FAIT DU JOUR Les députés du Gard font leur rentrée à l’Assemblée
Ambiance rentrée des classes pour les députés du Gard qui ont participé à leur première séance publique, ce mardi, consacrée à l’installation de l’Assemblée nationale.
« C’est le 5h47 du mardi », s’amuse Philippe Berta. Seul député de la majorité présidentielle rescapé de la vague Rassemblement national dans le Gard, l’élu MoDem de 62 ans - et quelques uns de ses homologues - a pris, ce mardi matin, le train aux aurores en gare de Nîmes centre. Si le Nîmois a ses habitudes, ce nouveau mandat s’annonce toutefois différent. Certainement plus fastidieux, en raison de la majorité relative (245 députés sur les 577 sièges de l'Assemblée nationale) d’Ensemble, nom de la coalition du président Emmanuel Macron.
Philippe Berta, un « député encore plus libre »
Dans le taxi qui le conduit au palais Bourbon, le parlementaire se livre sur le rôle qu’il entend jouer ces cinq prochaines années : « Je serai un député encore plus libre qui vote en fonction de la loi proposée et non pas des mots d’ordre. Ma position est facilitée par ma connaissance de l’institution, sachant peut-être mieux en jouer. » Aujourd'hui l’Assemblée compte 47 députés MoDem, un nombre équivalent à la précédente législatives 2017-2022. Sauf que la fonte du nombre de députés La République en marche (aujourd’hui Renaissance, NDLR) donne de facto plus de poids aux centristes.
Membre de la commission "Culture, Éducation, Recherche et Enseignement supérieur", l'enseignant-chercheur a quelques velléités, à l’image du président MoDem François Bayrou. Ces derniers jours, le Béarnais a mis la pression sur le Gouvernement, déclarant son désaccord sur l’inscription du droit à l’avortement dans la constitution ou sur le recrutement des enseignants par les chefs d'établissement. « François Bayrou joue sa carte… en revanche sur l'IVG, la France n’est pas les États-Unis. Il y a d’autres urgences », réagit le Nîmois qui préfère se battre « pour que les 25 milliards alloués au budget de l’Enseignement supérieur et de la recherche soit délivrés sur cinq ans au lieu de sept ! ».
Nicolas Meizonnet, « un député sérieux »
S’ils ne sont pas du même bord politique, les députés Gardois ont un point commun : se targuer d'être une « opposition constructive ». Dernier mandat d’Emmanuel Macron, beaucoup de parlementaires préparent la relève. Le Rassemblement national va devoir prouver qu'il peut s'ériger du rang de parti contestataire à celui d'opposant et plus tard, de gouvernement. « On a fait miroiter que le RN n'était qu’une force d’opposition, ce qui est absolument faux ! », prétend l'élu de la 2e circonscription du Gard, Nicolas Meizonnet. Le Vauverdois de 38 ans, qui a pris la suite de Gilbert Collard sous le précédent mandat, a vécu ce mardi sa première rentrée parlementaire.
« Jusqu’ici Emmanuel Macron avait une très large majorité. Aujourd’hui, il est obligé de revoir sa façon de gouverner et bien évidemment nous entendons peser dans le débat. Nous avons la possibilité d’influer sur la vie parlementaire », veulent croire Nicolas Meizonnet et les 88 autres députés RN. Ancien membre de la commission Défense, le député a opté ce coup-ci pour les affaires économiques : « Compte tenu des sujets locaux, sur l’agriculture, la pêche, la viticulture sur ma circonscription. » Une manière pour lui d’avoir un pied à Paris et de répondre aux problématiques locales : « Je serai un député sérieux, de terrain comme je l'ai toujours été. »
Le « poids des responsabilités » pour Yoann Gillet
Devant le palais Bourbon, un frontiste s’apprête, lui, à s’engouffrer pour la première fois sous les ors de l’hémicycle : « Je ressens une certaine émotion et surtout le poids des responsabilités », réagit Yoann Gillet. L'élu d’opposition de la Ville de Nîmes est le tombeur de la députée sortante, Françoise Dumas, sur la 1e circonscription du Gard. Ce mardi, il a d’ailleurs croisé son ancienne rivale, qui après savoir fait ses derniers cartons, a pris un café avec ses assistants parlementaires devant l’Assemblée. « Je souhaite être un député très actif à Paris mais aussi très présent sur le terrain. Il me semble inconcevable d’en être déconnecté », commente-t-il.
