FAIT DU JOUR La sénatrice Vivette Lopez : "Je suis quelqu'un d'atypique"
"Moi, je parle avec tout le monde. Je salue tout le monde. Et s'il faut rire avec quelqu'un, qu'il soit de gauche, de droite, je vais même dire d'extrême à droite, ça ne me dérange pas."
Rare dans les médias, la sénatrice Vivette Lopez qui entame la dernière partie de son mandat se confie longuement à Objectif Gard. L'occasion de revenir sur son travail parlementaire, sur l'image de la France à l'international, de ses projets locaux et de son regard sur son ami, le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau ou encore son espérance de voir Jean-Paul Fournier, le maire de Nîmes réussir l'union de sa succession.
Objectif Gard : Vous êtes dans la dernière partie de votre second mandat au Sénat. Quel est votre bilan personnel ?
Vivette Lopez : C'est quelque chose d'extraordinaire, ça m'a permis de rencontrer beaucoup de gens, des gens très intéressants, même si très prenant. Vous parcourez l'ensemble du territoire gardois, au-delà d'être à Paris. Actuellement, je ne suis pas beaucoup sur le terrain, parce que je suis tellement sollicitée sur Paris…
Qu’est-ce qui différencie de votre ancien mandat de maire ?
On touche à tous les domaines. Mais je le dis toujours, pour moi la plus belle fonction a été la fonction de maire, parce que vous œuvrez pour votre village, et quand vous faites quelque chose, vous avez tout de suite la réalisation, alors qu'au Sénat c'est plus long. Cela étant, je n'ai aucun regret d’être sénatrice…
Est-ce que les tensions dans le pays depuis plusieurs mois maintenant finissent par vous désespérer ?
Je trouve ça inadmissible ce qui se déroule à l’Assemblée nationale. La semaine dernière avec presque une bagarre. Je le dis souvent, on a arrêté le cumul de mandats, c’était une erreur. Il y avait peut-être certains qui cumulaient un peu trop. Mais moi, je demanderais avant tout que chaque parlementaire ait une fonction locale ou départementale, pour avoir une bonne connaissance du territoire. Je suis un peu désolée de voir tout ce qu'il se passe. Je me dis comment avons-nous pu en arriver là ? Ça ne devrait pas être possible. Dans notre chambre au Sénat, ce n’est pas plus calme, mais en tout cas, on a l'impression qu'il y a quand même un côté stabilisateur de la vie politique nationale.
Comment vous vivez votre expérience au Sénat ?
Vous le savez, je suis quelqu'un d'atypique. Donc moi, je parle avec tout le monde. Je salue tout le monde. Et s'il faut rire avec quelqu'un, qu'il soit de gauche, de droite, je vais même dire d'extrême à droite, ça ne me dérange pas. Je me dis que nous sommes tous des élus. Ce sont les gens qui nous ont mis en place. Donc, on est tous logés à la même enseigne. Et puis il faut reconnaître que nous avons un président du Sénat, Gérard Larcher, exceptionnel. Il prend toujours le temps de discuter, de faire en sorte que tout se passe bien pour l’ensemble des sénateurs. C’est rare et précieux.
Il y a un de vos collègues qui vous manque un peu quand même au Sénat, c'est Bruno Retailleau, votre ami, qui est désormais devenu ministre de l'Intérieur. Comment vous jugez ses premiers pas ?
Je suis très heureuse pour lui. Je pense qu'il se défend bien alors que la tâche est lourde et rude. On a besoin d’un homme comme lui. Même si vous me permettez, il ne paraissait pas taillé pour le poste au départ. Quand je l'ai vu partir là-bas, je me suis dit « aïe aïe aïe ». Ce n'est quand même pas une armoire à glace, si j'ose dire. Mais je connais ses convictions. Je connais ses valeurs. Et sa sincérité. Vraiment. Et donc, il va faire ce qu'il dit.
Vous avez accompagné le délégué de la mer et de la pêche sur le port du Grau-du-Roi venu soutenir la filière si malmenée des pécheurs…
C'est invraisemblable d'entendre ce que j'ai entendu. Au départ, on leur avait demandé de baisser leurs jours de pêche. On leur demande aujourd'hui de ne pêcher que 140 jours, mais de cotiser toute l'année. Comment c'est possible ? Et dans le même temps, fort justement, les pécheurs disent qu’aucune étude n’a été faite pour savoir si les premières mesures ont porté leurs fruits et si le poisson est revenu.
Les perspectives économiques restent sombres pour le pays dans de nombreux secteurs d'activité...
On va parler du bâtiment, par exemple. Ils ne savent pas à quelle sauce il va être mangée. Les agriculteurs, on leur fait beaucoup de promesses. Et puis finalement, ils ne voient rien venir. Et maintenant, ce gouvernement ne va peut-être pas tenir… C'est pour ça que je vous dis, les gens sont dans cette inquiétude de se dire, que va-t-il se passer ? M. Barnier annonce que ce sera le chaos si le gouvernement tombe, ce qui sera certainement le cas. Ne pas voter un budget, c'est compliqué pour un pays. C'est très grave. Notre pays est quand même en grande difficulté. Même à l'étranger, on n'a pas une belle vision de la France.
L’image de la France est abîmée ? Vraiment ?
Pas un peu. Beaucoup. Quand je fais des déplacements à l’étranger, on se rend bien compte que l’on a perdu aussi de notre influence…
Est-ce la faute d'Emmanuel Macron ?
