ALÈS Le CNRS écrit le récit du quartier de Rochebelle d'aujourd'hui
Sous la houlette de Flavia Pertuso, du Laboratoire architecture anthropologie du CNRS, une dizaine détudiants en préparation de doctorat et trois professeurs en anthropologie urbaine viennent écouter le quartier, dans sa vie quotidienne. Accroché à un passé minier mythique, Rochebelle possède une histoire contemporaine singulière que ces scientifiques vont tâcher d'extraire, loin de la rubrique faits-divers. Flavia Pertuso, qui s'insère dans le quartier depuis près d'un an, en explique le principe.
Rochebelle, son faubourg, son passé ouvrier et minier, ses difficultés sociales, ses façades délabrées et son renouvellement urbain qui arrive. Dans ce quartier de l'autre rive, le CNRS (centre national de la recherche scientifique) a décidé de brancher ses écouteurs, orienté en cela par Flavia Pertuso, docteure en aménagement et urbanisme, rattachée au laboratoire Architecture et anthropologie, qui traîne ses guêtres depuis une année à Rochebelle.
"Il est impossible de construire un récit du quartier aujourd'hui"
Flavia Pertuso, professeure en anthropologie urbaine au CNRS
"On s'installe pendant une semaine, du 1er au 7 juin, pour habiter le quartier dans sa vie ordinaire", explique Flavia Petuso, qui sera accompagnée de deux professeurs en anthropologie urbaine et dix étudiants en préparation de doctorat. Une action commandée par le Collectif animateurs 30, également à la gestion de la Cantine solidaire. "La question à se poser est : qu'apprend-on de Rochebelle ? Ce quartier donne une impression de tiraillement entre la nostalgie, qui écrase, et un futur qui ne parvient pas à s'élaborer. Par conséquent, il est impossible de construire un récit du quartier aujourd'hui", détaille Flavia Pertuso.
Qui compte énormément, en plus des pérégrinations de ses étudiants, sur le rendez-vous du mardi 4 juin, à la Cantine solidaire de Rochebelle à 18h30, où une discussion est prévue avec les habitants. "J'ai préparé le terrain, dans les derniers mois, pour identifier des associations et des habitants qui pouvaient être une porte d'entrée du quartier. Le 4 juin, on proposera une lecture du quartier dans un échange très ouvert, une hypothèse qui va s'appuyer sur l'outil cartographique. Mais il faut que le récit soit fabriqué avec les gens."
"Les rythmes du quartier sont portés par l'action sociale et ne peuvent pas rentrer dans un tableau Excel"
Flavia Pertuso livre quand même quelques pistes de réflexion. "À Rochebelle, il existe beaucoup d'action sociale, de solidarités formelles et informelles. Que peut-on apprendre de cette frugalité ?" Une question en suspens, qui provient "du discours des acteurs de terrain depuis des années. À nous de produire de la donnée scientifique pour épaissir le discours tenu par les habitants. C'est vraiment un positionnement scientifique, autre que militant", insiste la chercheuse.
"Les rythmes du quartier sont portés par l'action sociale et ne peuvent pas rentrer dans un tableau Excel", constate Flavia Pertuso dans un élan similaire à Nicolas Ferran, directeur de la Clède, qui s'inquiétait sur notre site (à lire ici) de l'entrée du secteur concurrentiel dans l'action sociale. La Clède est d'ailleurs partenaire de l'opération du laboratoire, intéressée par la donnée scientifique contemporaine que le CNRS devrait tirer de sa semaine. Vendredi 7 juin, à 18h30, toujours à la Cantine solidaire, les scientifiques présenteront leurs résultats, sans doute en présence de représentants de la Ville ou d'Alès agglo, qui vont écrire une nouvelle page d'histoire de Rochebelle : "On aimerait bien que cette recherche puisse servir la réflexion du programme de renouvellement urbain", plaide la scientifique.