L'INTERVIEW L'ancienne ministre Prisca Thevenot : "Sans Gabriel Attal aux dernières législatives, c'était notre mort politique assuré"
L’ancienne ministre chargée du Renouveau démocratique, porte-parole du gouvernement de Gabriel Attal, Prisca Thevenot était à Nîmes vendredi dernier en tant que marraine de la Banque alimentaire du Gard. La députée réélue l’été dernier après la dissolution, a accepté de répondre aux questions d’Objectif Gard lors d’un entretien à la rédaction.
Objectif Gard : Vous êtes ici à Nîmes, en tant que marraine locale de la banque alimentaire du Gard. Pourquoi avez-vous accepté ce rôle ?
Prisca Thevenot : Il y a un an, alors que j'étais ministre, j'étais venue à Nîmes pour soutenir le tissu associatif local, et m’engager dans le cadre du lancement de la collecte de la banque alimentaire. Après une très belle journée ensemble, on m'avait dit que je ne reviendrai pas. J’avais pris le pari de revenir pas seulement par principe. Mais pour constater les situations un an après. Comment cela évolue, que ce soient les besoins des bénéficiaires, mais aussi les besoins et les attentes de celles et ceux qui aident les bénéficiaires.
Au cœur d'une crise économique aujourd'hui, plus que jamais ces associations sont essentielles…
Les associations ont toujours été essentielles, je suis une enfant des quartiers, donc je ne vais pas commencer à vous dire que les associations n'existaient pas avant ou qu'elles étaient anecdotiques. Elles sont au cœur des villages, des villes, au bas des immeubles dans les quartiers, elles font le lien souvent entre le politique et le citoyen, et ça il ne faut pas le nier. Mais force est de constater que la précarité continue à augmenter dans notre pays, malgré toutes les politiques publiques nationales ou locales qui sont mises en place, il y a une réalité, et je ne vais pas ici venir vous dire que ça n'existe pas.
Surtout dans le Gard, l’un des départements les plus pauvres de France…
Exactement, et donc si on veut pouvoir changer les choses, il faut pouvoir bien les nommer, soutenir financièrement. Ne craignons pas les mots. Et puis il y a un enjeu aussi administratif, parce qu'aujourd'hui on a beaucoup de structures associatives, petites, moyennes ou grandes, qui passent beaucoup plus de temps à faire de la paperasse, à répondre à des appels d'offres, alors qu'elles préféraient être sur le terrain à aider des bénéficiaires. Vous savez cette fameuse folie normative qu'on retrouve dans d'autres secteurs, elle touche aussi le secteur de l'association. Un mot enfin sur la reconnaissance du bénévolat, parce que ce sont des compétences qu'on développe et qu'il faut qu'on puisse reconnaître dans le monde professionnel, mais il y a encore beaucoup de choses à faire.
Vous êtes engagé sur la santé et les droits des femmes. La victoire de Donald Trump aux Etats-Unis vous inquiète ? Est-ce que certains acquis des femmes pourraient reculer ?
Si vous me posez la question, c'est que vous avez un peu une partie de la réponse. Je pense qu'on ne peut pas considérer définitivement acquis ce que nous avons aujourd'hui, grâce à des luttes de longue date par d'autres avant nous. Bien sûr, nous devons continuer à nous mobiliser, et se dire que, attention, le meilleur n'est pas toujours devant nous, il faut donc faire en sorte que cela ne se réalise pas. Sachant que nous avons encore plein de sujets à faire évoluer sur les droits en général, les droits des minorités et le droit des femmes.
Et plus spécifiquement aussi sur le sujet de la santé des femmes…
Pardon d'enfoncer des portes ouvertes, mais nous n'avons pas les mêmes corps et donc nous n'avons pas les mêmes besoins, nous n'avons pas les mêmes façons d'appréhender la santé. Donc il y a un certain nombre de sujets qu'on doit pouvoir mettre sur la table et là je peux vous dire que je prendrai toute ma place en tant que députée ou même en tant que citoyenne pour continuer à dire que non, je ne veux pas de statu quo ni sur la santé ni sur les droits des femmes, je veux des avancées.
