Philippe Couret est fatigué. Mais heureux. Le responsable de Jazzoparc retient que le festival s'est "bien passé, avec une belle jauge". Si les soirées n'ont pas totalement fait le plein, plus de 5 000 personnes ont arpenté le parc des Cordeliers les vendredi 26 et samedi 27 juillet, sans compter les rendez-vous avant ces deux dates et les stages au cours du festival. 

Une affluence importante mais bien vécue par les spectateurs, de par la transformation scénique effectuée par le festival : en changeant de pelouse, et en inversant la scène, le public a pu danser ou rester assis - y compris dans l'herbe - sans perdre la scène de vue. "On a accueilli les gens de façon plus confortable que l'an dernier", résume Philippe Couret, qui ne reviendra plus sur la configuration du festival dans le parc des Cordeliers. 

"Artistiquement, on est très contents", enchaîne Philippe Couret. Et c'est bien l'essentiel. "L'accueil du public a été formidable et on a de très bons retours de la part des artistes." En passionné de jazz, lui se satisfait d'avoir "dans chaque truc, trouvé quelque chose. Même pendant Fred Wesley, il y a eu de super moments, alors que ce n'est plus le Fred Wesley d'il y 20 ans." À 81 ans, l'artiste a un peu délaissé ses penchants funk pour quelque chose de plus tranquille. 

"Les deux soirées offraient des propositions très différentes. Pour tout dire, poursuit Philippe Couret, je craignais un peu que le groupe du samedi, La-33, puisse choquer les puristes parce qu'on est vraiment sur de la musique salsa." Au final, peu de gens ont fait défection entre Bonga et le final colombien. Et le jazz local, qui achevait les soirées, a dû s'arrêter pour faire sortir le public, à 2h du matin. 

Au final, Jazzoparc réussit son pari de "rassembler tous les âges", avec la gratuité pour les moins de 18 ans. Philippe Couret a reconnu pas mal de locaux dans le public mais aussi, selon les retours qu'il a entendus, pas mal de gens d'Occitanie et même des festivaliers "qui ont parfois enchaîné les deux week-ends", avec Lol & Lalala le week-end suivant.

Depuis 2021, et même si elles ont évolué, les dates des deux festivals sont devenus des moments forts de l'été, pour la municipalité de Geneviève Blanc. Une maire - souvent sollicitée au micro par Guillaume Meurice lors de son passage du samedi matin - ravie de voir l'affluence que ces rendez-vous apportent dans sa ville, en soulignant aussi "qu'on n'est pas sur des festivals qui génèrent des problèmes".

"C'est un peu lourd pour une petite ville comme la nôtre mais c'est de l'investissement"

Geneviève Blanc, maire d'Anduze

La météo et l'annulation du vendredi soir de Lol & Lalala auraient pu créer du mécontentement "mais les artistes et l'organisation ont été à la hauteur, en proposant immédiatement un report. Ils ont une belle agilité et le respect de l'endroit où ils sont", se satisfait Geneviève Blanc, qui note aussi que "les cafés et restaurants de la ville ont finalement profité de l'annulation, puisqu'ils étaient pleins vendredi soir". La commune offre un soutien logistique important sur l'année et une mobilisation des services techniques en amont et pendant les week-ends concernés. "C'est un peu lourd pour une petite ville comme la nôtre mais c'est de l'investissement", résume Geneviève Blanc. 

Après un jeudi sans accroc porté par Arnaud Aymard Thomas VDB, Lol & Lalala a sué de grosses gouttes sous l'orage du vendredi soir. Jusqu'à l'annulation de la soirée, vers 21h30. "On pensait toutes les dix minutes que la pluie allait s'arrêter, rembobine aujourd'hui Pierre-Emmanuel Barré, à l'initiative du festival avec sa compagne GiédRé. Mais, même sous la pluie, le public a été génial : j'en ai vu monter des maisons en tables, pour se protéger de la pluie, d'autres qui ont organisé des contre-soirées sous les arbres. C'était joyeux malgré la pluie battante." Une pluie qui a même nécessité la venue d'un huissier, pour constater officiellement qu'il pleuvait. 

"On a eu beaucoup de chance parce que les artistes ont accepté de jouer le lendemain", poursuit Pierre-Emmanuel Barré. La soirée du vendredi s'est transformée en (véritable) matinée de samedi, à 11h. Avec une incidence sur les petits-déjeuners de tous les habitants d'Anduze qui ont franchi le seuil d'une boulangerie, ce matin-là. "J'ai récupéré 580 viennoiseries dans toutes les boulangeries de la ville et on les a offertes aux premiers arrivés." Avec la crainte "de ne se retrouver qu'à 300" quand 2 000 personnes devaient garnir les pelouses du parc des Cordeliers la veille au soir. Finalement, 1 500 personnes se sont rendues au report sous le soleil, "sortis tous rougis du spectacle, mais avec le sourire aux lèvres". 

Le report pourrait néanmoins avoir une incidence financière, entre demandes de remboursement d'une partie des billets et pertes de recettes au bar. Pierre-Emmanuel Barré est optimiste : "J'ai déjà reçu quelques mails de gens qui ont transformé leurs places en dons pour l'association". Au final, seul Pat Kalla n'aura pas pu donner son concert de clôture du vendredi. "Mais on a eu droit à un concert privé dans les loges".

Et, même si les comptes n'ont pas encore été faits, la mésaventure "riche en émotions" ne remet pas en cause le festival. Ni la fatigue survenue après un démontage partiel jusqu'à 5h30, dimanche matin. "On y trouve tous beaucoup de plaisir, résume Pierre-Emmanuel Barré. Avant que l'énergie baisse, on s'arrêtera." Mais ce n'est pas pour tout de suite, même si l'intéressé exclut que lui ou GiédRé fassent partie de l'affiche, en dehors du rôle de maître de cérémonie. "Faire un festival pour jouer dedans, je trouverais ça assez déplacé." Pour se consoler, Pierre-Emmanuel Barré entame une nouvelle tournée avec un nouveau spectacle, dès le 14 octobre.