VÉZÉNOBRES La Conf' fait de l'agrivoltaïsme un enjeu des élections professionnelles
Alors que les agriculteurs votent actuellement pour élire leurs représentants, la Confédération paysanne a porté l'attention, ce jeudi, sur deux projets d'agrivoltaïsme. L'un de 3 hectares, sur la commune de Vézénobres, l'autre de 10 hectares à cheval sur Ners et Vézénobres. Ils dénoncent l'accaparement des terres par les énergéticiens et la perte de terres agricoles, qui n'auront plus que l'élevage comme solution. À leurs yeux, un berger sert de prétexte à la production électrique.
Au milieu des amandiers anciennement exploités, le tractopelle de l'Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP) creuse des banquettes pour sonder le terrain. Les chercheurs ont prévu de rester trois semaines, mais devraient écourter leurs recherches, en l'absence de vestiges. Leur présence reste le signe d'un prochain aménagement qui aura une incidence sur le sol. "Ici sont prévus trois hectares d'agrivoltaïsme, explique Didier Marion, porte-parole de la Confédération paysanne, avec 1,5 hectare de panneaux et des ombrières à 3,50 m de haut."
Le terrain est privé, classé en parcelle agricole par le plan local d'urbanisme. Et c'est la société Urbasolar qui est chargée d'implanter les panneaux. Au grand dam de la voisine du terrain, Anissa Ferhat, qui produit des plantes médicinales et aurait souhaité récupérer ce terrain anciennement exploité, sans caillou. "On met en concurence les activités agricoles et celles d'énergéticien, poursuit Didier Marion. Mais les millions de retombées ne sont pas pour le berger !"
Sous ces hauts panneaux, ce sont souvent des bêtes qui patûrent, assurant l'entretien du terrain et livrant un prétexte agricole à l'activité. "On nous dit que les bêtes seront au frais en été, mais on n'est bien moins au frais sous des ombrières que sous des arbres !" Les appuis des panneaux pourraient s'enfoncer, selon les militants, à six mètres de profondeur, dans un terrain considéré comme partiellement inondable, à deux pas de la Maison familiale et rurale de Vézénobres. "En cas de grêle, on retrouve ensuite les produits chimiques des panneaux dans le sol et personne n'assurera la dépollution."
L'autre terrain dont la Confédération paysanne dénonce le dévoiement est à cheval sur Ners et Vézénobres. Et, sur 10 hectares, il contient l'absurdité où peut mener la gestion agricole : initialement présentes, les vignes ont été arrachées à la faveur d'une prime européenne. Le propriétaire a ensuite été aidé pour y planter des arbres. Désormais âgés d'environ 25 ans, ceux-ci captent enfin du carbone de façon efficiente... mais doivent être abattus pour que les panneaux photovoltaïques, à l'exception d'un bosquet avec des chênes plus âgés.
"Il y a suffisamment de zones artificialisées, comme les parkings de zone d'activité, pour poser des panneaux solaires, argumente Didier Marion. Quand toutes ces zones seront saturées, on verra les manques..." Le terrain devrait ainsi être gelé pour toute autre activité agricole durant 25 ans. Et en cas de départ de la bergère attendue sur site avant la fin du bail, l'entreprise s'engage à trouver un autre berger, dans les 18 mois, sans quoi les panneaux seraient démontés. Présent pour la manifestation, le secrétaire national de la Confédération paysanne, Stéphane Galais (lire encadré), a insisté lors du rassemblement devant la Maison de la Figue : "On nous fait croire qu'on peut pallier le manque de revenu par la production d'énergie. Cela naît du système de gouvernance, de la connivence entre le syndicat majoritaire et le gouvernement." En dénonçant un "miroir aux alouettes", le représentant national replace le mouvement du jour dans les échéances électorales.
Un mardi à Matignon
Présent pour la mobilisation de Vézénobres, le secrétaire national du mouvement, le Breton Stéphane Galais, était mardi à Matignon pour discuter avec le Premier ministre. "On portait des revendications sur les revenus, sur la transiton agro-écologique, sur les difficultés sanitaires des éleveurs et on a sollicité le Premier ministre pour qu'il revienne sur le scrutin aux élections professionnelles." La Confédération paysanne a, ainsi, demandé un scrutin à la proportionnelle alors que le système majoritaire actuel donne une prime très importante à la liste arrivée en tête.
"Nous avons été très déçus par ce rendez-vous, poursuit Stéphane Galais, ainsi que du discours de politique générale. Le Premier ministre s'est dit impuissant à instaurer la proportionnelle lors des élections professionnelles, alors qu'il en a parlé le lendemain pour les législatives." Stéphane Galais craint surtout une "période charnière" qui voit ceux "attachés au modèle du réseau familial" proches de prendre leur retraite, sans repreneur.
Enfin, sur le volet énergie, en Bretagne, Stéphane Galais voit les méthaniseurs, dans le nord, comme une menace aussi importante que l'agrivoltaïsme dans le sud.