FAIT DU JOUR Rani Assaf : « Je ne mettrai plus d’argent dans le Nîmes Olympique »
L’avenir du Nîmes Olympique, le refus de permis de construire, la situation sportive et financière du club : Rani Assaf dit ses quatre vérités. Il n’a pas pris la parole depuis des mois, il n’a pas donné de nouvelles à la Ville de Nîmes. Mais pour Objectif Gard, le magazine, Rani Assaf, le président du Nîmes Olympique, revient sur la situation du club et son avenir dans une discussion à bâtons rompus. Florilège.
Pourquoi Rani Assaf est-il absent depuis des mois ?
Après un été loin du Gard et de l’Occitanie, Rani Assaf est de retour depuis septembre. Il explique : « Je n’ai pas vu un match depuis Dijon. Je ne viens pas parce que je pense que c’est contre-productif pour l’équipe. Je n’ai pas envie de revivre le match face à Dunkerque. C’est pour l’équipe que je préfère prendre de la distance. »
La guerre avec les supporteurs. Stop ou encore ?
« À Nîmes, on ne peut pas développer un club sportif car il faut de la sérénité. Et c’est probablement l’une de mes plus grosses erreurs, d'avoir cru que l’on pouvait diriger un club contre la culture d’une minorité vocale. Ce club est identitaire, tant mieux. Mais voilà où l’identité a emmené Nîmes aujourd’hui. Si je le compare à Montpellier. On dit que Nîmes est une ville de football. C’était probablement le cas il y a 30 ans, pas aujourd’hui. C’est désormais une ville de passion. Mais pas une terre de football. Si le rugby était dans le Top 14. Tous les Nîmois seraient rugbymen. C’est une terre de passion. Et parfois, la passion tue. »
Les incompréhensions sur son ambition pour Nîmes Olympique...
« Depuis le début, je le dis. Il faut tout reconstruire. Mais tu ne reconstruis pas en cinq ou six ans. Mais faut de la patience. Aujourd’hui, en Ligue 2, malgré trois millions de droits TV, il faut aujourd’hui dégager un budget de neuf millions d’euros, minimum. Encore davantage quand le championnat va passer à 18 clubs très bientôt. Cela ne se rentabilise pas comme cela. Encore moins à Nîmes. Les gens ne comprennent pas que la structure du club ne permet pas d’équilibrer par des revenus sur la billetterie. Ni sur les sponsors. C’est insuffisant. Il suffit de voir l’USAM Nîmes-Gard. Ils revendiquent beaucoup de partenaires, mais à la fin, ce sont les subventions publiques qui font tourner. »
À propos de la santé financière du club...
« On a assez d’argent pour tenir 18 mois sachant que le coût d’une saison en National est de 3,5 millions d’euros. J’essaie donc de faire des économies. Et je veux rappeler que dans toutes les villes moyennes, les municipalités mettent au moins 3 millions chaque année dans leur club sportif. Prenons la Ville de Pau, c’est la Ville qui a fait le stade, le centre d’entraînement. Moi, je dois supporter toutes les charges. Même l’association a des miettes de la Mairie. C’est facile après de dire que l’on veut un grand club. Tout ce que j’espère, c’est que l’on fasse une bonne saison. Surtout, que l’on ne descende pas. »
Mais le club a-t-il des perspectives ? « À date c’est zéro ! Après si l’on remonte en Ligue 2, avec des perspectives économiques plus fortes, peut-être que l’on trouvera quelqu’un pour racheter le club. Mais aujourd’hui, qui va reprendre Nîmes Olympique ? » S’il n’y a pas d’accession en Ligue 2 à la fin de cette saison, la saison prochain risque d’être très difficile. Car le Nîmes Olympique doit passer devant la DNCG (gendarme financier du football) et qu’il ne reste que 18 mois de trésorerie. « Comment je vais expliquer que nous n’avons pas de perspectives financières, pas de projet suffisamment fort pour assurer une pérennité au club ? »
De fait, la liquidation du club à la fin de la saison apparaît comme une alternative possible. « Ou la saison d’après, n'hésite pas à affirmer le patron du NO. Mais on ne va pas rester 10 ans en National alors que les rentrées financières sont faibles. »
La situation sportive en National ce début de saison...
« L’équipe première se défend en National et fait un début de saison intéressant. Nous avons remanié l’ensemble de l’équipe, fait confiance à des jeunes. Ce n’est pas trop mal. » En ce qui concerne le coach, Frédéric Bompard, « pour, l’instant, y'a les résultats. Même si cela pourrait être mieux. Au mercato, faudra regarder attentivement la situation avec Sébastien Larcier, le directeur sportif, qui fait du bon boulot. Dommage de ne pas l’avoir eu avant, y'a deux ou trois ans. Mais on ne refait pas l’histoire ».
L’absence de chauffage et d’eau chaude à la Bastide, le centre d’entraînement...