Pour son premier mandat, Yoann Gillet a demandé la commission des lois : « C’est la plus intéressante. Elle est très formatrice avec plusieurs sujets comme la sécurité, les collectivités, l’immigration… ». L’un des premiers combats des élus RN sera l’élection du président de la commission Finances, revenant traditionnellement au groupe d’opposition : « Nous sommes le principal groupe d’opposition ! Ce n'est pas la Nupes ! Nous avons 89 députés alors que la Nupes n’est pas un parti. Cette commission est importante pour nous puisqu’elle contrôle l’action du Gouvernement et les comptes publics surtout. » Une manière de voir au plus près la gestion macroniste.
Pascale Bordes « émerveillée » par l’Assemblée
Dans le Gard, quatre postes de députés sont revenus au RN. Il y a deux semaines, la candidate RN Pascale Bordes ne croyait toujours pas à sa victoire : « Ça a été une surprise, c’est vrai. Ça l'est encore un peu... Je conseille à tous, aux amoureux des livres et œuvres d’art, de visiter la bibliothèque de l'Assemblée », indique Pascale Bordes dans la salle des "Pas perdus" qui jouxte l'hémicycle. La Bagnolaise se dit « émerveillée comme un enfant par les lieux, l’ambiance. Mais je n’oublie pas le poids des institutions que je mesure toutes les heures. »
Avocate depuis 35 ans, la sexagénaire participera à présent à l'élaboration des lois qu’elle a tenté de faire appliquer : « Ça fait un moment que je me dis que j’aimerais voir l’envers du décor. » C’est d’ailleurs tout naturellement qu’elle a demandé, comme Yoann Gillet, de siéger dans la commission des lois. Par ailleurs, la députée a déjà fait savoir qu’elle ne fera qu’un mandat : « Je ne vise pas une carrière. Place aux autres. Le monde est vaste et il y a des gens biens partout. » Rendez-vous dans cinq ans.
Une opposition « sans concession » pour Pierre Meurin
Néo-Gardois, Pierre Meurin, 32 ans, est élu sur la 4e circonscription du Gard. Le député doit donc se trouver un logement ainsi qu’une permanence parlementaire et des collaborateurs. Un député de la nation touche 5 700€ net par mois auquel il faut ajouter 5 300€ mensuels pour les frais de mandat (location d’une permanence parlementaire, frais d’hébergement, repas…) et 10 581 € pour l’embauche d’assistants parlementaires. « Chaque citoyen pourra trouver une oreille attentive à ma permanence », promet celui qui est allé remercier les électeurs de Navacelles au lendemain de son élection.
Aujourd’hui, « on entre dans le vif du sujet. Le travail de l’opposition est un travail d’amendement et de propositions de lois », a indiqué celui qui souhaite intégrer la commission développement durable et aménagement du territoire. Il s’explique : « Je vais pouvoir faire avancer plusieurs dossiers locaux comme la 2X2 voies mais aussi la question des taxes sur le carburant. » Le défi pour les députés RN sera « de faire des consensus sur des sujets rassembleurs. En revanche, cela ne vous a pas échappé que le RN est opposé à la politique menée par la Macronie. Nous serons une opposition sans concession bien que digne et constructive. » Une équation impossible ?
L’entrée fracassante de la Nupes et de Michel Sala
Seul député de Gauche dans le Gard, Michel Sala est arrivé au palais Bourbon avec l’ensemble des 131 élus de la Nupes (Nouvelle union populaire écologique et sociale). En l’absence de majorité absolue, chaque vote s’apprête à devenir un véritable combat : « Ça fait cinq ans que cette parole était privée par Macron et son Gouvernement. La Nupes est le groupe d’opposition le plus important de l’Assemblée, donc nous sommes prêts pour discuter de toutes les lois », indique le maire de Saint-Félix-de-Pallières, qui n’entend pas laisser le statut de premier opposant d’Emmanuel Macron à l'extrême-Droite.
La première bataille sera donc celle de la présidente de la commission finances, traditionnellement attribuée à l’opposition. La Nupes a choisi de soutenir le député Éric Coquerel, laissant un poste de vice-présidente de l’Assemblée nationale à la socialiste Valérie Rabault, présidente du groupe Parti socialiste. Cette situation politique donne une nouvelle envergure à l’Assemblée, longtemps considérée comme une chambre d’enregistrement. Autre preuve de cette évolution s'il en fallait une : l’élection de la députée des Yvelines, Yaël Braun-Pivet, à la présidence de l’Assemblée nationale. La première femme à présider cette institution.
Stéphanie Marin et Coralie Mollaret
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