FAIT DU JOUR Claude Bouillet, l’homme qui sifflait en travaillant
L’ancien arbitre international de football a posé ses valises dans le Gard depuis 1979. S’il n’officie plus sur les terrains, Claude Bouillet reste actif avec ses fonctions de président de la commission des arbitres aux district Gard-Lozère.
« Mon premier match de D1 c’était avec Michel Platini et le dernier avec Jean-Pierre Papin, deux ballons d’or. Pas mal non ? » Claude Bouillet n’est pas peu fier de son parcours d’arbitre international et il se replonge dans son passé avec bonheur mais sans nostalgie. Du haut de ses 78 printemps, l’homme n’est pas du style à se laisser aller. « Pas de tabac, pas d’alcool et 150 kilomètres à vélo par semaine » explique cet ancien officier de l’Armée de l’air. Des histoires, il en a des centaines à raconter sur sa carrière d’arbitre qui l’a vue gravir tous les échelons. Arbitre de district (1967), de ligue (1973), de la Fédération (1976), de D1 (1979-1992) et enfin international (1984-1992).
« Luis Fernandez m’a mis un carton rouge »
Celui qui voulait être pilote de chasse a dû faire un choix professionnel. Il a choisi l’arbitrage et il ne le regrette pas. Le mayennais de naissance a fait ses comptes et il a noté 1314 matchs dont 254 en D1 et 83 à l’international. Le point d’orgue de ce parcours reste la finale de la coupe de France 1988 entre le FC Metz et le FC Sochaux. Il conserve d’ailleurs un exemplaire miniature de la coupe de cette année-là. « C’était la plus belle des récompenses, J'étais le numéro 3 français. J’ai remercié tous les gens qui m’avait aidé et je les ai invités pour la finale, il y avait pas mal de généraux ».
Puis il a arbitré tous les plus grands joueurs de son temps. Les français bien sûr comme Platoche : « Un jour, sur un coup-franc, je me suis rendu compte qu’il mesurait les pas que je faisais pour mettre le mur à distance. Bien entendu, le lui ai mis un carton jaune ». Mais aussi Zinedine Zidane qui « ne parlait pas beaucoup » ou encore Didier Deschamps qui « avait un respect total de l’arbitrage ». C’est aussi une époque où les hommes en noir, comme on disait, étaient proches des joueurs : « Ils étaient abordables et il y avait un attachement entre nous. Je me souviens de Luis Fernandez, que j’avertissais régulièrement et qui, lors d’un match de gala, m’a mis un carton rouge en rigolant. C’était bon esprit ».
Le maillot de Maradona
Parfois, l’arbitre est victime de la malice de certains joueurs : « Je me suis fait blouser par Daniel Bravo. Sur un corner il marque un but de la main, je ne l’ai pas vu », avant de finalement lui avouer quelques années après. Puis il peut s’enorgueillir de posséder un maillot de Diego Armando Maradona : « Un des dirigeants de Naples était un officier de l’armée italienne et nous avons discuté entre militaires. Il m’a promis un maillot de Maradona. Quelques mois après, j’ai arbitré Naples à Budapest, en coupe d’Europe et à la fin de la rencontre, l’argentin est venu me donner sa tunique. Ça ne m’a pas empêché d’arbitrer équitablement le match » se souvient l’ancien arbitre.
Claude prend du plaisir, mais ne fait pas fortune : « pour mon dernier match j’ai touché 300 francs » environ 75€. L’une des grandes joies de Claude Bouillet c’est d’avoir officié aux quatre coins du monde : « Je suis peut-être le seul français à avoir arbitré sur les cinq continents ». En 1979, il s’installe dans la région nîmoise pour ne plus jamais en partir. Il devient même conseiller municipal à Manduel, la commune où il réside. C’est lui qui arbitre le match inaugural du stade des Costières (France A’ – Pays-Bas A’) avant de racrocher son le sifflet en 1992. Toufefois, il conserve une activité avec son poste de conseiller technique au district Gard-Lozère.
« J’ai formé 1 800 arbitres »
Puis il y devient président de la commission de l’arbitrage en 2009. « J’ai formé 1 800 jeunes et désormais je suis chargé des désignations. Cela consiste à préparer les compétitions et les examens des formations. Je me régale de former les jeunes ». Claude inculque aux postulants quelques précieux conseils : « Il faut prendre du recul et ne pas répondre aux provocations. Se mettre dans une bulle. Il faut de la personnalité et de l’assurance ». Mais le Manduellois fait un constat sans concession de l’état du football en 2023 : « Il y a des parents qui sont infects sur le bord du terrain et on perd beaucoup d’arbitres à cause des incivilités et de la violence ».
Au district son bureau et collé à celui de Nicolas Rainville, le conseiller technique en arbitrage, qui ne tarit pas d’éloges envers son ainé : « Je m’appuie beaucoup sur lui, nous formons un binôme fusionnel. C’est lui qui dit oui et c’est moi qui dis non. Il a une très grande connaissance des arbitres gardois ». Le ballon rond continue de rythmer le vie de Claude Bouillet mais il n’oublie pas que ce qu’il a vécu, il le doit aussi à une personne : « J’ai eu la chance d’avoir Suzy, ma femme qui m’a beaucoup aidé et qui est décédée il y a 20 ans ». Fort d’un riche passé, l’ancien arbitre prend désormais plaisir à transmettre sa passion aux nouvelles générations d’arbitres gardois.