des fossés… c’est peu dire que la Tave n’a plus grand chose à voir avec ce qu’elle était initialement. « Aujourd’hui on remarque que souvent le lit de la Tave est surdimensionné et s’est renfoncé, avec des hauteurs de berges conséquentes, que sur certains secteurs les écoulements sont modifiés, avec beaucoup de perte de diversité de milieux aquatiques », note le l’ingénieur d’ABCèze en charge de la problématique inondation Anthony Laurent.
Une situation relevée à partir de l’affluent la Brives, qui atteint son paroxysme à Tresques. « La capacité du lit dans Tresques et bien moins importante qu’en amont, il y a un entonnoir et pas de grand champ d’expansion des crues », poursuit l’ingénieur. Conséquence évidente : lorsque la Tave gonfle, son lit profond et large en amont provoque une crue rapide là où l’eau s’engorge, à Tresques donc.
Un problème loin d’être récent, sur lequel ABCèze travaille depuis 2005. Un travail qui avait abouti à un projet d’aménagement à Tresques, finalement abandonné par l’Etat. Résultat : « nous abandonnons l’objectif de protection des inondations pour aller sur l’amélioration du fonctionnement du cours d’eau, pour limiter les pics de crue », admet Anthony Laurent. En clair : la Tave débordera toujours, mais l’objectif est de limiter les dégâts.
Un plan pour la Tave
Pour ce faire, ABCèze compte recréer « une zone tampon », « limiter l’incision du lit », qui affaisse les berges et accélère la montée des eaux, ou encore supprimer tout ou partie des merlons, pas toujours efficaces et qui font courir un risque de brèches. « Mais je ne dis pas qu’on retrouvera la Tave comme avant, c’est impossible », tempère l’ingénieur. Les modifications importantes opérées sur les cours d’eau sont quasiment irréversibles. « Ça fait près de vingt ans que nous essayons d’améliorer la sécurité aux abords de la Tave, notera le maire Alexandre Pissas. Il y a une avancée significative depuis quelques mois, ABCèze n’avait jamais autant travaillé sur la Tave qu’il le fait actuellement. » Symbole de cette avancée, la destruction d’un muret aux abords du cours d’eau cette semaine, muret qui accentuait les crues de la Tave.
Il faut dire que les obligations légales se font de plus en plus pressantes : la restauration du fonctionnement du cours d’eau doit être effective en 2027, et un Plan de prévention du risque inondation est prévu pour 2018. Alors les choses vont bouger : après la réunion de cette semaine, une étude de faisabilité va être engagée d’ici au printemps prochain. « Nous avons ciblé un tronçon de 9 kilomètres, précise Anthony Laurent. Nous allons choisir un site prioritaire, le plus pertinent, là où nous aurons le plus de gain, et on entrera dans les négociations foncières avec les propriétaires concernés. »
Une enveloppe prévisionnelle de 500 000 euros a d’ores et déjà été fléchée par le syndicat, pour être engagée sur le site défini comme prioritaire dès 2019. En attendant, les propriétaires présents vendredi ont accepté le passage de géomètres experts pour faire des relevés sur les merlons, et ont été consultés sur les solutions qu’ils imaginent. Une est revenue à plusieurs reprises : la construction de bassins de rétentions le long du cours d’eau, qui permettrait de plus de conserver de l’eau pour les périodes de sécheresse. « C’est une vraie politique, répondra Jacky Valy, convaincu. Mais ça coûte très cher. »
Thierry ALLARD