BASSIN D’ALÈS L’État menace de bloquer les permis de construire dans six communes
La « non-conformité » du système d’assainissement d’Alès pourrait, à en croire l’État, remettre en cause des demandes de permis de construire sur les communes d’Alès, Saint-Hilaire-de-Brethmas, Saint-Jean-du-Pin, Saint-Julien-les-Rosiers, Saint-Martin-de-Valgalgues et Saint-Privat-des-Vieux.
C’est la menace que fait planer la préfecture du Gard, telle une épée de Damoclès, au-dessus de plusieurs communes du bassin alésien, dont la principale, Alès. Elle fait suite à un contrôle réalisé par la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) du Gard. L’organisme a constaté, pour l’année 2016, que le système d’assainissement d’Alès, situé à Saint-Hilaire-de-Brethmas, « n’est pas conforme à la réglementation européenne », en particulier sur ce qui concerne la collecte des eaux usées par temps de pluie.
Actuellement, un réseau collecte les eaux usées et les eaux pluviales dans les mêmes canalisations. Or, la station d’épuration n’est pas dimensionnée pour recevoir de tels débits et se retrouve « en situation de surcharge sur le plan hydraulique » avec des charges entrantes évaluées à 156%. Une irrégularité pointée du doigt par les services de la préfecture du Gard qui exigent du président d’Alès Agglo, Max Roustan, de présenter avant le 1er mai un « plan d’actions engagé qui permettra la mise en conformité du système d’assainissement d’Alès. » Craignant une « atteinte à la salubrité publique », le préfet va plus loin en menaçant de s’opposer « à toute nouvelle demande de permis de construire individuel ou de permis d’aménager. » La décision s’appliquerait sur les communes d’Alès, Saint-Hilaire-de-Brethmas, Saint-Jean-du-Pin, Saint-Julien-les-Rosiers, Saint-Martin-de-Valgalgues et Saint-Privat-des-Vieux. Une exception à cette règle pourrait toutefois être concédée pour certains projets d’intérêt général tels que la construction de logements sociaux.
Christophe Rivenq : « On marche sur la tête »
Du côté d’Alès Agglo, le directeur général des services, Christophe Rivenq, répond avec flegme : « C’est juste une menace. Ce n’est pas possible que l’État bloque l’urbanisation. Nous allons présenter des plans pluriannuels, des rencontres sont prévues et des travaux seront faits. De toute façon, on n’a pas attendu le courrier de la préfecture pour agir, mais il n’existe pas de solution parfaite. » Enfin si… Mais cette solution -qui consisterait à reprendre tout le réseau d’assainissement pour séparer les eaux usées des eaux pluviales- coûterait, selon Christophe Rivenq, plus de 100 millions d’euros ! « C’est illusoire et impossible à réaliser techniquement », constate-t-il avant de souligner, non sans ironie : « en 2014, cette station était top, il n’y avait pas de problème. Et d’un coup, elle devient inopérante parce que la loi change en 2015. Résultat, l’État fait pression sur nous tout en nous demandant en parallèle de ne plus investir... On marche sur la tête ! »
Même constat pour Claude Cerpédès, maire de Saint-Martin-de-Valgalgues : « L’Europe met en demeure l’État qui, lui, refile la patate chaude aux collectivités. Il y a un nombre incalculable de stations d’épuration qui sont dans le même cas que nous (…) Maintenant, nous devons montrer notre volonté de réparer les réseaux aux endroits où c’est techniquement réalisable et trouver des améliorations de fonctionnement sur la station, mais tout cela prendra du temps. » Quant au risque pour les communes de ne plus pouvoir délivrer des permis de construire, le maire de Saint-Martin-de-Valgalgues « n’imagine pas l’État mettre à exécution cette menace. Ce serait catastrophique pour le territoire. » Comme lui, le maire de Saint-Hilaire-de-Brethmas, Jean-Michel Perret, n’est pas franchement rassuré par l’avertissement du préfet : « Je suis inquiet pour ceux qui souhaitent faire construire. Il faut savoir que depuis mon élection, je délivre une centaine de permis par an. » Et sans urbanisation, c’est le développement de tout un bassin de vie qui partirait...à vau-l’eau.
Élodie Boschet