Les dirigeants étrangers ont senti la France faible à un moment donné. Nous avons fini par laisser la place. Et ça, ils nous le reprochent. Et on va mettre beaucoup de temps à la récupérer.
Vous avez participé avec une délégation de sénatrices à un voyage parlementaire en juin dernier en Arabie Saoudite dans le cadre d’un rapport d’information consacré à ce pays. Qu’est-ce que vous pouvez nous en dire ?
J'étais aux Émirats arabes unis, et j'ai été très surprise par le changement dans le pays. Ce voyage parlementaire avec l’ambition de voir de quelle manière on peut renforcer la coopération. Vous savez, quand je les entends dire qu'en 2030 ce sont eux qui vont avoir l'exposition universelle : ils vont éblouir le monde. C'est vrai que le prince héritier, ses débuts ont été un peu chaotiques. Cependant, nous avons été excessivement bien reçues. Avec le respect de la France. Même si j'ai eu l'impression que c'était presque nous qui devions les écouter. Donc c'est ça qui me chagrine un peu. Et quand je suis arrivée à Paris, je me suis demandé où on était, si on n'était pas au Quart Monde.
L'Arabie Saoudite reste critiquée pour la place accordée aux femmes et aux minorités…
Cela a beaucoup changé. D'ailleurs, le prince héritier a nommé des femmes au Parlement. Beaucoup ne mettent plus le voile. Ces femmes se sont battues pour avoir leur liberté. Aujourd'hui, elles conduisent. Elles ont un carnet de chèques. Un passeport. Elles peuvent divorcer sans aucun souci, si elles veulent. Les droits existent. Ils manquent encore beaucoup de choses bien sûr, mais le pays a avancé…
Parlez-nous de cette belle exposition au Sénat, d'où est venue cette idée ?
C’est Robert Soulier, un habitant d’Aigues-Vives, un passionné de Gaston Doumergue qui m’a soufflé l’idée. Cette année, c'étaient les 100 ans de l'élection de Gaston Doumergue. Premier président de la République à avoir inauguré les Jeux Olympiques. En 1924 précisément, cela faisait 15 jours qu'il était élu, donc il me semblait normal qu'en cette année de Jeux Olympiques en France, on parle de Gaston Doumergue. Qui, par ailleurs, a été sénateur, et président du Sénat…
Elle a été affichée où, cette exposition ?
Dans la bibliothèque du Sénat. Et tous les sénateurs du Gard, de France, de Navarre ont pu aller voir cette exposition. D'ailleurs, l'exposition ne devait rester que 15 jours. Elle a été prolongée. Je voudrais souligner l’aide précieuse des archives départementales et l'ancien sous-préfet, M. Lalanne, qui nous a donné un coup de pouce aussi…
Il y a un autre beau projet que vous menez également, c’est le livre sur les Mariannes du Gard avec l’ancien conseiller départemental Philippe Pécout …
Quand je vais à la rencontre des maires du Gard, on est souvent reçus dans la salle municipale, et on se rend compte qu'il y a des Mariannes partout. Elles sont en plus magnifiques, et puis certaines complètement différentes. Je me suis dit : l’heure est venue d’en faire une exposition. On m’a suggéré de prendre contact avec Philippe Pécout, un amoureux des Mariannes… C'était le cas et nous avons travaillé à ce projet qui devrait être prêt pour 2025. Je voudrais préciser que ce sont des jeunes apprentis photographes de la Chambre de métiers, à laquelle je suis très attachée, qui ont participé à la prise d'images.
Un mot sur le handicap. Un dossier que vous défendez particulièrement au Sénat…
Je suis en effet dans un groupe d'études en charge du handicap. Nous avons travaillé la question de l’insertion des porteurs de handicap dans la ville politique. Parce qu'ils aimeraient pouvoir participer à des élections municipales, départementales, etc. Je crois qu'il y a encore beaucoup de choses à faire sur le handicap. La question de l’indemnisation des élus est aussi un sujet.
Les prochaines municipales auront un impact indirect sur les sénatoriales de septembre 2026. Est-ce que cela vous inquiète ?
Je pense que le paysage politique va changer en 2026. Ce sera une étape importante effectivement pour les sénatoriales de 2026. Dont le Gard qui est directement concerné, puisqu'il y a un renouvellement des sièges.
Le Gard a six députés RN. Combien de villes demain ?
Moi, je vais prendre un exemple, celui de Beaucaire. Julien Sanchez, a été réélu lors du dernier mandat, certainement que les administrés n'étaient pas si mécontents de ça de lui. Il est parti à des aventures européennes. Il a été élu aussi. Quel est le problème ?
Vous avez envie de continuer après 2026 au Sénat ?
On verra, on n'y est pas encore. Et on ne peut jamais prévoir l'avenir. Il y a plein de choses qui peuvent se passer d'ici à 2026. On ne sait pas ce qui va se passer dans six mois. On ne sait même pas ce qui va se passer cette semaine avec la motion de censure. Mais je vais être honnête, la droite apporte une stabilité. On le voit aujourd'hui au Sénat.
La droite nîmoise pourrait perdre la Ville en 2026 si la guerre de succession se poursuit…
J'espère de tout cœur que Jean-Paul (Fournier) fera le nécessaire pour trouver la solution pour que Nîmes reste cette belle ville. Parce qu'on peut dire que depuis que Jean-Paul est là, la ville de Nîmes a pris un autre visage. Donc, je compte vraiment sur Jean-Paul Fournier pour arriver à maintenir cette union à Nîmes.