Publié il y a 1 mois - Mise à jour le 09.02.2025 - Propos recueillis par Anthony Maurin - 3 min  - vu 344 fois

L’INTERVIEW Denis Verdier : « Transmettre mes sentiments, mes combats, mes espérances »

Denis Verdier Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)

Denis Verdier livre son Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)

Vigneron, Denis Verdier préside la fédération gardoise des vins IGP et s’est investi tout jeune dans l’agriculture et dans la coopération et le syndicalisme. Il sort Une ambition paysanne, un livre retraçant cinquante ans d’engagement dans le monde rural. Une série de conversations avec notre confrère Gil Lorfèvre.  

Denis Verdier Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)
Ambition paysanne, le livre est paru chez Atelier Baie (Photo Anthony Maurin)

ObjectifGard : Comment est née l’idée de ce livre ?

Denis Verdier : J’ai eu envie de transmettre. J’ai commencé une carrière syndicale aux Jeunes Agriculteurs (JA), j’ai vu l’évolution et je veux transmettre mes sentiments, mes combats, mes espérances. Le monde a changé ! J’en ai parlé à Gil Lofèvre qui m’a recommandé de faire ça sous la forme d’un dialogue. L’éditeur était d’accord, alors nous nous sommes lancés dans cette aventure où l’on s’adresse avec modestie au grand public.

Denis Verdier Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)
Denis Verdier livre son Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)

La viticulture a toujours évolué non ?

J’ai vu de près l’évolution ces 50 dernières années, de notre profession, de notre culture. L’histoire n’est pas finie, elle continue. Parfois, nous avons été « borderlines » dans nos combats, mais nous avons aussi construit beaucoup de choses. Nous étions persuadés d’avoir raison. Tout cela nous a permis d’assurer une première mutation, mais nous sommes rattrapés… Une fois, on peut le dire il y a prescription, j’avais 22 ans et j’étais déjà aux JA, un producteur de fruits et légumes m’appelle et me dis qu’au marché gare un négociant faisait entrer des poires étrangères. Les poires, si on leur met du fioul, elles n’aiment pas trop et elles sentent mauvais. Alors, de nuit, nous sommes rentrés dans les frigos et on a balancé le fioul. En rentrant, on a appelé les renseignements généraux et la presse. Et le lendemain, nous avions de beaux articles ! En plus, le négociant n’a plus racheté de fruits étrangers. Je crois que c’était la seule solution.

L’agriculture est-elle dans une impasse ?

Aujourd’hui, l’évolution sociétale est énorme. La consommation de vin rouge est en baisse alors que le Gard en est un gros producteur. De plus, il y a des crises économiques, des guerres, la politique prévue par Donald Trump… Quand on regarde tout ça, on voit que cette mutation aura de graves conséquences dans des régions comme la nôtre. Plus d’un vigneron sur deux est en cessation de paiement.

Denis Verdier Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)
Denis Verdier et son Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)

C’est foutu ?

On ne va pas, on ne peut pas tomber dans le pessimisme en disant que tout est foutu alors il nous faut réfléchir et ce livre est un plaidoyer pour agir et sauver les meubles. Il n’y a plus de vignerons, que va-t-on faire du foncier qui se libère ? Nous sommes tous concernés et ça va se produire. Je veux sensibiliser et attirer les regards. Si on ne prend pas garde à cela, la question de l’aménagement du territoire sera bouleversée. La production de fruits et légumes en France est quasi inexistante alors que l’idée est d’aller vers une indépendance alimentaire ?

Une chose vous a toujours tenu à cœur : le travail coopératif.

Le monde coopératif doit évoluer, on a quelques entreprises gardoises qui tiennent la route mais dans l’ensemble, caves et vignerons indépendants ont besoin de sortir de la vente en vrac et aller chercher la valeur ajoutée dans le conditionné. Il faudrait aussi aller sur le vin blanc, le rosé, les bulles, les cocktails… Mais il faut y aller à fond et limiter les quantités pour avoir une offre et une demande qui sont équilibrées.

Denis Verdier Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)
Denis Verdier et Gil Lorfèvre (Photo Anthony Maurin)

Cela signifie la fin des gros volumes ?

Nous devons continuer le qualitatif mais aussi séduire les jeunes, la génération Z. Nous devons avoir les outils pour ça et ça demande des moyens que les vignerons, actuellement, n’ont pas.

Pourquoi ce livre maintenant ?

J’ai des enfants aux USA et je leur ai envoyé, nous allons en discuter bientôt. Ils ont vécu ça et je ne les ai pas vu grandir du fait de mon militantisme. J’essaie de me rattraper. C’est important que la nouvelle génération mesure le poids que représentait l’agriculture dans nos villages il y a encore quelques décennies. Il y avait les saisonniers, une vraie économie qui profitait à tout le monde. Ça, ça ne peut pas s’éteindre dans nos souvenirs… Avec le livre, l’histoire s’explique. J’y raconte quelques anecdotes, mais je ne dis pas tout !

Denis Verdier Ambition paysanne (Photo Anthony Maurin)
Gil Lorfèvre, Denis Verdier et l'éditeur, Bruno Dohan (Photo Anthony Maurin)

Une ambition paysanne, cinquante ans d’engagement pour le monde rural, aux éditions Atelier Baie, 15 euros. Format 16 x 20,5 cm, 112 pages.

Propos recueillis par Anthony Maurin

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