« Nous n’avons pas de chance, les deux chaudières sont tombées en panne en même temps. Mais tout est en cours, les pièces arrivent et la réparation est imminente. Quand l’eau a été coupée, nous avons proposé au staff d’aller se doucher aux Antonins. Pareil pour la toiture, elle m’a coûté 50 000 euros. On attendait la garantie dommage-ouvrage puisqu’elle a été faite il y a quatre ans. Mais renseignement pris, l’entreprise de construction a fait faillite depuis… »
Le permis de construire du nouveau stade...
« Je ne me vois pas déposer un nouveau permis de construire. C’est un an et demi d’instruction, au mieux. Le pire, c’est que toutes les études environnementales ont été validées depuis deux mois. Si on avait passé la CNAC (Commission nationale d'aménagement commercial), nous n’avions plus que l’enquête publique sur l’urbanisme et l’environnement pour démarrer officiellement le projet. Là, tout est parti à l’eau.
Les gens pensent que le projet, je le faisais pour l’argent. Tout va bien de ce point de vue-là. Je viens de terminer un projet dans le Nord de la France. Je gagne plus d’argent que ce que j’aurais pu gagner à Nîmes. Sur le nouveau stade, s’il ne se fait pas, je vais perdre finalement 15 à 20 millions. Franchement, ce qui m’embête le plus, c’est la déception de tous les acteurs qui ont participé aux projets. C’est à eux que je pense. Ils ont tout perdu. C’était un bijou le futur stade. D’un point architectural en premier lieu. »
Concernant le refus de permis de construire par la Ville...
« Je ne l’ai pas reçu à ce jour. Pourtant, la signature daterait d’un mois au moins. J’attends avec hâte de le recevoir et de lire attentivement les motifs de refus pour me prononcer. »
À propos de la décision défavorable de la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) ?
« Nous avons déposé le dossier de revoyure à la Ville. Ce n’est pas nous qui déposons en direct auprès de la commission nationale. C’est la Ville de Nîmes qui doit en envoyer une copie à la préfecture et à la CNAC. Nous, on doit simplement envoyer aux plaignants. Ce que nous avons fait. J’ai découvert que le premier adjoint, Julien Plantier, en charge de l’Urbanisme avait signé de sa main, un courrier en direction de la CNAC. Courrier dont j’ai eu copie. C’est l’incompréhension. D’ailleurs, j’ai l’impression à la Ville et à l’Agglo que tout le monde n’était pas au courant de cette initiative. Est-ce que le premier adjoint avait le pouvoir de signature du maire puisque seul son nom apparaît en bas du courrier ? Il faut dire que c’est assez étonnant, pour ne pas dire mieux. C’est comme si un vendeur formulait un recours contre l’acquéreur de sa maison. On fera un recours contre la décision de la CNAC. Hors de question d’en rester là. »
Sur le contexte économique et immobilier dégradé...
« Si on prend la photo aujourd’hui, peut-être que le contexte est plus tendu. Même si on était allé au bout, avec les éventuels recours, on aurait purgé le permis de construire en 2027-2028. Sachant que l’on avait prévu de revoir le projet pour faire quelques économies. Oui, aujourd’hui, il n’était peut-être plus autant rentable. Presque plus finançable. Mais dans un an ou deux, cela n’aurait peut-être pas été la même chose. »
L’avenir du Nîmes Olympique sans stade des Costières...
« Le Nîmes Olympique peut jouer toute sa vie au Stade des Antonins. C’est une possibilité puisque la Ville a fait savoir qu’elle n’avait pas les moyens de refaire un nouveau stade. Après, objectivement, c’est possible. Si demain tu as besoin de plus de tribunes parce que tu es en Ligue 1, c’est jouable. On peut rajouter 2 000 places de plus pour être à 10 000 spectateurs. C’est super facile.
À l’heure actuelle, c’est un permis de construire provisoire. Mais on peut le transformer sans difficulté en un permis définitif. D’autant que rien dans le PLU de la Ville de Nîmes n'empêche sa présence à l’exception de la proximité de la tribune Nord par rapport à l’autoroute. À l’heure actuelle, la contrainte est à 100 mètres. Le maire de Nîmes peut très bien - c’est sa décision - revenir à 50 mètres. Moi, je ne peux pas revendre le stade des Antonins. La Ville pourrait donc en disposer dans les prochaines années. Décider que ce stade est désormais le stade du Nîmes Olympique. Dans l’intervalle, raser les Costières et faire un véritable projet immobilier. »
Son avenir personnel à Nîmes...
« J’ai envie de profiter de la vie. Encore plus depuis le covid. J’ai bientôt 50 ans. Je n’ai pas quitté Free pour replonger dans une galère financière. Parce que les gens ne le savent pas, mais ce projet immobilier du Nîmes Olympique, c’est une galère financière pour moi. Les gens pensent que je me gave. C’est faux. Je me mets une dette de malade. Pourquoi ? Pour sauver le club et lui offrir une pérennité sur plusieurs décennies… J’ai peut-être d’autres choses à faire dans ma vie. »
Au sujet de son avenir au Nîmes Olympique...
« Le projet est fini avec la Mairie aujourd’hui. Mais, je ne sais pas aujourd’hui comment faire financièrement pour tenir le club jusqu’en 2026. J’ai juré que je ne mettrai plus d’argent dans le Nîmes Olympique. »