LE 7H50 de William Portal : « Si je perds aux municipales, ce sera un traumatisme »
Au pouvoir depuis 30 ans, le maire de Marguerittes s’estime toujours dans le coup. Aux municipales de mars 2020, le septuagénaire briguera un septième mandat.
Objectif Gard : Pour être franc, on n'arrive plus très bien à compter le nombre de vos mandats... Alors celui de 2020, n'est-il pas le mandat de trop ?
William Portal : Je briguerai mon septième mandat. Quand je suis arrivé aux affaires en 1989, j’ai provoqué de nouvelles élections en raison de problèmes internes. J'ai été réélu en plein mois de juillet ! Pour répondre à votre question, ce n’est pas le mandat de trop. Pourquoi faire du racisme anti-vieux ? La pérennité de mes mandats m’a permis de construire et structurer ma ville.
Pardon mais à 75 ans, n'est-on pas usé par le pouvoir ? Peut-on répondre encore aux besoins des administrés ?
Je n’aurai pas duré si c’était le cas. Les gens m’auraient renvoyés chez moi. Vous savez, l’expérience compense la vitalité et les jugements à l’emporte-pièce...
L’ancien maire, Henri Llanta, est également resté au pouvoir durant trois décennies (1959-1989). Il paraît qu’à l’époque vous vous offusquiez de cette longévité. Vous avez changé d’avis ?
Ah non, pas du tout. J’ai enseigné 20 ans à l’étranger et dans le Nord de la France. Quand je suis revenu de mes pérégrinations, j’avais envie de m’impliquer dans la vie de la cité. Le docteur Llanta n’a pas trouvé le moyen de m’intégrer dans le dispositif. Alors avec une bande de copains, on a monté une liste et nous avons gagné.
Marguerittes, c’est ma vie !
La politique est devenue une addiction ?
On peut le comparer à quelque chose comme ça… Marguerittes, c’est ma vie. Parfois même au détriment de ma famille. Il faut être honnête, j’ai le sentiment d'exercer un métier.
Un métier où la retraite n'existe pas. Comment analysez-vous votre longévité ?
Eh bien j’ai été dans le coup. En 1989, la première chose que j’ai faite, c’est de m’occuper du développement économique. Je me rappelle qu’à l’époque le maire de Nîmes, Jean Bousquet, me disait : « Gamin, ne t’esquinte pas à le faire, le développement économique se fera vers Montpellier ! » Nous avons créé une zone d’activité entre l’autoroute A9 et la route d’Avignon. Aujourd’hui, 1 200 personnes y travaillent. Ça a permis de donner un statut social à nos habitants.
Plus largement, quel bilan faites-vous de vos années au pouvoir ?
Outre le développement économique, il y a eu toute la structuration sociale du village. On m’assimile à la Droite, mais je conduis une politique de Gauche en ce qui concerne le social. On a créé un CCAS (Centre communal d'action sociale), des chantiers d’insertion et des jardins solidaires. Au total, chaque année, 2,4 M€ sont injectés dans la vie sociale. Il y a aussi eu la création de la médiathèque avec 4 000 adhérents aujourd'hui. Je ne dis pas que j’ai tout fait. J’ai bénéficié d’un patrimoine qui aujourd’hui a une valeur ajoutée certaine.
Vos concurrents estiment que durant ce dernier mandat (2014-2020) vous vous êtes reposé sur vos lauriers...
J’ai vécu sur l’acquis. Mais j’ai quand même développé la culture, en créant des offices pour permettre aux acteurs de la vie associative de faire remonter leurs besoins. On a également eu des programmes de voirie. 1,2 M€ ont été injectés dans la restauration scolaire et nous avons créé le parc de Praden.
À quoi vous servirait ce septième mandat ?
J’ai plein de choses à faire : revalorisation du patrimoine, mis en place d’une politique environnementale, restructuration de la vie associative… Je ne vais pas tout vous dévoiler, mes concurrents me piqueraient toutes mes idées ! Mon premier meeting aura lieu à la salle Marie-Alice, en novembre. Je présenterai ma liste et quelques idées.
Des adversaires tous azimuts
Aujourd’hui, un de vos projets divise : l’urbanisation de la plaine derrière la voie ferrée pour la création de 500 logements.
Nous avons lancé une étude. À Marguerittes, la démographie est négative alors c'est important de faire venir de jeunes ménages.
Votre adversaire Rémy Nicolas y est opposé. Il estime que le village n’a pas les moyens d’absorber cette population…
Lui, veut construire la ville sur la ville. Il veut mettre des immeubles de deux, trois étages dans le centre ancien. Faire ça provoquerait un tollé dans la population. En centre-ville, nous n’avons pas suffisamment de dents creuses pour répondre aux besoins. Et puis, nous avons des réserves foncières qui nous permettent de construire une école, pourquoi pas intercommunale.
Aujourd’hui, deux élus de votre majorité (Denis Bruyère et Stéphane Guillemin) se présentent contre vous. Des signes annonciateurs de la fin de votre règne ?
Ce sera aux habitants de décider.
Ces deux adversaires soutiennent que vous avez encouragé leurs ambitions. Une façon de diviser pour mieux régner ?
Si cette majorité n’avait pas éclatée, je ne serai pas reparti. Je ne peux pas dire que Denis Bruyère est un mauvais gestionnaire. Mais derrière, il veut être maire. C’est une ambition que je respecte. Il aurait pu attendre mon départ avant d’essayer de prendre les rênes de la ville. Quand il parle de traîtrise, il devrait se regarder le nombril.
D'accord mais en 2014, vous aviez tout de même dit que c’était votre dernier mandat. Vous aviez aussi présenté M. Bruyère comme votre dauphin…
C’est vrai. Il aurait peut-être dû rester dauphin ! Parfois, on a des moments de lassitude et de doute. Aujourd’hui, j’ai profondément envie de repartir.
Enfin si vous perdez les Municipales, que ferez-vous ?
À 74 ans, j’ai bien imaginé que je pouvais perdre… C’est certain que ce sera un uppercut, un traumatisme psychique important. Mais au moins, je serais allé au bout de mes convictions.
Propos recueillis par Coralie Mollaret
coralie.mollaret@objectifgard.com
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