ALÈS Le cri du coeur de Sylvie Pratlong, gérante du snack "Le Bahut"
Lieu de restauration rapide historique du centre-ville d'Alès, le Bahut est en proie à des difficultés grandissantes liées à un manque de fréquentation depuis la rentrée de septembre. Les deux gérants semblent désemparés face à la situation.
Qui ne connait pas "Le Bahut", snack emblématique de la rue Claris, à proximité de plusieurs établissements scolaires. Depuis le 4 janvier 1993, Sylvie Pratlong et son frère Didier se partagent l'affiche, et ont vu se succéder de nombreuses générations d'élèves du lycée Jean-Baptiste-Dumas et du lycée professionnel privé cévenol.
Dans le temps, l'ambiance y était festive, les gens adorables, la nourriture réconfortante. "J'étais jeune et sans expérience quand j'ai commencé. Je me suis fait des amis parce que je n'avais pas beaucoup de différence avec mes clients. Je suis allé au mariage de certaines personnes, ils sont venus à mes anniversaires aussi. Le vendredi soir, on s'enfermait et on faisait l'apéro. J'ai toujours certaines personnes qui reviennent encore me voir, ça fait chaud au coeur", se souvient la co-gérante pleine d'émotion.
Sylvie Pratlong aimerait retrouver cette époque d'antan, faite de parties de cartes, de babyfoot, de billard ou autres amusements. De 7h à 18h, les patrons se retroussaient les manches malgré le monde, pour proposer le meilleur service possible. Le Bahut n'était pas seulement un simple snack, mais un lieu de vie : "J'ai pu aider une jeune fille qui se faisait taper par son copain. Il m'arrivait aussi d'aider les jeunes à faire leurs devoirs", explique-t-elle.
Une époque qui semble révolue
Mais aujourd'hui, les générations se sont succédés, marquant une fracture avec le passé glorieux du lieu. Une situation qui attriste beaucoup le bînome s'efforçant à proposer des nouveautés à la carte pour rester dans l'ère du temps. "Avant on pouvait parler de tout. Aujourd'hui, c'est compliqué parce que le monde a changé, on ne communique plus comme avant. Les jeunes d'aujourd'hui, ils ont leurs écouteurs et leurs téléphones, même s'ils sont très polis", déplore-t-elle.
Depuis septembre, elle remarque une forte baisse de sa clientèle. Quotidiennement, seulement une vingtaine de jeunes vient consommer dans son snack, une affluence qui met les patrons en danger : "On est peut-être trop vieux, on n'est plus à la mode... Ça me fait de la peine parce que c'est une partie de ma vie. Ce lieu c'est mon bébé, celui que je n'ai pas eu", se désole-t-elle.
La raison de cette chute, Sylvie n'en a aucune réelle idée. Il y a sans doute la venue d'autres franchises à proximité, peut-être plus attractives aux yeux des plus jeunes, ou tout simplement le non-renouvellement d'une partie de sa clientèle, désormais sur le marché du travail : "Pourtant nous n'avons pas augmenté nos prix depuis trois ans. On s'est mis au goût du jour en faisant des tacos, des burgers géants à 6,20 euros. On a des paninis, des salades, des pâtes carbonara à la demande, des omelettes avec des oeufs frais de nos poules...", énumère-t-elle.
Démoralisée par ce qui lui arrive, Sylvie ne sait pas combien de temps elle pourra continuer à tenir avec Didier, son collaborateur. "Il y a des factures à payer, un loyer conséquent, c'est compliqué...", souffle-t-elle. "J'aimerais qu'avant de juger un endroit, on puisse y rentrer, que les gens viennent goûter à ce qu'on fait, toujours avec le sourire malgré la situation. J'aimerais que ma salle soit pleine", espère-t-elle. Faute de quoi, Sylvie et Didier seront obligés de vendre...