Publié il y a 2 ans - Mise à jour le 19.09.2022 - anthony-maurin - 5 min  - vu 3554 fois

FAIT DU JOUR Retour sur le bilan taurin de la feria des Vendanges cru 2022

Une entame de faena classique pour Juan Leal qui a soulevé les arènes par son courage comme à son habitude (Photo Anthony Maurin). - Anthony MAURIN

Un très grand Juan Leal, ici juste avant de se faire prendre par son Victoriano del Rio (Photo Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Une feria des Vendanges attendue et plaisante dans les arènes comme dans la rue. Trois corridas et une novillada pour d'excellents moments passés sur le sable de la piste.

Dix ans après la corrida parfaite, Nîmes et sa feria vibrent encore devant l'affrontement entre l'humain et l'animal. Cette feria des Vendanges, prise dans la tourmente d'un énième projet de loi visant à interdire les spectacles qui font d'elle ce qu'elle est, est ressortie grandie de ces trois jours de fête. Sans triomphe total, chaque course a eu son lot de choses à voir. Une feria pour l'aficion plus que pour celles et ceux qui viennent aux arènes pour être vus.

Fargon de Margé, premier toro honoré d'une vuelta posthume et probablement le toro de la feria (Photo Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Polémiques ou pas, la corrida doit se regarder en face. Nulle tradition en jeu, nulle coutume, juste un endroit où la mort est encore visible. Ce mot qui effraie chacun concerne pourtant tout le monde. La mort, dans la société actuelle, est dissimulée, jamais assumée sauf pour faire vendre du papier. Mais la mort est pourtant la fin du cycle de la vie. Certains diraient qu'il faut apprendre à mourir pour savoir vivre. La corrida apprend cela, avec ses défauts, certes, ses exagérations, ses méandres et ses côtés obscurs mais la corrida est encore aujourd'hui le seul spectacle culturel où la mort fait face à l'assemblée et où l'assemblée regarde la mort. Avec elle, l'Homme comprend qu'il n'est rien, à peine plus qu'un animal.

Cela faisait bien longtemps que les deux ferias d'Arles (Riz) et Nîmes (Vendanges) n'avaient pas été parfaitement complémentaires dans leur proposition taurine. Aucun nom n'était doublé de l'une à l'autre, même pour les toros, ce qui donnait aux aficionados une bonne raison d'aller là-bas ou de rester ici, voire carrément de jouer sur les deux tableaux.

Adrien Salenc (Photo Archive Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

La corrida de Robert Margé avait lieu le 16 septembre, journée anniversaire du sacre nîmois de Don José. Son cartel offrait des toros français, deux toreros Nîmois et un Mexicain. Les toros ont tenu en grande partie leur promesse. Mieux, ils se sont hissés au rang du respect dû à de tels adversaires. Deux braves, Fargon et Caprié, furent gratifiés d'une vuelta al ruedo à titre posthume après avoir chèrement vendu leur cuir.

Début de faena atypique pour le Rafi (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Leo Valadez a plu sans faire chavirer les arènes. On a connu le Mexicain plus enjoué mais devant de tels toros il est difficile de se relâcher. Non, les toros de Margé ne sont pas des brutes épaisses, au contraire, mais pour bien faire quand on est devant il faut s'arrimer et rester concentrer. Le toreo fleuri du Mexique n'est pas toujours pour face au toro de Fleury d'Aude ! Adrien Salenc a été pugnace et savant. Il triomphe un peu partout en cette fin de saison et c'est le grand gagnant de cette corrida. Malgré le fait qu'il ne sorte pas en triomphe, c'est lui qui aura montré le plus vaste panel de recours. El Rafi a coupé deux oreilles et est sorti en triomphe de ses arènes, chose rassurante pour la suite des événements mais le jeune a une longue route à faire. Il la fera, c'est sûr, mais les méandres qu'elle comporte ne doivent pas l'empêcher de poursuivre son chemin.

Christian Parejo fait passer le novillo près, très près (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Samedi en matinée avait lieu la novillada. Avec la présentation des exemplaires d'Ave Maria et de deux novilleros. Des novillos un peu fades, insipides. Du vent, moins fort que l'après-midi qui a suivi, mais des rafales gênantes. Les jeunes vêtus d'or n'ont pas su emballer la course comme on aurait pu le croire. Engoncés par l'enjeu ? Peut-être. Une arène telle que Nîmes impressionne toujours un peu, notamment Diego Garcia, premier de l'escalafon, qui a perdu ses papiers en venant dans le Gard. On n'aura vu que son ombre.

