LE 7H50 Didier Caire : "90% de la population gardoise est soumise aux nuisances du moustique tigre"
Didier Caire est le chef d'agence opérationnel pour le Gard de l'Entente interdépartementale pour la démoustication du littoral méditerranéen (EID). Il revient pour Objectif Gard sur la prolifération des moustiques dans le département et sur les moyens à mettre en place pour limiter leurs nuisances.
Objectif Gard : Quel est le rôle de l'EID dans le Gard ?
Didier Caire : L'Entente interdépartementale de démoustication a été créée dans les années 1960 en parallèle de la mission Racine. L'idée est de maîtriser les nuisances des moustiques pour permettre le développement de l'activité touristique. Nous continuons à traiter naturellement le littoral gardois sur près de six mille hectares pour maîtriser la population des moustiques autochtones. Mais aujourd'hui, les trois quarts des nuisances sont causées par le moustique tigre.
Quel est la différence entre les moustiques tigres et les autochtones ?
L'autochtone se développe naturellement autour des étangs et des milieux littoraux, il peut se déplacer sur des distances pouvant aller jusqu'à 15 kilomètres. Le moustique tigre est une espèce très invasive qui prolifère très vite et occupe rapidement l'espace. Au départ, elle vient d'Asie du sud-est mais elle s'est adaptée à nos milieux urbains. Elle ne se déplace que dans des rayons très restreints - au maximum une grosse centaine de mètres - et se développe dans des petits récipients en plastique, en fer ou en béton. Bref, partout où de l'eau stagne. Aujourd'hui, on la retrouve dans les deux tiers des départements français et elle sera bientôt partout. Dans le Gard, 90% de la population est soumise à ses nuisances.
Ces espèces sont-elles potentiellement dangereuses ?
Chaque année, nous avons quelques cas de dengue et chikungunya, des maladies tropicales transmises par les moustiques tigres. Le risque est beaucoup moins important avec l'autochtone.
Comment luttez-vous contre les moustiques tigres ?
Le rôle de l'EID est principalement de réguler les populations de moustiques autochtones. Pour le tigre, nous ne pouvons rien faire à proprement dire, puisqu'il prolifère surtout dans les jardins des particuliers. Nous essayons de communiquer sur les moyens de limiter son invasion et ses nuisances.
La progression du moustique tigre est-elle inéluctable ?
C'est une espèce invasive qui risque d'atteindre un plafond quand elle sera présente partout. Pour le moment, elle poursuit sa progression. Des pluies suivies de fortes chaleurs forment le cocktail idéal à sa prolifération. Pour la réguler, il n'y a pas de solution miracle, chacun a un rôle à jouer.
Quels types de conseil donnez-vous aux populations ?
Des actions localisées permettent de réduire considérablement les nuisances. Tout d'abord, il ne faut pas laisser d'eau stagner et absolument vider les récipients à chaque pluie car les larves s'y développent. L'entretien des végétations est également important car les moustiques apprécient les coins ombragés et humides. Enfin, pour ceux qui ont des cuves dans leur jardin, je conseille de placer un voile moustiquaire pour éviter les pondaisons.
Que faire lorsqu'on est envahi par les moustiques ?
Il n'y a pas de solution miracle. On peut porter des vêtements longs pour se protéger la peau, utiliser des moustiquaires. Les prises à ultra son ne sont pas très efficaces, et les lotions ou produits diffusés peuvent être nocifs pour la santé. L'idéal est de régler le problème en amont.
Le moustique est-il seulement un nuisible ou a-t-il un rôle à jouer dans biodiversité ?
Dans un écosystème, tout sert. À l'état larvaire comme à l'âge adulte, les moustiques entrent dans la chaîne alimentaire de nombreuses espèces dont la libellule et certains oiseaux insectivores.
Propos recueillis par Boris Boutet