Vous êtes aussi engagé face à la baisse de la natalité en France…
J'emploie le terme réarmement démographique que le président de la République avait employé en début d'année. Par réarmement démographique, il ne s'agit pas de dire qu'on va faire des petits soldats partout. Il y a le vieillissement de la population, les femmes font moins d'enfants, les familles font moins d'enfants. Factuellement, on a une crise démographique. Et la démographie, c'est ce qui nous permet d'assurer une puissance, une puissance en tant que nation, mais une puissance pourquoi ? Pour continuer à financer notre modèle social. Quelles sont les raisons de cette crise démographique dans notre pays ? Cela peut être des raisons économiques, ça peut être des angoisses climatiques. Et puis il y a aussi d'autres sujets qui revêtent de l'ordre de l'infertilité. Parce que souvent quand il y a le désir d'enfant, il arrive malheureusement parfois qu'il y a problématique pour avoir des enfants. Et ça peut être lié à l'environnement, à l'alimentation, ou à beaucoup d'autres facteurs. Mais c'est encore tabou dans notre société de dire j'ai envie d'enfant mais je ne peux pas.
À l’Assemblée nationale, le budget 2025 aura certainement beaucoup de mal à être adopté. Il y a un risque de blocage budgétaire du pays ?
Moi ce que je dis sur le budget c'est assez simple depuis le début. C’est un budget de redressement qu'on doit avoir pour le pays. Ce n’est pas nouveau. On a commencé à mettre des mesures en place avec Elisabeth Borne puis Gabriel Attal et on doit continuer. Mais cela n’est pas qu'un exercice comptable. Il faut une ligne politique dans un budget. C'est bien pour ça que les oppositions ne votent pas les budgets d'ailleurs. Aujourd’hui, j'ai un peu du mal à voir la ligne politique. De notre côté, nous nous opposons à un alourdissement de la fiscalité pour les entreprises. C'est du bon sens. En lien avec la compétitivité. On est unanimement d'accord pour dire qu'il faut qu'on continue à créer des richesses dans notre pays pour pouvoir les redistribuer et pour pouvoir financer notre modèle social. On veut continuer à travailler notre indépendance et notre souveraineté. Pour ça, il faut quoi ? Il faut des entreprises. Et les entreprises, pour qu'elles fonctionnent, il ne faut pas passer son temps à les pointer du doigt et à considérer que simplement en venant combler un déficit sur leur dos, ça va fonctionner. En fait, pardon, c'est se tirer une balle dans le pied.
Un mot pour finir sur le congrès de Renaissance. Il n'y a qu'un seul candidat, c'est Gabriel Attal. Cela vous convient parfaitement non ?
Je suis ce qu'on appelle une Attaliste (soutien à Gabriel Attal). Et en réalité, ce n'est pas Gabriel Attal pour Gabriel Attal. C'est de rappeler qu'aujourd'hui, dans le monde complexe dans lequel on est, un monde politique incertain aussi au niveau national, il y a une zone de stabilité. C'est effectivement ce mouvement politique, cet élan politique qui a été créé depuis 2016 derrière Emmanuel Macron. Sans Gabriel Attal aux dernières législatives, il y aurait eu un effacement, une disparition de la famille politique dans laquelle je suis aujourd'hui à l'Assemblée nationale. Nous ne serions plus là.
Lors des prochaines échéances municipales, est-ce que vous êtes favorable à des accords avec les partis politiques avec qui vous êtes déjà aujourd'hui au gouvernement ?
Quels sont les accords ? Avec les Républicains ? Vous savez, je suis députée à l'Assemblée nationale, oui, je soutiens le gouvernement de Michel Barnier et je le soutiens d'autant plus que j'ai des collègues qui y participent. Mais je suis obligée de vous dire que ce n'est pas encore l'amour parfait. Et d'ailleurs, elle n'a pas attendu que Renaissance existe pour s'engager et je pense qu'on doit pouvoir s'appuyer sur ces personnes.