Lalo de Maria bien à gauche lui aussi (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Comme à son habitude, c'est du petit modèle Christian Parejo qu'est venue la flamme. Le bonhomme triomphe partout où il passe, sa gueule d'ange (très jeune l'ange) lui offre le soutien des gradins qui voient en lui (en plus de l'excellent torero qu'il est) une personne fragile. Même s'il ne triomphera pas, c'est lui qui aura fait voir les plus beaux gestes. Lalo de Maria n'a pas été gâté au sorteo, mais aura tout de même démontré de belles choses, restant dans la même bonne dynamique depuis qu'il est passé dans la catégorie.

Un toro d Victoriano del Rio sous le fer du piquero (Photo Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Le samedi après-midi, le lot de Victoriano del Rio devait emballer les gradins et faciliter le triomphe des piétons. En effet, les toros furent excellents. Un lot homogène dans les qualités, des cornus bien présentés, mobiles, braves, plaisants à voir évoluer en piste, encastés à souhait mais... Le vent s'était levé ! Satané Éole qui met à nu les Hommes. La troisième corne à coup sûr comme disaient les anciens.

Un dernier regard mais les proches refusent de laisser le maestro retourner en piste après ses deux cogidas... (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Devant plus de 10 000 personnes, Juan Leal fut héroïque. Mais avant de l'être, les aficionados qui ne voyaient en lui que vulgarité ou exposition sans raison pourront revoir leur copie ! Il aura toréé comme un grand, un très grand. Aussi intelligent que profond, son toreo a soulevé les arènes. Spectaculaire, sérieux et sans fioritures. Son meilleur passage à Nîmes, certain. Sa meilleure faena de la saison probablement. Oui, l'Arlésien veut se gagner une place indiscutable au soleil de la piste. Sur son premier, il se fait sévèrement bouger si bien qu'il fera un passage à l'infirmerie et n'en ressortira que pour combattre son deuxième toro. Là, il va prendre sur lui et retourner dans la mêlée, au feu. Son mental de torero lui ordonne, mais son corps refuse. Boitillant, le regard vague et le teint blanc, l'Arlésien se fait une nouvelle fois prendre. Deux côtes cassées et quelques traumatismes, Juan est sorti de l'hôpital hier (dimanche, NDLR) midi.

Une dernière série de Bernardinas pour plaire aux tendidos et se faire un peu peur (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Andrés Roca Rey, qui a encore du mal à briller dans les arènes qui l'ont sacré matador de toros, a tout de même coupé une oreille au toro de Juan Leal quand le natif de Paris a dû être envoyé à l'infirmerie. Une oreille de poids après une vraie faena de qualité. Le Péruvien a pris son trophée, l'a montré à l'infirmerie et est sorti de piste. Isaac Fonseca a triomphé en coupant deux oreilles au dernier de la tarde. Les tendidos auront aperçu un torero plein d'entrain, courageux lui aussi et vaillant. Mais les gradins auront-ils pu apprécier le reste de la proposition de Fonseca ? Des petits détails cachés, des attitudes simples mais efficaces, des mots envers sa cuadrilla...

Un toro de Fuente Ymbro (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Rien pour la matinée dominicale dans l'amphithéâtre mais la feria devait se clôturer par une course de Fuente Ymbro et des toreros artistes dans l'âme. Parfois, une corrida peu laisser perplexe le plus bavard des commères. Que dire de celle d'hier ? Pas grand chose. Pas grand chose du tout... Les toros étaient bien là, moins vibrants qu'à l'accoutumée, moins braves, moins nobles, moins tout. Les toreros aussi étaient là. Moins brillants, moins batailleurs, moins tenaces. Le public était également de la partie.

Paco Ureña, sur son premier, a coupé la seule oreille de la dernière tarde de cette feria de Nîmes édition Vendanges 2022 (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Une moitié d'arène, ça peut faire du bruit quand ça le veut mais vraisemblablement, le public de ce dimanche soir de clôture de feria avait pris un coup sur la tête ou se retenait d'exprimer les choses. seul Paco Ureña, et encore il s'agissait d'une récompense de bienvenue pour lancer la course, a coupé une oreille.

Anthony Maurin

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