ÉDITORIAL La santé de fer de l'entreprise de Jeff Bezos
Ils étaient un bon millier samedi pour dire non à Amazon. Venus du Gard, et des régions voisines mais aussi de Paris comme l'ex-ministre Delphine Batho représentant sa formation Génération Écologie. Dire non au projet d'implantation d'un entrepôt logistique pourvoyeur d'emplois. Dommage. Ce projet à Fournès, mené par l’entreprise Argan, même s'il ne fait pas de doute que l'occupant final soit Amazon, permettrait 200 emplois direct. Dans l'un des départements le plus pauvre de France, ce n'est pas négligeable. Sauf que ce projet, intéressant ou pas économiquement parlant, aura un impact fort du point de vue environnemental avec l'importation de produits chaque année venus du monde entier. Il va aussi entraîner une présence accrue de poids-lourds sur la zone. Sans compter tous les camions qui sortiront des entrepôts chargés comme des mules. Ajoutons qu'implanter 30 000 m2 en plein espace naturel et qui plus est, devant le majestueux Pont du Gard, classé au patrimoine mondial de l’Unesco, on a connu mieux. Tout cela semble donc indiquer que ce projet n'a pas connu en amont une suffisante concertation. Il souffre donc par conséquence de tous les fantasmes du monde. En premier lieu, de ceux qui rejettent en bloc la société de surconsommation. Mais même à 1 000 personnes, ils ne seront jamais assez au regard des chiffres monstrueux de l'entreprise de Jeff Bezos... Quoi qu'ils en disent, le modèle Amazon est aujourd'hui plébiscité dans le monde entier. Malgré les polémiques et la crise sanitaire, Amazon affiche une santé de fer. De nouveaux bénéfices records devrait d'ailleurs être annoncés rapidement. Déjà, rien que sur les trois premiers trimestres de l'année passée, Amazon a dégagé plus de bénéfices que toute l'année 2019. C'est le véritable grand gagnant de la crise. Alors penser qu'il est possible d'empêcher son implantation ici et là, dans un pays comme la France où le principe de la liberté du commerce et de l'industrie a été institué depuis la Révolution est pour le moins naïf. Mais s'assurer que le géant du numérique ne joue pas un rôle de prédateur commercial, sans foi ni loi qui s'autorise tout, par une position hégémonique, est salvateur. La France, ce n'est pas les États-Unis. Les GAFA n'ont pas tous les droits. Et les protestations inédites à Fournès sont peut-être le début de quelque chose. Une évolution, une révolution possible, qui ferait la part belle à l'enthousiasme des citoyens et des habitants avant tout projet dantesque...
Abdel Samari