L'INVITÉ Emmanuel Roux : "La seule question tabou, ce sont les frais d'inscription"
À quelques semaines de la fin de l'année, ObjectifGard a rencontré le président de l'Université de Nîmes, Emmanuel Roux. L'occasion d'échanger sur son parcours, son travail à la tête de l'établissement gardois et d'évoquer les projets pour son second mandat. Trois rendez-vous sont programmés aujourd'hui avec notre invité : celui de 7 heures suivi de deux autres à 11 et 15 heures.
Emmanuel Macron a pris la tête de l’État. Son programme pour l’université est clair : il souhaite une autonomie réelle. Les universités qui accepteront le principe d’un contrat avec l’État bénéficieront de moyens supplémentaires. Est-ce une bonne démarche ?
D’abord les universités signent toujours des contrats avec l’État depuis 1984 avec de nombreux objectifs et des moyens. Ce que je souhaite pour notre établissement c'est le renforcement de son autonomie. Parce que cela nous permet de décider et de gérer nos emplois. Cela nous oblige à une vraie stratégie autour du budget, des emplois, des formations …
Le risque d'une autonomie accrue n'est pas de créer une université à deux vitesses en France : les grands pôles d'excellence et les petites et moyennes universités, transformées en collèges universitaires de premier cycle ?
Cela n'arrivera pas car les coûts d'inscription dans les universités sont fixés au niveau national et ce sont les mêmes pour tous. Par ailleurs, la dotation de l’État pour l'enseignement supérieur ne sera pas remis en question. Après, il faut être lucide : il y a déjà de la concurrence entre les universités. Les financements propres, la formation continue, les contrats de recherche (appel à projet, initiative d’excellence). Il va de soi qu’il faut avoir une force de frappe pour y répondre. Mais cela existe depuis 10 ans ! La réalité c'est : soit on a la capacité de porter le projet seul, soit on le fait en réseau. Nous l'avons déjà mis en place sur des questions de pédagogie avec Perpignan et Montpellier. La concurrence doit être raisonnée et raisonnable, c'est la clé. De notre côté, pour nous distinguer, on travaille sur nos points de force comme le design. Et cela ne nous empêche pas de mutualiser nos forces avec l’université de Toulouse sur l’accueil d'étudiants handicapés. C'est ce que l'on appelle le design de service adapté à des questions médicales.
Dans un précédent entretien avec notre journal, vous évoquiez 50% d’étudiants boursiers à Nîmes. Est-ce que l’autonomie réelle ne risque pas d’entraîner une augmentation des coûts notamment d’inscription pour ces étudiants ?
Il n'y aura pas de changement. La seule question tabou, ce sont les frais d'inscription. C’est une caractéristique française et je pense qu'il ne faut pas y toucher. C'est un principe de l'État unitaire.
Comment attirer des étudiants à Nîmes résidant à Alès, Bagnols et Arles et éviter qu’ils partent vers Avignon, Marseille ou Montpellier ?
D’abord, en leur apportant l’information que nous sommes là et ce que nous sommes capables de faire. Comme je vous le disais précédemment, il faut s’inscrire dans le paysage. Après, il est nécessaire d'offrir une qualité d’accueil, de suivi, des infrastructures qui donnent envie de rester. Indéniablement, la qualité de l'enseignement est le point clé. Et de ce point de vue là, nous avons des atouts ! Des enseignants qui connaissent leur étudiant, ce n’est pas le cas partout. Et moi, je vous le dis avec le plus de sérénité possible car ma fille est en première année. Je vois la sécurité que cela représente en tant que parent d’élève. Nous sommes une université familiale qui l'accompagne dans son développement et ne la laisse pas toute seule. Tous les étudiants à Nîmes sont pris en charge individuellement et chouchoutés : ce sont des qualités que l’on ne retrouve pas partout. Les chiffres parlent : nous avons 25% d'étudiants en plus comparativement aux années précédentes.
Le site Vauban est surchargé. Quels sont les perspectives pour accueillir davantage d’étudiants ?
On a commencé ! Actuellement on a 4 sites, très bientôt on va passer à 2. Hoche 2 va permettre d'accueillir les étudiants des Carmes et le groupe de recherche GIS à l'horizon 2020-2021. En plus, nous sommes locataires de ces sites, notre déménagement va nous permettre d’arrêter de payer des loyers et de faire des économies. Concernant Vauban, Hoche 1 a déjà permis de libérer un peu d'espace. Les formations Lettres, Langues, Design et quelques licences professionnelles ont quitté les lieux. A présent, le but est de repenser les formations. Nous avons un amphithéâtre de 400 places sur Hoche, des formations à gros effectifs pourraient assez facilement avoir lieu là-bas. On pourrait également basculer la licence Design sur Hoche. Par ailleurs, comme je vous l'ai dit, on a l’objectif de créer un site sportif pour les formations STAPS (sciences et techniques des activités physiques et sportives). Nous allons avoir besoin de place... Clairement, j’ai déjà signalé à la ville de Nîmes qu’il était nécessaire d'envisager de la réserve foncière du côté de Hoche-Sernam à l’horizon 2025-2030. Aujourd’hui, la situation est acceptable. Mais demain, l'université de Nîmes sera à l'étroit sur ses sites. Ce sont d'ailleurs des dossiers qui devront être pris en charge par mon successeur après la fin de mon deuxième mandat.
Parlons rapidement de la question du logement. Plus d’étudiants c’est plus de besoin en termes de chambres. Est-ce que Nîmes peut supporter d’un point de vue immobilier cet accroissement rapide ?
Je ne suis pas le responsable, c’est le CROUS. J’étais avec le directeur la semaine dernière car j'ai deux sujets préoccupants : la restauration et le logement. Concernant le logement, on a plusieurs pôles à Nîmes. Après la fermeture de la Cité Matisse qui est actée, le CROUS réfléchit au développement de nouvelles résidences étudiantes. Proche de l’IUT, du site Vauban et d'Hoche d’ici 2020. Du côté de la restauration, on a de gros problèmes sur le site Vauban. Notre restaurant universitaire a fermé en 2013. Depuis, on a simplement une cafétéria. Le CROUS a intégré cette difficulté et est d'accord pour la construction d’une vraie cafétéria comme celle de Montpellier, qui sera implantée dans la pinède au dessus de Vauban. On réaménagera ainsi le parking. Nous sommes enfin sur de nouvelles infrastructures de vie étudiante, que ce soit la médecine préventive et un centre de soins. Tout cela à l'horizon 2019. J’ai lancé les financements Etat-Collectivités territoriales. L'État, la ville de Nîmes, Nîmes Métropole, le Département du Gard sont partants. Le dossier est à l'instruction à la Région qui devrait nous suivre sans problème. La construction devrait donc démarrer rapidement.
Dernière question : Si un bachelier souhaite poursuivre des études supérieures. En quelques mots, comment le convaincre de s’inscrire à l’Université de Nîmes plutôt que dans un autre établissement ?
Parce que l’université de Nîmes a des atouts et des qualités que l’on ne retrouve pas ailleurs : sa taille, sa capacité d’accueil, la qualité des étudiants qui s’y trouve. Mais aussi, la qualité du travail, l'accompagnement des étudiants… En Licence, l'université de Nîmes doit jouer la logique de proximité, d’ascenseur social. Avoir à côté de chez soi une université de cette qualité avec d’excellentes conditions et des taux de réussite exceptionnels, c'est une valeur ajoutée indispensable pour le territoire, pour les Gardois.
Retrouvez notre entrevue de 7h00 et celle de 11h00.
Propos recueillis par Abdel samari