A 11h30 ce matin, près de 400 personnes, dont essentiellement les 353 maires Gardois ou leurs représentants, se sont réunis devant la préfecture pour protester contre les restrictions budgétaires de l'Etat.

A l'appel de la présidente de l'association des maires du Gard, Pilar Chaleyssin, les édiles de petites comme de grandes communes ont manifesté devant les grilles de la préfecture. Parmi eux, le sénateur-maire de Nîmes, Jean-Paul Fournier, qui a commenté : "Avec la baisse sans précédent de 30% des dotations, l’Etat siphonne le pouvoir d’action des communes. Il les oblige même à rogner sur le service public et sur leurs investissements. Ainsi, en rétractant à ce point l’investissement des collectivités territoriales, l’État fragilise l’un des leviers de la croissance. Cette décision politique, prise sans concertation, par le nouveau Premier ministre Manuel Valls, au lendemain des élections municipales, remet ainsi en cause le programme sur lequel les élus locaux s’étaient fait élire".

Si beaucoup d'élus qui ont fait le déplacement partagent l'avis du sénateur-maire, d'autres tiennent à se démarquer. C'est le cas de Benoît Garrec, maire de Collias, qui s'étonne de la présence de certains de ses homologues :"J'ai du mal à comprendre la position de certaines personnes qui sont là ce matin. Quand ils sont à Paris, leur parti va dans le sens de la restriction budgétaire. Mais quand ils sont ici, ils sont contres ! Je ne comprends pas cette schizophrénie", lance le maire de Collias qui indique que sa commune aurait connu une baisse de 30 000€ suite aux restrictions budgétaires.

Laurent Pelissier, maire de Saint-Laurent-d'Aigouze est à peu près sur les mêmes chiffres :"Cette année, à Saint-Laurent-d'Aigouze, c'est 15 000€ en moins. En 2016, on prévoit une baisse de 86 000€ et de 120 000€ en 2017. Pour la communauté de communes Terre de Camargue, dont je suis le président, c'est 300 000 euros en moins. Alors, bien sûr qu'on a conscience qu'il faut faire des efforts et on les fait déjà. On réduit nos charges de fonctionnement. Mais là, l'effort demandé est trop important".

Une délégation d'élus a été reçue une vingtaine de minutes par le préfet Didier Martin. En sortant, Pilar Chaleyssin s'exprime brièvement :"Le préfet s'est engagé à faire remonter nos doléances et ce dès cet après-midi à M. Vallini (le secrétaire d’État à la Réforme Territoriale en visite à Nîmes aujourd'hui, NDLR). C'est un mouvement réel, qui montre le souci de tous les maires et de nos administrés".

"Aujourd'hui c'est trop vite et trop fort"

A Villeneuve-lèz-Avignon, dont le maire Les Républicains Jean-Marc Roubaud était devant les grilles de la préfecture, la mairie était symboliquement fermée ce matin de 11h30 à midi, et plusieurs élus ont distribué des tracts. "Pour nous, c'est 500 000 euros en moins cette année, après déjà une baisse de 200 000 euros en 2014, sur un budget de 16 millions d'euros pour le fonctionnement et de 6 millions pour l'investissement", explique le deuxième adjoint au maire Xavier Belleville.

Pour autant, si l'élu admet que "les économies il faut en faire", il estime qu'"aujourd'hui c'est trop vite et trop fort." Pour Villeneuve, les conséquences se matérialisent par "une baisse de tous nos bidgets de fonctionnement de 3 à 4 %, des événements moins chers et pour le 14 juillet, on n'a pas fait de feu d'artifice." Aujourd'hui, Xavier Belleville n'a aucune idée du niveau d'une éventuelle nouvelle baisse des dotations de l'Etat en 2016, et demande "une stabilisation, pour qu'on puisse se projeter jusqu'à 2020."

Le conseiller municipal d'opposition communiste Dominique Declosmenil était aussi présent ce matin. Bien qu'aux antipodes sur l'échiquier politique, le communiste estime lui aussi que "la baisse des dotations est une mauvaise mesure, notamment pour les PME et les associations", avant toutefois d'affirmer que "la droite a dans son programme 150 milliards d'économies budgétaires." 

Et aussi : 

Dans un communiqué, le député PS de la troisième circonscription du Gard Patrice Prat rappelle qu'il n'avait "pas voté cette réduction des dotations" qui "depuis plusieurs années déjà, aggrave la situation financière de nos communes." Le député réputé frondeur, qui a été maire de Laudun-l'Ardoise pendant 19 ans, estime également que les mesures annoncées par le gouvernement suite aux critiques sur ce dossier "sont loin d'être satisfaisantes." Patrice Prat dénonce aussi une contradiction : "Réduire de manière drastique les concours de l'Etat a pour conséquence la baisse des investissements publics et, pour corolaire, la fragilisation du tissu économique local déjà en grande difficulté. Ainsi, j'ai pu constater, ici et là dans ma circonscription, des entreprises de BTP devoir se séparer de leurs salariés. Au moment où nous mettons l'accent sur la lutte contre le chômage, cela sonne un peu faux !" 

Et le député ne s'en prend pas qu'à son propre camp, puisqu'il réserve un tacle au président de l'Association des Maires de France, l'élu Les Républicains François Baroin, qui "a oublié de souligner que du temps où il était aux responsabilités aux côtés de M. Sarkozy, il avait accéléré et cautionné ce mouvement de désengagement de l'Etat. De plus, ses collègues parlementaires de droite ne manquent pas, dans l'hémicycle, de pointer du doigt les gaspillages et l'impérieuse nécessité de faire des économies. On pourrait sur ce point être tous d'accord mais les propositions qu'ils formulent seraient autrement plus catastrophiques que celles qui sont actuellement mises en oeuvre par ce Gouvernement. On ne peut pas tenir deux discours selon qu'on se trouve à Paris, dans les enceintes parlementaires, dans la machine infernale des Partis, ou dans sa mairie !"

Tony Duret & Thierry Allard