Publié il y a 9 h - Mise à jour le 03.03.2025 - Propos recueillis par Louise Gal - 5 min  - vu 468 fois

L'INTERVIEW Cyril Girard : "S'il faut occuper le terrain jusqu'à ce que les recours soient finis, on ira jusqu'au bout"

Cyril Girard.

- Capture d'écran du conseil communautaire

Mercredi 19 février, le préfet de la région Provence-Alpes-Côtes d'Azur, Georges-François Leclerc, a annoncé le lancement de la concertation interservices locale au sujet du contournement autoroutier d'Arles. Une annonce qui ravit la majorité municipale, mais que déplore Cyril Girard, élu d'opposition Changeons d'Avenir.

Objectif Gard : L'annonce du lancement de la concertation interservices locale au sujet du contournement autoroutier d'Arles signifie que le projet avance, et que l'enquête publique pourra bientôt démarrer. Êtes-vous inquiet à l'idée que ce projet initié depuis plus de 20 ans progresse ?

Cyril Girard : C’est la suite logique du déroulé administratif du dossier. En même temps on sait que depuis deux-trois ans, les services de l’état sont en ordre de marche pour porter ce projet quoi qu’il arrive, alors même qu’il y a de nombreuses questions posées qui sont toujours sans réponse. Sur l’enquête publique et la déclaration d'utilité publique, on n’a toujours pas de calendrier, on ne sait toujours pas quand cela va être présenté aux citoyens et sur quelles modalités. Il y a des questions essentielles qui peuvent motiver ou pas l’intérêt des Arlésiens pour ce projet.

Quelles sont les questions que vous jugez essentielles, qui peuvent influencer l'avis des habitants ?

Il y a notamment la question de la gratuité ou pas de cette nouvelle autoroute. L’idée que partagent la majorité municipale et ceux qui militent pour cette autoroute c’est que cela va être gratuit et donc, que les gens n’auront aucun intérêt à passer par la 113. Or, une autoroute gratuite ça n’existe pas et ça n’existera plus. L’Europe a encore une fois tapé sur l’Espagne l’an dernier en disant qu'il fallait arrêter avec les autoroutes gratuites. Et c'est pareil pour le fait de faire du report, de faire payer plus cher aux deux extrémités pour financer la partie gratuite. Non seulement cela va générer du report sur les routes secondaires, mais en plus, l’Europe dit que ce n’est plus possible. Donc cette autoroute ne peut plus être gratuite. Les services de l’État ne le disent pas, mais quand il y a des réunions de concertation, par exemple sur le pont à Salin, ils nous disent que l’État planche sur une hypothèse d’autoroute payante. Les transporteurs ne vont pas payer une autoroute si c’est gratuit à côté. Donc on est en train de nous mentir sur le fait que cela va être gratuit et sur le fait que cela va faire du report. On passe à côté du projet initial. 

Vous n'êtes également pas d'accord avec les arguments de sécurité routière et d'écologie avancés par la municipalité pour justifier la nécessité de ce projet. Pour quelles raisons ?

Sur la sécurité sur la RN113, on est allé chercher directement les chiffres de la sécurité routière. Quand il y a un accident, on est d’accord que cela crée des bouchons et que c’est l’enfer. Pour autant, le discours de la municipalité qui consiste à dire qu'il y a 200 accidents par an et que c’est un axe particulièrement dangereux, est tout à fait faux. Même la direction interdépartementale des routes (Dir) Méditerranées le dit, ce n’est pas un tronçon particulièrement dangereux par rapport aux routes du même type en France, et quand on regarde les statistiques, c’est même le tronçon de toute l’agglomération qui est le moins dangereux proportionnellement à l’intensité du trafic. La plupart des accidents dangereux avec des morts ou des blessés, entre 0 et 2 par an, sont sur les bretelles, très souvent aux échangeurs qui sont aux normes autoroutières. Donc la question de la sécurité n’existe même pas. Le seul problème, c’est les bouchons que les accidents engendrent parce qu’il y a un problème de desserte pour sortir les voitures. Une fois que vous avez passé Saint-Martin-de-Crau, vous êtes coincés sur cette route. Mais des aménagements peuvent être réalisés pour le résoudre en permettant aux voitures de sortir sur un axe secondaire.

Et concernant la question de l'écologie ? 

Sur le problème de la qualité de l’air c’est pareil, il y a eu des études d’AtmoSud et du pôle d'équilibre territorial et rural qui nous disent que les stations les plus polluées du centre-ville à Arles ne sont pas celles qui sont à proximité de la RN113, mais celles qui subissent la bagnole du centre-ville. Même si on diminuait par deux le trafic, ce qui est l’ambition de l’autoroute, cela influerait de manière anecdotique sur la qualité de l’air à Arles. L’argument de la pollution est fallacieux. Donc je m’inquiète car quand on est obligé de mentir aux Arlésiens pour faire un projet, cela veut dire quelque chose. S'il avait un intérêt, on n'aurait pas besoin de mentir.

Quels leviers comptez-vous utiliser pour tenter de faire annuler ce projet ?

On va se mobiliser cet automne s’il y a une enquête publique pour informer les gens. Le problème, c’est qu’ils sont sous informés. On les fait rêver, on leur dit qu’il ne peut pas y avoir de plan local de déplacement tant qu’il n’y a pas d’autoroute, comme si l’autoroute était l’alpha et l’oméga qui allait régler tous les problèmes de la ville. On va s’adosser aux grands collectifs français pour engager de grands mouvements citoyens. Les associations vont déposer des recours au tribunal administratif. Si c’est un bras de fer qu’il faut engager avec les services de l’État, on va clairement utiliser les mêmes moyens de lutte qu’utilisent les autres collectifs, avec une mobilisation continue sur les zones du tracé. Souvent, les chantiers commencent avant que les recours soient terminés parce que l'État est persuadé qu'il va gagner, et il y a plein de cas où des chantiers ont été déclarés illégaux mais ils étaient terminés, tout était détruit. Donc s'il faut occuper le terrain jusqu'à ce que les recours soient finis, on ira jusqu'au bout, avec des collectifs prêts à se mobiliser sur d'autres territoires que l'A69. 

Les travaux de l'autoroute A69 ont justement été suspendus la semaine dernière suite à une décision du tribunal administratif de Toulouse. Cela vous donne de l'espoir dans votre lutte ?

C'est un espoir fou, car le chantier était bien commencé. C'est la preuve que l'État est capable d'investir des millions dans le portage de grands projets inutiles. Il y a des parallèles entre ces deux chantiers, avec les mêmes fausses informations d'utilité publique. C'est une condition réglementaire pour avoir des autorisations environnementales. Depuis des années, des porteurs de projet déclarent eux-mêmes des projets d'intérêt public, sans jamais en faire la démonstration. Et sur Arles, c'est la même chose. Ils disent que le projet va avoir un impact positif sur l'économie locale, sans jamais nous expliquer comment. L’espoir, c’est qu’il n’y ait pas d’argent car je ne sais pas où on va trouver l’argent. L’État dit que cela va coûter 170 millions d’euros aux collectivités locales pour la poursuite du dossier. Qui a 170 millions d’euros dans les collectivités locales à mettre dans ce projet ? On nous parle d’économie, de remboursement de la dette à Arles et là, on va nous sortir 170 millions de dessous le chapeau. C’est du grand n’importe quoi. 

Propos recueillis par Louise Gal

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