FAIT DU JOUR Le vélo, grand gagnant de la pandémie
Plébiscitée au printemps dernier à l’heure du déconfinement, la bicyclette semble avoir gagné le cœur de nombreux Français désireux d’adopter un moyen de locomotion vertueux, en s’éloignant du tumulte des transports en commun. Portés par le "coup de pouce" de l’État qui vient d’étendre la mesure jusqu’au 31 mars, les réparateurs de vélos sont débordés et les ventes de bécanes à assistance électrique ne sont elles aussi pas en reste malgré un rafraîchissement des températures.
« La bicyclette est l’une des rares inventions qui ne servent qu’au bien », disait le romancier Paul Guth. Une citation qui ne fait pas l’unanimité chez certains automobilistes qui ont eu un jour à suivre, sur une route nationale, des cyclistes peu adeptes de la file indienne, mais adoptée par beaucoup de Français qui sont de plus en plus nombreux à pratiquer le vélo.
Ainsi, du 12 mai au 12 juin dernier, au sortir d’un confinement lancinant, les ventes ont explosé de 117% par rapport à la même période l’année passée selon Union Sport et Cycle. Le Gard, qui jouit d’un climat propice à l’usage annuel du vélo, n’échappe pas à la tendance nationale. Les professionnels du secteur reconnaissent unanimement une augmentation de la fréquentation de leur établissement depuis plusieurs mois.
D’autant que l’État a sorti le carnet de chèques pour lancer l'opération "coup de pouce vélo" au mois de mai dernier. Ce dispositif comprend notamment une prise en charge jusqu'à 50 euros hors taxes de la remise en état d'une bicyclette. Alors qu’il devait prendre fin au 31 décembre, le mécanisme, victime de son succès, vient d’être prolongé jusqu’au 31 mars 2021, au moment où la barre du million de vélos réparés a été franchie, d’après un document ministériel.
Les vélos à assistance électrique ont le vent en poupe
Spécialisé dans la vente de motos, le magasin Workshop basé à Caissargues dispose d’un rayon vélos étoffé. Thomas Urzedowski, qui en est le responsable, avait observé au printemps dernier l’arrivée d’une nouvelle clientèle, « de plus en plus féminine », qui « ressortait parfois du grenier des engins qui ont plus de vingt ans. » Submergé par une vague de demandes de réparations boostée par le coup de pouce de l’État, le magasin avait augmenté son délai d’attente qui avoisinait quinze jours. Six mois après, le responsable du rayon reconnaît une légère accalmie des réparations mais observe le « franchissement d’un cap concernant l’achat de vélos à assistance électrique (VAE). »
Du côté d’Alès, Julien, réparateur-vendeur chez Mondovélo, concède « un engouement pour le vélo », avec également « une grosse demande » sur les deux roues à assistance électrique, pour lesquels il faut compter entre 2000 et 3000 euros « si on veut du bon matériel qui répond aux exigences du territoire alésien, pas forcément tout plat. » Et de poursuivre : « En ce qui concerne les réparations, on est sur le même rythme qu’au printemps. On a parfois des pépites ! »
Une aubaine dont a profité Anthony, 25 ans, venu faire réparer une bécane laissée à la cave depuis plusieurs années. « Elle appartenait à mon grand-père et aurait pu finir aux oubliettes s’il n’y avait pas eu la prime de 50 euros. Pour une fois qu’on nous offre quelque chose, il faut en profiter », réagit le jeune homme, en proie à une anxiété grandissante liée à la pandémie et désireux de reprendre le vélo pour « s’aérer l’esprit », depuis que sa pratique, dans un rayon de 20 kilomètres, a été ré-autorisée par le gouvernement. Actuellement chez Mondovélo, il faut compter une dizaine de jours entre le dépôt du vélo et sa restitution.
À quelques encablures, l’enseigne Décathlon est elle aussi gagnée par la foule à quelques semaines de Noël. Ruben Guerra, nommé par sa direction à la tête de l’atelier réparation depuis le lancement de l’opération "coup de pouce vélo" et qui officie par ailleurs au rayon des ventes de vélos, détaille : « Au printemps, on a été complètement dévalisé, on n’avait plus du tout de stock. Le problème auquel on a été confronté, c’est que nos pièces détachées servent à la fois pour nos vélos neufs et pour nos réparations, donc on a été en rupture de stock sur toutes les pièces, du simple câble aux manettes. Ça revient progressivement à la normale mais le succès de l’opération de l’État ne s’est jamais vraiment dissipé. On a enregistré à ce jour plus de 580 dossiers "coup de pouce". Contrairement à la plupart des magasins Décathlon, on a fait le choix de ne pas recevoir les clients sur rendez-vous. On gère le flux de gens qui se présentent à nous. »
Comme son confrère du magasin Mondovélo, Ruben Guerra constate un « réel frémissement des achats de VAE. » Et de poursuivre, en rejoignant une nouvelle fois les dires du vendeur de l’établissement voisin : « Mais sur nos premiers prix à 800 euros, ça peut parfois coincer en terme de puissance. Car si la ville d’Alès est plutôt plate, il suffit que le client habite à Saint-Jean-du-Pin pour qu’il soit confronté à quelques bosses. »
Au Workshop de Caissargues comme chez Mondovélo à Alès, le vélo de type Gravel, inspiré d’un vélo de route mais équipé de pneus lui permettant de rouler dans les chemins, attire l’attention de plus en plus de clients. « Il y a un intérêt grandissant », observe Thomas Urzedowski, même si la démarche d’achat semble quelque peu freinée par le coût de ces engins plus onéreux que la moyenne.
Parce qu’il est bon pour la santé, permet le maintien d’une distanciation sociale convenable, tout en étant un outil essentiel de la transition écologique, le vélo ne s’envisage plus uniquement comme une pratique loisir mais également comme un moyen de locomotion domicile-travail. Reste à régler le problème de la cohabitation parfois houleuse avec les automobilistes auquel le fleurissement des pistes cyclables devrait en partie répondre. À Alès, la municipalité a prévu un doublement de ses voies cyclables de 30 à 60 kilomètres d’ici la fin de la mandature.
Corentin Migoule
Plus d'informations concernant le coup de pouce vélo à retrouver sur le site du programme Alvéole.